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Editorial

Réduire la fracture sociale

mercredi 13 mai 2009 |  1884 visites  | Patrick A.

Nous avons évoqué précédemment les causes de la présence d’une forte présence de jeunes adultes défavorisés, dont beaucoup se sentent laissés pour compte, et les risques qui en découlent.

Certaines des solutions à ce problème ne pourront se concrétiser qu’à long terme. Il en est ainsi du déclin de la fertilité, qu’il faut néanmoins persister à mentionner au vu des hésitations fréquentes de nos hommes politiques confrontés aux positions morales de groupes religieux. Il en est de même des investissements dans l’éducation. La future république ne pourra se satisfaire d’un système si outrageusement à deux vitesses. Ce n’est pas avec des effectifs surchargés que des instituteurs pourront accompagner les élèves en difficulté et détecter des éléments plus doués qu’il faudra inciter à ne pas limiter leurs ambitions.

L’intégration se joue dans les entreprises

D’autres solutions peuvent avoir des effets un peu plus rapides. Dans une analyse récente, le groupe Population Action International (PAI) déjà cité a découvert que la moitié environ des pays à hauts risques ont traversé la période d’après la guerre froide en paix. Comment ? Dans au moins certains de ces cas, des politiques étaient en place qui donnaient aux jeunes hommes des occupations et des opportunités.

Nous avons déjà évoqué que pour l’État, la notion de haute intensité de main-d’oeuvre (HIMO) se limitait trop souvent à des actions ponctuelles, à du travail à la journée institué pour faire face à des périodes de disette. Il est cependant aussi possible de prendre en compte cette approche dans des emplois un peu plus qualifiés et un peu plus pérennes, y compris dans le secteur privé.

Quelle proportion des femmes de ménages, bonnes à tout faire et gardiens de maisons exercent-ils aujourd’hui dans un cadre formel ? Pour les particuliers, et même pour beaucoup d’entreprises, embaucher quelqu’un dans les règles apparaît encore compliqué, coûteux et risqué. Des simplifications administratives, tenant compte de la situation réelle du pays, seraient plus que bienvenues. Et plutôt que de perdre des recettes fiscales à cause du travail au noir, l’État gagnerait à étudier des mécanismes particuliers et simplifiés de déductibilité des charges pour les employeurs acceptant de jouer le jeu de la légalité, tout en gardant à l’esprit que l’objectif est de diminuer la précarité, pas de l’augmenter.

Les gouvernements peuvent aussi répondre à une partie du risque associé au chômage chez les jeunes en investissant dans l’accès au crédit et en encourageant l’esprit d’entreprise. Après la crise de 2002, un Fonds de Garantie Malgache a été créé, mais y accéder ressemble à un parcours de combattant. Plutôt que d’avoir à traiter des dossiers individuels, il serait intéressant d’orienter les incitations vers la garantie partielle de portefeuilles de prêts, du moment que ces portefeuilles de prêt des banques satisfont à certains critères fixés à l’avance.

Population Action International a aussi relevé dans certains pays des politiques incluant des réformes foncières et des propositions d’emménagement dans des régions éloignées, de migration à l’étranger ou d’industrialisation. On connaît les limites de l’État malgache en tant qu’actionnaire ou agent de placement. Mais les efforts du Millenium Challenge Account pour améliorer la sécurité foncière sont certainement essentiels pour inciter à l’investissement. Dans tous les pays ou presque, le capitalisme « populaire » a historiquement toujours commencé par la sécurité du foncier.

Les bras de l’armée

Une autre solution possible est l’expansion des forces militaires et de sécurité intérieure. Selon le PAI, c’est probablement cette dernière stratégie qui a permis à des régimes répressifs comme celui de Corée du Nord, de la Chine ou du Turkménistan de maintenir une stabilité durant la période post-guerre froide et cela malgré une grande proportion de jeunes adultes.

Au risque de faire hurler dans certaines chaumières, on peut avancer qu’il y a là quelque chose à creuser. Certes, et encore davantage à l’issue de la présente crise politique, l’armée est ressentie par une partie de la population comme improductive et budgétivore. Si la gendarmerie et la police ont une utilité sociale reconnue, l’armée a davantage de mal à justifier son existence dans une île éloignée de tout voisin belliqueux.

