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Tribune libre

« Le journal intime et l’intégrale de l’œuvre de Jean-Joseph Rabearivelo : une affaire française ? »

mercredi 14 juillet 2010

La parution du journal « Calepins bleus » est donc attendue officiellement pour le 4 octobre 2010. Celle de « L’Oeuvre Intégrale » pour 2011.

J’ai été suffoqué de voir exposé et mis en vente à l’UNESCO un opus de promotion de ces parutions annoncées intitulé « Sauvegarde et valorisation des manuscrits malgaches. Le cas de Jean-Joseph Rabearivelo. Un exemple de valorisation des manuscrits francophones », par Laurence Ink, Liliane Ramarosoa et Claire Riffard sous la coordination de Serge Meitinger, Paris, AUF / ITEM-CNRS / EAC, 2010, 55 p .

Comment un grand poète bilingue tel que notre Rabearivelo avant tout national peut-il ainsi faire l’objet d’une appropriation par les Français, même s’il s’agit officiellement de « francophonie » ? Ne nous forçons pas à parler de mondialisation, la démarche, telle qu’elle a été entreprise – dans la plus grande confidentialité et la complicité du CCAC - ne s’y prête pas. Liliane Ramarosoa, qui rompt en apparence le chapelet de noms français en couverture, est clairement définie à la p. 29 comme une « interface avec les institutions partenaires ». On le sait, elle est directeur du Bureau régional de l’AUF à… Bucarest pour l’Europe centrale et l’Europe de l’Est. Aussi ne peut-on pas dire qu’elle représente Madagascar dans ce projet.

Je suis d’autant plus surpris qu’aucun nom de chercheur malgache ne figure dans cet ouvrage. Il y a bien pourtant un chapitre sur la formation de l’équipe. Et, de source plus que sûre, il est acquis que l’équipe d’« éditeurs scientifiques » de cette œuvre très vaste et sans prix est constituée en grande partie d’enseignants-chercheurs malgaches considérés de fait comme de petites mains - passez-moi l’expression. Petites mains mais incontournables, différence culturelle oblige.

Après 50 ans de décolonisation, si les noms des acteurs scientifiques malgaches sont ainsi passés sous silence, la prédation du patrimoine par essence malgache au nom d’une « expérience novatrice en matière de méthode et de démarches scientifiques » est une aberration éthique. Ou serais-je paranoïaque ? Devrait-on se réjouir que les autres fassent le travail en utilisant les Malgaches sans la reconnaissance symbolique qui leur est due dans les conditions difficiles que traverse le pays depuis ces dernières années ? Oh oui, ce serait une raison recevable : les conditions difficiles. Mais à d’autres ! La recherche malgache continue son petit bonhomme de chemin indépendamment de la conjoncture.

Il y aurait matière à réfléchir sur les rapports de force franco-malgaches (les Malgaches sont rémunérés dans ce projet, rassurons-nous, mais à quelle aune ?) : ils rapportent toujours les lauriers aux mêmes qu’il y a plus de cinquante ans !

Cela est scandaleux.

Ny Ando R.

11 commentaires

Vos commentaires

  • 14 juillet 2010 à 07:55 | Patrick A. (#95)

    Je ne me prononcerai pas en ce qui concerne la paternité réelle du contenu de l’ouvrage cité, mais il semble que l’auteur de cette tribune libre tend à oublier qu’avec le bonheur, le savoir est l’une des rares richesses qui ne diminue pas lorsqu’on la partage...

  • 14 juillet 2010 à 08:08 | Stomato (#3476)

    Ny Ando R., votre capacité d’indignation fait plaisir a voir.

    Mais je me demande si votre indignation est jusitfiée.
    Votre prose indique bien que c’est un opuscule qui explique comment sont sauvegardés et valorisés les écrits de ce grand poète...
    Qu’y a-t-il de scandaleux de la part de chercheurs « internationaux » de vouloir sauvegarder des manuscrits malgaches, chose que Madagascar ne peut pas faire ?

    Ensuite je ne comprend pas la raison pour laquelle vous récusez une personne dont le nom est a consonnance malgache au seul prétexte qu’elle travaille à Bucarest dans une structure internationale de la francophonie ?
    Il est vrai qu’elle a le grand tort de ne pas avoir son nom cité par « de source sûre »...

