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Afrique

Les exportations ne font pas le bonheur des peuples, selon la CNUCED

mercredi 15 septembre 2010

(MFI / 14.09.10) Dans un rapport publié mi-septembre, la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement remet en cause la stratégie de croissance axée depuis trente ans sur les exportations. La CNUCED affirme que celle-ci ne crée pas forcément des emplois, en particulier dans les pays les plus pauvres.

Les auteurs du rapport de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED) estiment que pour créer des emplois et combattre la pauvreté, il faut avant tout assurer l’expansion régulière de la demande intérieure en renforçant le pouvoir d’achat collectif et en stimulant l’investissement en capital fixe et l’innovation technologique. Cette expansion passe cependant par une réorientation des politiques macroéconomiques et un renforcement stratégique des institutions, qui permettront de faire progresser le revenu du travail en fonction de la croissance de la productivité.

Une explosion du chômage ces quarante dernières années

Le rapport, qui porte sur l’emploi, la mondialisation et le développement fait le bilan de trente années de stratégies de croissance axées sur l’exportation, menées par les pays en développement. L’accent est ainsi mis sur leurs capacités de créer suffisamment d’emplois acceptables pour absorber les excédents de main-d’œuvre qui les caractérisent. Nombre d’entre eux sont devenus excessivement dépendants des exportations, mais tous ne peuvent pas poursuivre en même temps des stratégies de développement de ce type et réussir, prévient la CNUCED. Il importe donc de se concentrer davantage sur les forces intérieures que sont la croissance et la création d’emplois. Cela est d’autant plus important que, dans nombre de pays, la crise financière et économique a provoqué une explosion du chômage qui a atteint des niveaux inégalés ces quarante dernières années.

Dans beaucoup de pays en développement, notamment les plus pauvres, dont la majorité sont africains, les programmes publics d’emploi sont des moyens qui peuvent se révéler très utiles pour lutter contre le chômage et la pauvreté, note aussi le rapport. Non seulement ils ont un effet direct sur la réduction du chômage, mais ils créent du pouvoir d’achat qui aura des effets indirects sur l’emploi dans toute l’économie et fixent un seuil de rémunération et des conditions de travail minimum.

Une reprise fragile et inégale du commerce mondial

Dans de nombreux pays, notamment africains, où la part des actifs travaillant pour leur propre compte ou dans le secteur informel, en particulier dans l’agriculture, est élevée, ces instruments d’une politique des revenus doivent être complétés par des mesures destinées à aligner la progression des revenus des producteurs agricoles sur la croissance de la productivité, comme cela est fait dans la plupart des pays développés depuis des décennies.

« Toutes ces mesures, appliquées ensemble, offriraient de grandes possibilités de gérer la demande de manière à combattre le chômage tout en maîtrisant l’inflation et en réduisant la dépendance vis-à-vis des exportations », souligne le secrétaire général de la CNUCED Supachai Panitchpakdi.

Après une contraction de près de 2 % en 2009 - la première contraction depuis la Deuxième Guerre mondiale - le PIB réel mondial devrait croître de 3,5 % en 2010, notent les auteurs du rapport. Dans le même temps, le commerce mondial, qui avait plongé de 23 % en valeur au premier semestre de l’année dernière, a commencé à se reprendre au milieu de 2009. Le rebond des prix des produits de base par rapport à leurs points bas du premier trimestre de 2009 a dopé le revenu des pays et leurs recettes fiscales. En partie à cause de la forte demande des pays émergents qui s’industrialisent rapidement, mais aussi au regain d’appétit pour le risque de la part des investisseurs financiers.

La création d’emplois acceptables et productifs reste difficile

La reprise est fragile et inégale, avertit cependant la CNUCED. Les pays africains, moins directement touchés par la tourmente financière puisqu’ils sont beaucoup moins intégrés dans les marchés financiers internationaux que d’autres régions en développement, devraient connaître une croissance de 5 % en 2010. En Afrique subsaharienne (non compris l’Afrique du Sud), la croissance sera plus proche de 6 %. Mais la création d’emplois et particulièrement d’emplois de haute productivité et bien rémunérés reste difficile.

Les réformes des politiques appliquées pendant plus de vingt ans n’ont eu que des succès limités. Beaucoup de pays africains ont enregistré dans les années 80 et 90 une contraction du PIB par habitant et des activités manufacturières. À la fin des années 90, la structure de la production rappelait celle de la période coloniale, avec une place prépondérante de l’agriculture et des activités extractives.