Toujours est-il que l’armée existe, et que l’on se voit mal lâcher dans la nature ses éléments. Pour lui redonner un peu de lustre, les autorités ont sans doute tout intérêt à réactiver son énergie et sa discipline en mettant en avant le Service civique.

À titre d’exemple, la Côte d’Ivoire, dans le cadre de son propre processus de réconciliation nationale, doit insérer une partie des ex-combattants et éviter à ses jeunes le désoeuvrement, l’inoccupation et le chômage qui pourraient être des facteurs de retour « aux armes » ou à une déviation vers la délinquance. Les accords de Ouagadougou prévoyent ainsi la mise en oeuvre du Service Civique National.

Il se trouve que Madagascar est de temps à autres cité en exemple à ce titre. Créé sur le modèle israélien, le Service civique devait à l’origine s’intégrer à l’organisation militaire et utiliser le contingent à partir de la deuxième année de son incorporation à des tâches à caractère civil.

Il a connu des hauts et des bas. Sous la Première République, l’objectif d’encadrer des jeunes ruraux et d’introduire des méthodes nouvelles a rarement été atteint. La deuxième République n’a guère fait mieux, malgré l’appellation pompeuse d’Armée de Développement. Cependant un récent décret mentionne encore le Service Civique au sein des Forces armées malgaches qui a pour mission de fournir, d’élaborer et de superviser des activités et animations aux fins du développement rural.

Sa présence effective sur le terrain semble cependant se faire désirer. On pourrait l’utiliser pour contribuer à réhabiliter et développer les voies de désenclavement qui sont une des conditions du développement économique dans des régions où l’on constate un fort exode rural. La présence de telles troupes contribuerait également à améliorer la sécurité. Le challenge de l’armée sera cependant de maintenir la discipline en son sein, car les cas de rackets exercés par des militaires en milieu rural ne sont pas rares.

Le nerf de la réforme

Surtout dans un pays comme Madagascar, il devrait être interdit de proposer des réformes sans dire comment les financer. Avouons ne pas trouver de solution immédiate à cette problématique, et il faudra convaincre les bailleurs de fonds par rapport à ces priorités. Mais à terme, les finances publiques ne perdraient pas au développement du monde rural et de l’emploi formel.

D’autres mesures par contre peuvent être quasiment gratuites. Comme permettre aux personnes issues des milieux défavorisés d’avoir une parole publique, de se reconnaître dans des représentants élus. Sans parler de discrimination positive (distinguer sur des bases objectives un Malgache pauvre d’un qui a réussi est plus difficile que distinguer un homme d’une femme), on peut inciter les partis politiques à pratiquer la mixité sociale en instituant des élections non plus uninominales mais par liste nationale, et en introduisant dans les scrutins une dose de proportionnelle pour que les sans-grades aient une chance de grappiller quelques strapontins.

Ainsi pourrons-nous un jour peut-être détecter dans une Assemblée ou dans un Conseil Économique et Social nos futurs Barack Obama.

10 commentaires

Vos commentaires

  • 13 mai 2009 à 07:31 | New Africa (#559)