    Finalement votre article est d’une tristesse incomensurable.
    Mais je conçois que vous vous sentiez mieux après avoir lâché votre KK nerveux.

    • 14 juillet 2010 à 12:54 | Ny ando (#1495) répond à Stomato

      Bonjour à tous,

      Un opuscule de 50 pages peut en dire plus qu’un essai de 500.
      Faute de l’avoir entre les mains - trop difficile de diffuser à Madagascar, à moins de fréquenter le cercle institutionnel français et francophone - , je vous prie de bien examiner mon « KK nerveux » à la loupe puisque nous parlons propriété intellectuelle (eh oui) :

      1) À aucun moment, je ne discute de l’intérêt de l’entreprise. Bien sûr, Rabearivelo, je l’aime et j’ai envie de le le lire encore et encore dans toutes les langues que je maîtrise, comme tout amoureux de la lecture dans le monde. Rabearivelo, j’ai envie de mieux le connaître en tant qu’homme. Le voici porté au pinacle de Senghor et de Césaire et ce n’est que justice, 73 ans après son suicide.

      2) Mon principal reproche : les noms des chercheurs malgaches sont tus (j’ajoute : à l’exception, laquelle confirme la règle, d’une Beby Rajaonesy au détour d’un exemple pédagogique). Or ils sont majoritaires et admirables de courage dans la conjoncture actuelle de participer à cette « expérience novatrice ».

      2) Si la technique du silence était le choix, il aurait fallu taire le nom de tout le monde, Malgache double docteur non spécialiste mais administrateur et Français spécialiste de Rabe ou non. Le projet est porté par des institutions extérieures en dehors des institutions malgaches concernées : à ce stade, c’était l’information pertinente.

      2) Les institutions culturelles malgaches (la communauté scientifique est constituée notamment des universités et de l’Académie malgache) sont gommées de l’entreprise. C’est de leur faute, n’est-ce pas, c’est une pure perte de temps que de les impliquer dans un tel projet. On peut les zapper, leurs logos auraient surchargé la couverture.

      3) Ce n’est pas moi qui parle d’éviter les « prédations économiques », posture à la base de cette entreprise. C’est l’avant-propos de l’opus. En effet, l’objet de mon « KK nerveux » est la « prédation économique » en toute confidentialité. J’apprends à l’instant que les documents ont été achetés à la famille Rabearivelo Rakotomanga, libres de son héritage. Je m’en réjouis pour elle. Mais maigre consolation, toute symbolique devant la prédation franco-francophone.

      La surprise a été totale pour moi. J’assume mon post.

      A notre blogueur d’Actualités culturelles (malgaches) qui m’accuse de polémiquer pour rien : j’assume aussi la polémique si elle peut briser le silence dans quoi on nous confine. Je vous souhaite d’ailleurs une excellente continuation pour briller de plus en plus dans ce pays de rien ou les professeurs certifiés français du lycée français et les journalistes étrangers sont plus crédibles que les docteurs es lettres malgaches.

      Merci à Tribune de ne pas avoir censuré ce « KK nerveux », si sale qu’il soit !

      Cordialement à tous

      NB Madagascar peut faire et fait des choses en partenariat transparent. Voyez comme la recherche en archéologie est opérationnelle et mondialement connue : Chantal Radimilahy assume de très hautes responsabilités au sein de l’African Archaeology Network, en tant qu’archéologue du terrain malgache, le saviez-vous ?

    • 14 juillet 2010 à 14:17 | Stomato (#3476) répond à Ny ando

      Votre post initial parle de :
      « J’ai été suffoqué de voir exposé et mis en vente à l’UNESCO un opus de promotion de ces parutions annoncées intitulé « Sauvegarde et valorisation des manuscrits malgaches. Le cas de Jean-Joseph Rabearivelo. Un exemple de valorisation des manuscrits francophones » »

      Si je lis bien et comprend encore un peu cela se passe à l’UNESCO !
      Merci de m’apprendre que l’UNESCO est une structure française, je l’ignorait.

      « En effet, l’objet de mon « KK nerveux » est la « prédation économique » en toute confidentialité. J’apprends à l’instant que les documents ont été achetés à la famille Rabearivelo Rakotomanga, libres de son héritage. Je m’en réjouis pour elle. Mais maigre consolation, toute symbolique devant la prédation franco-francophone. »

      Je suis rassuré, les documents ont été achetés en toute légalité, ils n’ont pas été volés...
      Et il est vraiment positivement scandaleux que la famille Rabearivelo Rakotomanga ait été obligée de se séparer, moyennant finances, de ces documents.