L’envolée des prix des produits de base, l’allègement de la dette et la fin d’un certain nombre de conflits internes ont toutefois contribué à un redressement de la croissance du revenu depuis 2003, croissance qui s’est poursuivie ces dernières années en dépit de la crise mondiale. Mais rien n’indique jusqu’à présent que la structure de l’emploi ait réellement évolué. Le taux d’emploi officiel reste élevé en Afrique subsaharienne, ce qui confirme que le problème ne tient pas à une pénurie d’emplois en termes absolus, mais à l’absence d’emplois acceptables et productifs.

60 % des emplois sont encore agricoles

L’emploi agricole, essentiellement de nature informelle, a quelque peu diminué au fur et à mesure que l’urbanisation progressait, mais il représente encore plus de 60 % de l’emploi total. Dans le même temps, il y a eu une augmentation de l’emploi − essentiellement informel aussi − dans les services urbains et le petit commerce. Les emplois salariés dans le secteur structuré ne représentent que 13 % de l’emploi (non compris l’Afrique du Sud), et 60 % des personnes employées sont des « travailleurs pauvres », c’est-à-dire des ménages qui ne peuvent pas pourvoir à leurs besoins essentiels avec le revenu qu’ils perçoivent.

Pour que la situation de l’emploi puisse s’améliorer grâce à une croissance plus rapide du PIB, il faut donc que l’augmentation du revenu dans les industries d’exportation ait des retombées bénéfiques pour le reste de l’économie. Mais cela dépendra à son tour de la demande d’intrants des entreprises, de l’accroissement de la consommation de biens produits dans le pays, et de l’augmentation des dépenses publiques grâce aux taxes plus élevées payées par les exportateurs.

Marie Joannidis

8 commentaires

Vos commentaires

  • 15 septembre 2010 à 08:11 | Basile RAMAHEFARISOA (#417)

    Il fallait attendre 30/40 ans pour dire la vérité au Peuple en souffrance permanente.

    F.M.I,

    Banque mondiale,

    Organisation Internationale du Travail,

    Zone franche,

    Agoa de BUSH .....avec chantage,

    Organisation mondiale du commerce,

    Libre circulation des biens et des personnes..

    « FUITE DES CERVEAUX »

    Tout est à revoir.

    • 15 septembre 2010 à 13:36 | FIPOZ (#2162) répond à Basile RAMAHEFARISOA

      Bravo Basile ! Vous avez énuméré les péchés capitaux qui ont freiné des quatre fers le développement de Madagascar. Sans prise de conscience réelle d’une nouvelle orientation dans la politique, Madagascar fera du sur-place (ou même régressera). J’observe avec une certaine attention cette semaine où tout le melting-pot est en branle pour trouver un itinéraire de sortie de crise en espérant que tout n’a pas été corseté en amont. N’oublions pas que la Démocratie est synonyme de suffrage universel. C’est, à mes yeux, la seule et unique voie. En attendant, que de fonds perdus …. alors qu’à côté la pauvreté est élégamment enjambée !

  • 15 septembre 2010 à 10:01 | razafi (#1661)

    Pour une fois je suis d’accord avec vous sauf que Rajoelina et ces conseillers francais ne sont pas fu tout la reponse...

  • 15 septembre 2010 à 10:33 | Basile RAMAHEFARISOA (#417)

    En méditant sur ce message de la CUNCED,je vous invite à méditer sur un texte de « BEMA »

    « Réconciliation » rime avec « MORALISATION » de la vie politique et un grand changement de mentalité.

    En 50 ans d’indépendance et avec tout notre potentiel,tous nos dirigeants successifs n’ont fait que protéger leurs arrières et affaiblir ou neutraliser leurs opposants.

    La démocratie de façade est le maître mot alors tout ce qui se passe actuellement était prévisible et si nous continuons dans la même voie,la crise est cyclique et on retourne à la case de départ.

    L’exploitation de la sagesse et de la docilité des Malgaches est très flagrante et cette culte de personnalité qui a atteint son paroxysme sous l’ère « Didier RATSIRAKA » a détruit beaucoup d’âme Malgache.

    copier/coller

    « bema » tribune.com

    • 15 septembre 2010 à 17:02 | Mihaino (#1437) répond à Basile RAMAHEFARISOA

      Merci et un grand bravo Basile car étant honnête et intègre, je partage vos réactions ci-dessus ....