    Excellente synthèse Patrick pour les voies d’avenir pour notre ile !Je suis en phase avec vous et renforce ce que vous affirmez par ces mots clés.
    « L’éducation », c’est évident doit devenir le sectuer prioritaire n01 car la qualité de nos ressources humaines, le niveau de notre conscience politique et la profondeur de notre maturité sociale pour la solidarité en dépend et en dépendra pour toujours. « L’investissement privé » est à promouvoir car nous ne pourrons pas indéfiniment compter que sur les aides internationales. Des actions novatrices et energiques devraient etre menées à l’endroitb de la Diaspora Malagasy que je sais très puissante si elle se regroupe davantage pour investir dans notre ile.« La profesinalisation », le tout informel, le tout amateurisme et le tout vita Gasy sont revolus. Agissosn vers la professionalisation et la modernisation de tous les secteurs en empruntons des voies alternatives comme dans le secteur informel ou il faut commencer par assurer la dignité de l’empli d’abord et les droits humains des travailleurs.Professionalisons aussi le secteur politique etde la justice en leur rappelant les vraies ethiques de l’action publique et des devoirs des Hommes d’Etat et de justice.Ceux qui servent et non pas ceux qui veulent etre servis et en plus emprisonnent et tuent impunément et injustment.L’armée est complèment à professionaliser car ce qu’on a vu ces derniers deniotent une crise des plus graves.Je suis meme mal à l’aise d’en parler« La réforme agraire », nous devons exploiter plus que les ressources minières les terres arables en faire des greniers durable et écologiquement correctes pour que les Malagasy mangent enfin à leur fin d’abord.Pourquoi ne pas inclure par exemple des ristournes dircetement destinées à exploiter nos terres arrables dans les contrats miniers avec les Consortium ?« le service civique », que tout le monde tout au long de sa vioe et non seulement au cours de 1 ou 2 ans, trouve un temps pour travailler pour la Communauté.Instituons par exemple des grandes vacances « laborieuses » pour les ecoliers, collegiens et universitaires etc.Malagasy ou ils feraient des vacances tout en travaillant pour s’occuper des communes, des villages et des populations visitées.Ré-instituons le service national (je l’ai fait en 1999 et je sais que cela a fait enormement du bien pour les autres et pour moi egalement).Repensons les attributions des militaires vers plus de sécurité et plus de travaux publics et agricoles.« La mixité et la mobilité sociale », oui apres des decenies de colonisation et d’ideologies politiques extraverties vers le neo-colonialisme, le socialisme propagandiste et monopartiste, et l’ideologie politique nepostistes, aventuristes et amateuristes de ces derniers temps il faur faire renaitre notre identité sociale et culturelle et l’aligner avec les valeursuniverselles.Restaurons le vrai Fihavanana Malagasy à travers des actions concrètes et institutionnelles : promouvons les echanges, l’entraide entre les generations, entre les plus pauvres et les plus riches, entre les provinciaux et les gens des hauts plateaux, entre les civils et les militaires, entre les politiques et les religieux, entre les detenus et les hommes libres etc.Quand nous sentirons qu’en chacun de nous nous n’avons plus le sentiment que « Tsy misy ambony sy amabny izany », notre ile sera prete pour son vrai decolage.Que vive la Sagesse Malagsy et la Republique de Madagascar !
    New Africa

  • 13 mai 2009 à 07:35 | dieg (#2041)

    il faut que ces politiques nous ramène
    des usines et des investiseurs

    il n’ont jamais fait le nécéssaire pour jusqu’à maintenant.

    jusqu’à maintenant les banque ne prête pas au petite et moyenne entreprise malgache,

    essayer d’aller voir sur le net,et Mada est le pays le plus dure au monde pour obtenir un crédit.

    il faut mettre en place des associations de quartier pour les suivi projet de construction,ecole,des routes,bazar,salle de sport...ect,pour evité les détournement de fonds,car il ne faut que mr le député construit sa maison avec l’argent que l’europe à donné pour construire une ecole.

    si ces politiciens ne comprenent pas,il suffit qu’il aille voir se qui se passe dans autre pays.

    il que faut l’etat favorisent les entreprise type TIKO,car je pense que ce genre d’entreprise est très utile à Mada.

    • 13 mai 2009 à 07:53 | dieg (#2041) répond à dieg

      aussi pourquoi ne pas developper l’energie renouvelable à Mada,

      car jusqu’à maintenant jirama à beaucoup de problème pour satisfaire le peuple.

      il faut detaxés les panneau solaire et les éolinnes,car actuellement ça coûte 10fois plus chèr à Mada qu’en chine,

      et 3fois plus chèr à Mada qu’en europe

    • 13 mai 2009 à 09:15 | racynt (#1557) répond à dieg

      Dieg , vous avez raison sur ce point , ce n’est pas le climat qui y est favorable qui manque chez nous , c’est plutôt les moyens. En plus cela favorisera notre système écolo.

  • 13 mai 2009 à 07:40 | racynt (#1557)

    Bonjour Patrick et merci pour cet édito très constructif en effet.