      Je pense que vous devriez vous passer des oeillères qui masquent votre vue. Vous semblez ignorer la capacité des structures malgaches de conserver des documents papier... et autres monuments comme le Rova !
      Vous affirmez, sans preuves comme de coutume, que seul l’attrait du gain a conduit une structure française (l’UNESCO ???) a acheter dans le but de les sauver et les valoriser, des manuscrits malgaches.

      Après tout vous ne faites que suivre l’exemple de certains égyptiens qui se préparent a demander des indemnités aux pays qui ont sauvé le temple d’Abou Simbel... et payé pour ce sauvetage.

      En ce qui me concerne je suis assez fier qu’il y ait des gens capables de dépenser de l’argent pour sauver des oeuvres dont des centaines de milliers de gens ignorent totalement l’existence.
      Dans un tel cas vaut-il mieux privilégier l’impossibilité des malgaches à sauver une partie de leur culture, ou faut-il préférer la « prédation économique » que vous affirmez sans preuves ?

  • 14 juillet 2010 à 12:09 | kotondrasoa (#3872)

    Mr Ando R.

    Pourquoi suffoquer et se scandaliser de voir que d’autres s’occupent de notre patrimoine culturel puisque nous ne le faisons pas ?

    Qui de nos enseignants-chercheurs ont pensé à sortir un opus de promotion des oeuvres de JJ Rabearivelo ?

    Et puisque valalan’amboa ka ny tompony tsy tia ou plutôt tsy misy mpaminany masina an-taniny, pourquoi être surpris de cette sauvegarde et valorisation des manuscrits malagasy ?

    Ce serait plutôt à ses descendants de s’offusquer pour une question d’intérêts sauf si ce n’est que du domaine public après 73 ans.

    • 14 juillet 2010 à 13:01 | Ny ando (#1495) répond à kotondrasoa

      M. Kotondrasoa,

      Nous sommes d’accord : les chercheurs malgaches font désormais partie du prolétariat de Madagascar.

      J’ajoute : la fin justifie les moyens.

      Merci à vous.

      Bien cordialement,

      Ny Ando

    • 14 juillet 2010 à 19:40 | Ny ando (#1495) répond à Ny ando

      Cher Stomato,

      Je résume pour vous :

      Majoritairement malgaches, les noms des participants ont été occultés.

      Franco-francophone, l’opus a été édité par l’AUF, l’ITEM et l’EAC (voir post principal) et mis en vente sur un stand de l’UNESCO, lieu de culture.

      La prédation économique s’est effectuée via la famille Rabearivelo Rakotomanga (que je n’incrimine en rien, c’était son héritage).

      Applaudissons la France qui sauve petit à petit le patrimoine malgache, devant notre irresponsabilité toute malgache :-)

      Mais plus sérieusement, saluons la parution du journal intime et de l’intégrale qui, en dernier ressort, corrigera certainement les vices de forme dans cet événement culturel mondial.

      « La fin justifie les moyens ».

      Bien cordialement à vous

      Ny Ando R.

  • 14 juillet 2010 à 20:07 | andry (#884)

    Je ne suffoque pas mais je m’interroge et les commentaires bordant le mépris de Stomato m’horripilent. Le post a le mérite de souligner une méthode de faire qui prévaut dans le milieu universitaire depuis bien avant l’indépendance, quoiqu’on dise. Il est vain de croire qu’une publication d’oeuvres soit neutre et innocente, et d’applaudir avec zèle toute réexpression de contenu au motif qu’elle « sauverait » un patrimoine - oui, même une simple publication d’écrits. Les introductions, postfaces et commentaires de bas de page préparent à une réception voulue au même titre que la présentation souvent triomphante de l’équipe de collecteurs dévoués. Je ne crois pas plus à un quelconque « patrimoine mondial » littéraire qu’à - Dieu ou les ancêtres m’en gardent - l’innocuité de l’approche « francophone ». Je ne suis pas convaincu que les manuscrits de Rabe eussent été perdus pour la postérité s’ils étaient restés au sein de sa famille en attendant meilleure utilisation - et pas davantage persuadé que l’appareil malgache est aussi déglingué que l’on se complaît à le dire. En passant, les raccourcis de Stomato (Rabe aurait brûlé comme le Rova si on ne l’avait pas sauvé, etc etc) démontrent une incapacité incommensurable (puisqu’il a l’air d’aimer l’expression) des commentateurs français (je présume) à s’émanciper des discours de l’époque du bon Sylvestre de Sacy. Depuis, on a su que l’expédition de Bonaparte en Egypte en 1798 n’avait pas pour but de sauver les pyramides...