      J’ai eu l’occasion de faire une conférence sur le commerce international (cas de Madagascar) et mon objectif était d’instaurer UNE ECONOMIE EQUITABLE et NON et mille fois NON LE COMMERCE EQUITABLE véhiculé et soutenu par des ONG, des ASSOC° diverses et variées. Commerce sous-entend ARGENT contre/MARCHANDISE ou SERVICES de toute nature et que sais-je encore...Prix rémunérateur aux producteurs, absence d’intermédiaires car le circuit de distribution devient court, aides au développement de l’agriculture et des agriculteurs... sont les ppaux arguments de vente de ce fameux « commerce équitable ». D’après mes expériences personnelles et professionnelles à MADAGASCAR, tout ceci n’est qu’un TAPE A L’OEIL et UN VRAI MENSONGE car le but fixé est tout le contraire. Etre tjrs sous le joug des pays riches !!!!Mea culpa si je me trompe car je ne suis pas infaillible comme tout être humain !!

      Par ailleurs, observez bien les acteurs du « commerce équitable ». A qui profite ce pseudo-acte de partenariat ou de bénévolat ?? Au XXIè siècle , il ne faut plus être naîf pour croire aux oeuvres philantropiques !!! Le fric domine le monde et la plupart de nos responsables sont tjrs esclaves du fric . Aucune valeur humaine et sagesse collective laissées par nos ancêtres !! Dommage et quels gachis !!....

      Wait and see ....

    • 15 septembre 2010 à 19:58 | Stomato (#3476) répond à Mihaino

      Cela me fait plaisir de lire une personne qui est contre le commerce équitable...
      Mais je suis contre pour des raisons autres que les votres !

      Si l’on étudie de près la structure du commerce équitable, rien absolument rien de ne permet de garantir que le producteur sera mieux payé. La seule certitude est que le consommateur final paiera plus cher un produit « équitabble » qu’un produit ayant suivi les circuits ordinaires.
      Et la preuve très directe est que les circuits ordinaires se mettent maintenant au « commerce équitable ».
      Et le summum est représenté par les produits BIO du commerce équitable.

      Ceci dit, cela ne résoud pas pour autant le cas des produits de Madagascar, produits qui ne se retrouvent en Europe et en France qu’après avoir subi un circuit long. Circuit devenu plus long avec le temps, ce qui fait que les litchis malgaches arrivent verts, petits et sans goût maintenant.
      Et on leur préfère des litchis venus d’ailleurs.

  • 15 septembre 2010 à 15:58 | vuze (#918)

    Si les exportations étaient effectuées convenablement et rapportaient de l’argent à l’état, on en verrait peut-être les impacts.

    Pour le moment, tout est sous-déclaré, cela rapporte de l’argent aux agents de l’état et non à l’état. Cela est énorme...

    Il est vrai aussi que le fait de dire que l’exportation apporte du bienfait à un pays est une idée bien occidentale... Cela les arrange surtout pour avoir des produits bon marché !!!! Basile a raison de mettre l’AGOA sur la liste des entités soi-disant humanitaires qui se font sucre sur le dos des pays en voie de développement...

  • 15 septembre 2010 à 16:56 | maminah (#2788)

    On s’y perd un peu, dans tous ces revirements et volte-face théoriques. Après le credo du « Sans exportations, point de salut », ne jurera-t-on bientôt que sur le développement autarcique ?

    D’ailleurs on observe que, même dans les pays développés, le programme public de l’emploi a été reconsidéré. Tout en opérant des coupes sombres dans le secteur public (non-remplacement des départs en retraite, suppression de postes, voire privatisation d’entreprises publiques...), on a de plus en plus recours à une politique des grands travaux pour résorber le chômage et relancer la consommation, qui va relancer les investissements et la production, donc le PIB, et ainsi de suite dans un cercle vertueux... Obama lui-même avait axé sa campagne sur cette politique des grands travaux, pour résoudre la crise de 2008.

    Dans le même temps, le niveau de vie très bas des populations de pays d’Afrique exportateurs, de pétrole notamment tel le Nigéria, oblige en effet à revoir sa copie sur le tout-exportation. Je ne parlerai même pas de ce qui nous concerne. Qu’est-ce que l’exportation, il est vrai plus souvent informelle quand ce n’est tout simplement pas illicite, des richesses de notre sous-sol et de nos forêts, a-t-elle apporté à notre PIB ? Et les zones franches elles-mêmes, bien que pourvoyeuses d’emplois, sont fragiles car trop sensibles à l’état du marché. Et pour cause.

    La question qui se pose est maintenant de savoir si ce retour au modèle autarcique est une véritable solution, ou un pis-aller, une artifice pour contourner le marasme du marché mondial, en attendant la reprise ? Car on s’en souvient, les économies des pays du Bloc de l’Est s’y étaient toutes « cassé la gueule », si l’on peut dire...

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