    Je voudrais parlé surtout du déclin de la fertilité. Je sais je vais me faire des ennemis mais malgré tout, je pense que même si l’IVG reste un sujet tabou (à travers notre religion et notre culture) , on devrait réellement se pencher sur ce sujet. Même dans certains pays développés, la légalisation de l’IVG est encore interdit, c’est sûre qu’à Madagascar avec le poids des hommes d’église en politique on est pas près d’avoir un vrai débat là-dessus. Il faut arrêter de se voiler la face, les IVG ça existe chez nous qu’on le légalise ou pas :« Une mère qui a laissé un nourrisson qui vient de naître dans un bac à ordure » , voilà un des faits divers que j’ai entendu et qui m’a choqué à Madagascar.

    Cependant les contraceptions doivent être primordiales mais chez les jeunes de toutes classes sociales confondues, les préjugés sur les méfaits de ces contraceptions sont toujours très présents. On entend souvent des jeunes dire que la contraception ce n’est pas bon, ça fait grossir, à long terme ça peut rendre stérile ... Bon il y a certaine vérité comme la prise de poids par exemple , mais de là à rendre stérile quand-même... Il faudrait donc renseigner un peu plus les jeunes sur les vrais effets secondaires à court ou à long terme de chacun de ces moyens de contraception.

    Juste un petit parenthèse : l’Etat à l’époque où j’étais lycéenne là-bas à dépenser des millions voir des milliards pour faire des campagnes afin de sensibiliser les mères de famille à allaiter plutôt que de leur donner le biberon à ces bouts de choux mais n’est-ce pas de l’argent jeté par la fenêtre étant donné que les 80% des malgaches sont des paysans et que certains de ces paysans n’ont jamais utilisé de biberon de leur vie pour nourrir leurs enfants ? Alors au lieu de dépenser des sous là-dedans ne vaut-il pas mieux les dépenser pour la sensibilisation des jeunes sur la contraception ?

    • 13 mai 2009 à 08:06 | dieg (#2041) répond à racynt

      racynt

      l’IVG est interdit,j’ai entendu dire que c’est durement sanctioné par la lois.

      quand à la contraception,les bureau sont bien implanté et efficace,je pense que la sensibilisation est timide.

  • 13 mai 2009 à 09:54 | vahiny (#2240)

    « D’autres mesures par contre peuvent être quasiment gratuites. Comme permettre aux personnes issues des milieux défavorisés d’avoir une parole publique, de se reconnaître dans des représentants élus. »

    merci Mr Patrick !!!

  • 13 mai 2009 à 11:27 | Jeanmi (#838)

    Vos pistes de réflexion sont intéressantes,mais serons sans doute malheureusement insuffisantes.

    Il me semble en effet que le problème réside principalement dans la démographie malgache.

    Tant que le taux de fécondité restera à un niveau aussi élevé, les progrès très importants réalisés ces trente dernières années en matière de mortalité infantile et d’espérance de vie accroîtront irrémédiablement le nombre de femmes en âge de procréer.

    Le contrôle des naissances tenté ces dernières années ne produit que de trop rares et trops lents effets.

    Le nombre moyen d’enfants par femme reste élevé, les progrès médicaux, et l’amélioration des conditions sanitaires et d’hygiène réduisent la mortalité et allongent l’espérance de vie.

    Les malgaches sont maintenant sans doute près de vingt millions.

    Si rien ne change dans les comportements sociaux, le doublement se fera en moins de trente ans !

    Quel projet politique d’ensemble anticipe et prend en compte cet élément fondamental ?

    • 13 mai 2009 à 20:34 | lalatiana (#1016) répond à Jeanmi

      pfffff ...

      Tout le monde sait c’est le développement qui fait la démographie maîtrisée .. pas le contraire ... On a le sentiment à vous lire que tant que les gens font des bébés, ils ne pourront pas atteindre un stade de développement satisfaisant !!!

  • 13 mai 2009 à 12:29 | racynt (#1557)

    Quand ils font leur tournée en province, plutôt que de faire des « kabary » plein de promesses sans lendemain et de donner des dons qui sont toujours les bienvenues bien qu’ils ne coïncident pas forcément au réel besoin de la population locale , pourquoi ces hommes politiques n’organisent-ils pas des « débats participatifs » entre les simples citoyens issus de toutes couches sociales confondues avec les représentants des partis politiques ? Ainsi avant d’élaborer des projets, ils pourront d’abord se mettre à l’écoute de la population et prendre connaissance de leurs attentes.

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