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lundi 25 août 2025
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Tribune libre

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Du passage entre rivière et océan : Ny riaka no valampariako

lundi 25 août |  263 visites  | 1 commentaire 

Méditation sur les eaux mêlées de Madagascar

Écoutez : l’île rouge respire au rythme de deux marées contraires. L’une pousse vers la haute mer de la rivalité, l’autre ramène vers l’estuaire de la fraternité. Entre ces deux courants, Madagascar cherche son passage.

La danse des eaux turbulentes

Voici : la compétition, telle la mousson, soulève les énergies endormies. Elle fait courir les gazelles de l’esprit, aiguise les crocs de l’inventivité, pousse les navigateurs vers des archipels inconnus. Festinger, ce géographe des âmes, l’avait cartographié : nous sommes des boussoles vivantes, orientées sans cesse vers l’autre pour mesurer notre propre nord.

Mais attention ! Quand le vent de la rivalité devient cyclone, il arrache les palétuviers de la confiance, disperse les bancs de poissons de la connivence, transforme l’océan social en désert liquide. Pfeffer et Sutton, observateurs des ruches humaines, l’ont vu : là où tout devient lutte, l’intelligence collective s’évapore comme l’eau sous l’harmattan.

L’humus patient de l’entraide

À l’opposé coule la rivière souterraine de la coopération. Kropotkine, botaniste de l’âme collective, l’avait devinée : sous l’écorce rude de la nature pousse la sève de l’entraide. Les mycorhizes , ces champignons invisibles qui nourrissent les forêts , nous enseignent que survivre, c’est tisser.

Robert Axelrod découvrit la grammaire de cette langue secrète : non pas trahir d’emblée, mais offrir d’abord sa confiance, puis épouser le rythme de l’autre, comme font les danseurs. Les frères Johnson observèrent les ruches-écoles : là où les enfants mêlent leurs savoirs, ils récoltent plus de miel intellectuel que dans la solitude compétitive.

Et Elinor Ostrom, cartographe des communs, révéla l’art millénaire des communautés : ni l’appropriation sauvage ni l’étatisation rigide, mais cette sagesse du partage qui fait durer les ressources comme une mère fait durer le pain.

L’art de la fertilisation

Faut-il donc choisir son camp, rive gauche contre rive droite ? Erreur ! Les plus beaux deltas naissent du mélange des eaux. Voyez ces entreprises-archipels qui collaborent sur les récifs techniques tout en se disputant les bancs de clients. Contemplez ces démocraties-estuaires où les candidats rivalisent dans le respect de l’embouchure commune.

La coopétition n’est pas un néologisme de consultant : c’est l’art ancien du paysan qui aide son voisin aux moissons tout en espérant la plus belle récolte.

Géographie politique des courants

La gauche historique rêve de transformer l’océan social en lac paisible : services publics comme digues protectrices, syndicats comme phares dans la tempête, solidarité comme système d’irrigation collective. Elle veut dompter les marées inégalitaires.

La droite historique préfère les eaux vives de l’émulation : que chacun hisse sa voile et que le meilleur gagne ! Elle mise sur les vents contraires pour faire avancer la flotte humaine.

Mais aucun navigateur sage ne méprise totalement le vent ni le courant. L’art politique, c’est la science du pilotage : quand serrer les voiles de la solidarité, quand lâcher celles de la compétition ?

L’île aux deux visages

Madagascar vit ce paradoxe dans sa chair. Ses dirigeants se disputent le gouvernail dans des tempêtes sans fin, pendant que le navire dérive. L’économie ressemble à ces ports où quelques capitaines s’enrichissent tandis que la plupart des marins regardent passer les cargaisons.

Pourtant, voyez ! Dans les villages, la fihavanana tisse encore ses filets invisibles. Les associations religieuses et civiles remaillent sans cesse le tissu social déchiré. Face à l’adversité, l’inventivité populaire bourgeonne comme les baobabs après la sécheresse.

Cette richesse souterraine attend sa transmutation : comment transformer ces rivières dispersées d’entraide en fleuve politique ? Comment canaliser les torrents de la compétition dans le lit d’institutions durables ?

Vers les eaux mêlées

Ni la guerre de tous contre tous, ni la paix des cimetières : Madagascar doit inventer son propre art du passage. Non pas choisir entre fleuve et océan, mais épouser le rythme des marées qui les mêlent.

Voici le chantier du siècle : bâtir des écluses qui laissent passer l’émulation sans noyer la solidarité, creuser des canaux qui irriguent l’innovation sans assécher la fraternité. L’île rouge n’a pas seulement besoin de ports et de routes, mais de cette hydrographie nouvelle qui marie les eaux douces de la coopération aux eaux salées de la compétition.

Dans cet art maritime se joue l’avenir : faire de Madagascar non pas un archipel de solitudes rivales, mais un estuaire fécond où se rencontrent tous les courants du monde.

Car c’est toujours aux confluents que naissent les plus belles cités.

Jenny Apollinaire.

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1 commentaire

Vos commentaires

  • 25 août à 10:03 | Vohitra (#7654)

    Miala tsiny, miala fondro amim-panajana indrindra, fa somary mitondra fanafintohinana ihany ity lahatsoratra tena sadasada manantsoratra naroso ity.

    Ny Nosindrazanay Malagasy no resahana nefa toa tena fiheverana mivoy firehana avy any ankoatry ny riaka no tiana voizina sy nanaovana tolo-kevitra minia mandronjina sy mampikoro foto-panahy mampiaina ny fihetsehampo natao hikolo ny Tanin’ny Razana !

    Angamba diso fiantefa ve ny noheverina ho mpandray ny lahatsoratra sa ahoana, maninona no tsy nalefa ho an’ny Firenena manome vahana ny fifangaroana ara-panajariana ny tany sy ny fanakapohana faobe ny kolontsaina sy ny tsy manaja ny fampijoroana ny tandrohasina iombonana anaty fiarahamonina ity lahatsoratra toa miaro fitaka sy mandrobo ho any amin’ny fanosena ny fanahindrazana ity ?

    Teny toa mibasasaka manao be ambosaka fanaon’ny kapotsaka tsy valahara, mihevitra ny hanozongozona ny fiheverana, ny kolontsaina, ny fitaizana, ny hasimpanahy mampiavaka sy mampiaina ny fitiavana ny Tanin’ny mpandala sy mpikolo ny lova navelan’ny Razana ho an’ny taranaka sy ny fiarahamonina Malagasy tsy vaky volo.

    « Madagascar doit inventer... », ahoana moa no hananao fahasahiana hanoratra izany ?

    Fa heverinao fa tokony hanosy sy hanadino ny fombandrazanay sy ny fombantaninay ve izahay ?

    Heverinao fa tokony hioty ny fijery sy fanao amin’ny fiheverana sadasada safiotra ve izahay ?

    Miala tsiny aminao azafady, na ho vy na ho vato, na mora na ho sarotra, na anio na rahampitso, maninona moa raha samy mifanaja sy mifanome voninahitra amin’izay samy kolontsainy sy fombany ny isampirenena, fa tsy minia kosa hanao fanakapohana iraisampirenena amin’izay efa natao ho mampiavaka hanandratra ho harena ny faha samihafana ?

    Sa ianao efa tsy manana harentsaina sy kolontsaina arovana intsony ka minia manozongozona ny hafa izay mbola mijoro na dia hoe efa marefo aza ?

    Azafady kosa e ! Ento any amin’ny izay sahaza izany ny sosokevitra miaro poizina arosonao...

    Répondre

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