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Tribune libre

Opinion

L’unité nationale pour le Rova de Manjakamiadana

mardi 11 septembre 2007

« Le Rova de Manjakamiadana représente pour les Hauts Plateaux, et en particulier pour les »Andriana", la royauté et la puissance des Merina aux temps anciens. Par contre, et je ne crois pas me tromper, il représente pour les autres tribus de Madagascar, le symbole des guerres de conquêtes menées contre eux par les souverains merinas, de leur soumission, de l’abandon de leur souveraineté. En quoi, un paysan Antaisaka se sentirait-il concerné par la reconstruction de Manjakamiadana alors que ses besoins primaires ne sont pas satisfaits, et le pêcheur Vezo pour qui Antananarivo c’est aussi près que la planète Mars, I’éleveur Bara qui n’a pas conscience d’appartenir à une seule et unique Nation, la sienne se limitant à sa famille, à son clan et dont le seul souci est d’augmenter son troupeau de zébus, alors que l’histoire de l’unification du pays n’a jamais fait l’objet d’un effort d’explication pédagogique, claire pour que tous les Malgaches puissent s’approprier l’histoire et en fasse une histoire commune, nationale, alors que l’insurrection de 1947 fut un phénomène qui prouve que les Malgaches sont un même peuple uni pour sortir du joug de l’occupation française.

Dans les grands pays, des guerres de conquêtes, d’unification ou de libération ont été menées avec leurs lots de massacres et d’injustices de toutes sortes. Si nous prenons le cas de la France, révisons Charlemagne, Henri IV, Louis XIV, Napoléon pour n’en citer qu’eux. La Révolution française avec son lot de têtes coupées, de châteaux pillés, vandalisés, la destruction de milliers d’œuvres d’art, la liste des avatars de l’histoire est longue. Mais, leurs histoires ont été assimilées, digérées et appartiennent désormais à tous les Français, qu’ils soient bretons, alsaciens, corses, vendéens, cathares ou autres. C’est leur histoire, une histoire nationale qui est devenue le creuset de la nation française.

Je ne crois pas que les Français, ou les Américains, ou les Chinois ou les Sud-Africains soient plus patriotes, plus nationalistes ou plus idéalistes ou plus intelligents que les Malgaches. Je crois surtout qu’ils sont plus pragmatiques, plus réalistes que nous. Il est donc temps que pour nous, les Malgaches, et je dis bien tous les Malgaches, que nous soyons Betsimisaraka, Sakalava, Antandroy, Merina, Bara, Betsileo, Tsimihety, ou autres, nous nous approprions l’histoire, que nous l’assimilions pour effacer les divisions tribales voulues par les colonisateurs et entretenues par certains politiciens malgaches. Un peuple sans passé est un peuple sans futur. Encore faut-il que ce passé soit accepté et partagé par tous. Si on n’apprend rien de l’histoire, on est voué à répéter les mêmes erreurs. Une campagne de pédagogie s’impose.

La dignité de la politique c’est d’être pédagogique. Les idées, les projets n’ont de force qu’à la condition d’être largement partagés, et qu’un texte écrit comme le M.A.P. fut-il fondateur, fut-il décisif, a besoin de femmes, d’hommes qui le portent, le commentent, le diffusent et contribuent à le faire passer ainsi dans les actes. Il n’y a de pugnacité dans un effort collectif (M.A.P ou reconstruction du Rova) que si tous les Malgaches qui y participent en partagent la définition rationnelle et affective. Quand on voit l’impasse dans laquelle sont certains projets et les faillites des régimes précédents, il y a une interrogation de fond sur le niveau culturel de nos élites, au savoir technocratique, détachées de toute connaissance philosophique et littéraire, de toute vision historique.

La reconstruction du Rova ne doit pas être un objet de fierté ou une question de prestige pour certains descendants des aristocraties merina (c’est une attitude puérile) ou du peuple malgache seul, car nous n’avons pas les moyens. Mais, il y a un préalable à l’appel à la solidarité nationale et à l’aide internationale. Il est impératif, pour ne pas dire vital que les Malgaches s’approprient leur histoire, que tous se sentent concernés par la reconstruction de Manjakamiadana, le Fort des Portugais dans le Sud, I’Hôtel de la Marine à Diégo, etc… Un peuple qui est indifférent à son histoire, à ses patrimoines historiques, à sa culture est un peuple sans avenir, voué à l’assistanat et à la commisération des autres.

Comprendre c’est aimer, aimer c’est donner le meilleur de soi pour sa patrie, oublier les médiocrités pour s’inscrire dans le sens de l’avenir.

Ironie de l’histoire, la reconstruction du Rova de Manjakamiadana montre du doigt toutes les tares de Madagascar : - une bourgeoisie opportuniste, affairiste et corrompue ; un complexe de supériorité de certains Merina qui ont l’air d’oublier que nous sommes Une République ; une défiance des Tananariviens ; des histoires de détournement de fonds et de corruption ; une vengeance intellectuelle déguisée de certains côtiers : une élite qui n’est pas porteuse d’espoir ; la transparence et l’équité n’est pas leur vertu première ; une indifférence polie de la communauté indochinoise (des karana et des chinois sont là depuis plusieurs générations) ; une histoire nationale qui n’est pas comprise et partagée ; un projet commun dont les pouvoirs publics n’ont jamais évalué la dimension intellectuelle et affective.

Il serait temps de spéculer sur l’intelligence et de montrer nos capacités à devenir un grand peuple du 3ème millénaire. Pas un pays des organisations caritatives, des O.N.G. d’assistance, du tourisme sexuel, des sectes religieuses, des affairistes et des escrocs de toutes sortes. Un pays tel que les Malgaches ont décidé de construire pour participer au concert des
nations".

Rakotonirina Mamy Romuald
Lot VB 72 DB Ambatoroka
Antananarivo
mamyrom@hotmail.com

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