    • 15 juillet 2010 à 09:52 | Stomato (#3476) répond à andry

      Libre a vous de considérer mes propos comme méprisants, Si vous ne voulez pas les interpreter autrement c’est votre droit le plus strict.
      Je sais qu’il est plus facile de faire passer un chameau par le chas d’une aiguille, que de convaincre un malgache qu’il fait fausse route...

      "Il est vain de croire qu’une publication d’oeuvres soit neutre
      et innocente,« Evidemment, pourquoi faire une publication sans objectif(s) ??? »Je ne crois pas plus à un quelconque « patrimoine mondial »« Vous ne croyez donc qu’à un patrimoine malagasy ? »Je ne suis pas convaincu que les manuscrits de Rabe eussent été perdus pour la postérité s’ils étaient restés au sein de sa famille en attendant meilleure utilisation"

      Que vous manque-t-il pour en être persuadé ?
      Moi non plus je ne suis pas persuadé que ces manuscrits auraient été perdus si la famille ne les avaient pas vendus.
      Mais c’est un argumentaire léger pour vouer aux gémonies ceux qui ont fait quelque chose qui choque ceux qui n’ont rien fait !

      « Je ne suis pas convaincu .../... et pas davantage persuadé que l’appareil malgache est aussi déglingué que l’on se complaît à le dire. »

      Oui, l’appareil malgache est d’une productivité et d’une efficacité remarquable.

  • 15 juillet 2010 à 08:14 | hafatra (#1895)

    Dia mbola mitohy ihany ny « fanaovan-tsoa » ataon’ny frantsay.Izay tokoa no antsoiny hoe lafitsaran’ny fanjanahantany. Ny frantsay no nitondra ny sivilizasiona aty amintsika...araka ny fijeriny.I Gallieni dia tonga nampandry tany satria adim-poko tsy misy farany no nitranga teto amin’ny nosintsika....

    Tsy mahagaga raha ny frantsay koa no misalotra sy lamban’ny sangan’asan’ny mpanoratra malagasy.

    Ny tena zava-dehibe amiko sy mahamay ahy dia fitahirizako sy ny fikoloiko (hoy ahy sy ny taranako) , ny harenan’ny kolontsaina malagasy.Tsy mitady rehareha sy laza iraisam-pirenena aho , tsy mitady medaly sy mari-boninahitra na loka .

    Afaka manao resaka sy fampirantiana sy izay tianareo rehetra ianareo frantsay sy ireo malagasy mpanompo azy .

    Tsy misy na iray aza eto an-tany olona na firenena afaka hanala ny fitiavako ny mpanan-kanto malagasy ato amiko, na oviana na oviana !!!

  • 16 juillet 2010 à 08:47 | Ny ando (#1495)

    Tena marina ny anao, ry namana.

    Ary maro ny mieritreritra toa anao, soa hiany.

    Nefa kosa misy ny farafaharatsiny @ ny iza no nanao inona rehefa misy ny zava-dehibe sady sarotra atao.

    T@ 1987, nanao « colloque » goavana ny mpikaroka malagasy sy ny avy any ivelany teto Tana, ary t@ izany no nivoaka ny taratasin-dRabearivelo vitsivitsy tsy fantantsika. Hafaliana moa izany.Nisy ny boky (Rabearivelo cet inconnu) nivoaka t@ izany, ary tao daholo ny anaran’ny mpandray anjara. T@ io nazava daholo ny fombafomba nampisehoan’ny Malagasy ny fitiavany an’io lovan’io ary voalaza mialoha daholo izay tokony ho nandray anjara, na vazaha na gasy.

    Ny fitiavan-tanindrazana tsy azo hitsakitsahana : izany no mahatonga ahy miteny hoe ny Malagasy anie tsy mpitazana fotsiny raha manana ny enti-manao (ara-tsaina fa tsy ara-bola hiany) ary tokony ho mazava io.

    Misaotra anao.

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