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jeudi 28 mars 2024
Antananarivo | 23h06
 

Communiqué

SeFaFi

Pour sortir de la crise, réconcilier légalité et légitimité

vendredi 27 avril 2018

Les affrontements sanglants du samedi 21 avril dernier, autour de la place du 13 mai à Antananarivo, sont révélateurs d’une crise profonde qui pourrait une fois encore mettre en péril la paix sociale et le développement du pays. Malgré l’inquiétude, il est aussi peu crédible d’évoquer une tentative de coup d’État que d’invoquer une improbable transition cléricale ou un détestable directoire militaire. La seule solution acceptable et durable à l’impasse actuelle ne peut qu’être démocratique, et il revient donc à chacun, individu, association ou institution, d’y apporter sa contribution.

Membre de la société civile, le SeFaFi (Observatoire de la vie publique) voudrait insister sur le fait que, quelle que soit la solution proposée pour résoudre les conflits actuels, tout schéma de sortie de crise doit impérativement se conformer aux institutions et respecter le suffrage populaire. Car si l’abus de pouvoir ou les actes de corruption ont fait perdre leur légitimité démocratique à la classe dirigeante, celle-ci n’en reste pas moins dépositaire de la légalité républicaine. Parallèlement, la contestation menée par des députés soudainement mués en opposants pétris de principes n’a pas la légalité requise pour prendre le pouvoir, même si elle récupère une part de légitimité populaire. Seules des élections libres, transparentes et crédibles pourront réconcilier légitimité et légalité.

Réexaminer les lois électorales

L’adoption contestable et contestée des lois électorales a été l’élément déclencheur de cette prémisse de crise actuelle. Le verdict à venir de la Haute cour constitutionnelle n’apaisera pas les tensions : la HCC ne peut que juger de la constitutionnalité des textes et n’est pas habilitée à proposer d’autres solutions ; mais elle pourrait aussi sanctionner les procédures apparemment déficientes qui ont amené au vote. Par contre, selon l’article 59 de la Constitution, « dans les trois semaines qui suivent la transmission par l’Assemblée nationale de la loi définitivement adoptée (...) le Président de la République peut demander au Parlement une nouvelle délibération de la loi. Cette nouvelle délibération ne peut être refusée ». Qu’il le fasse sans arrière-pensées, et la tension commencera à baisser dans le pays.

Débattre les amendements à la loi

Une nouvelle délibération des lois électorales permettra aux députés et aux sénateurs de l’opposition de soumettre à l’Assemblée nationale et au Sénat les amendements qu’ils souhaitent y apporter. Et pour que les débats et les votes ne souffrent d’aucune contestation, il faudra à nouveau se conformer à la Constitution : « Les séances de l’Assemblée nationale sont publiques » (art. 77) et « Les dispositions des articles 71 à 79 sont applicables, par analogie, au Sénat » (art. 85). En vertu de leur mandat de service public, la Radio et la Télévision nationales devront donc retransmettre la totalité de ces débats, ce qui permettra aux citoyens et aux électeurs de tout le pays d’en juger en toute objectivité.

Rendre crédibles et acceptés de tous les opérations et les résultats électoraux

Le débat biaisé sur les textes électoraux et l’agitation des derniers jours cachent un problème susceptible d’amorcer une nouvelle crise. Il s’agit des préparatifs électoraux liés à la vraie indépendance de la CENI et aux moyens pour mener à bien les opérations, en particulier l’éducation électorale. Il semble difficile, aujourd’hui, de croire que la CENI soit véritablement prête, et des doutes se forment déjà sur la légitimité de la liste électorale, sur le nombre exact de bureaux de vote, et sur l’acheminement des résultats. Que les partenaires techniques et financiers véritablement soucieux de la stabilité politique nous prêtent main forte en termes de moyens électoraux.

Quoiqu’il en soit, les hommes qui ont plongé Madagascar dans la misère et dans l’anarchie n’ont plus à revendiquer aujourd’hui un rôle dans le redressement du pays. À plus forte raison ceux qui, autrefois, ont provoqué la mort de citoyens innocents et qui, aujourd’hui, présentent leurs condoléances attristées aux victimes de ces derniers jours. Cette hypocrisie, qui s’apparente au traditionnel manararao-paty (profiter des morts), cache mal une volonté affichée de s’emparer du pouvoir par des voies non démocratiques et anticonstitutionnelles. Les citoyens ne doivent pas se laisser duper par les manipulations larmoyantes des uns et des autres.

Le pays ne se libérera pas de ses crises successives tant que n’aura pas été instauré un pouvoir légalisé par des élections incontestées et légitimé par l’adhésion des citoyens. Toute autre issue, qu’il s’agisse d’un pouvoir auto-proclamé, d’une transition cautionnée par la religion, ou du maintien en place d’un pouvoir corrompu, sourd et autoritaire, conduira inéluctablement à une nouvelle impasse. Les dirigeants actuels -exécutif, législatif et judiciaire confondus- peuvent encore faire redescendre la pression en améliorant les lois électorales et en organisant des élections honnêtes. Faute de quoi, ils porteront la lourde responsabilité des violences à venir.

Antananarivo, 25 avril 2018


SeFaFi
SEHATRA FANARAHA-MASO NY FIAINAM-PIRENENA
Observatoire de la Vie Publique
Lot III M 33 K Andrefan’ambohijanahary, Antananarivo 101
Tél. 032 59 761 62 Email : sefafi@gmail.com Site Web : www.sefafi.mg

3 commentaires

Vos commentaires

  • 27 avril 2018 à 13:07 | LovaBova (#10239)

    « les hommes qui ont plongé Madagascar dans la misère et dans l’anarchie n’ont plus à revendiquer aujourd’hui un rôle dans le redressement du pays » est la phrase clé de l’article. Y’en a marre de cette hypocrisie de la part de l’opposition. On connaît tous l’histoire, il n’y a pas question qu’elle se répète

  • 27 avril 2018 à 15:55 | Sandratra (#10261)

    Seul la réconciliation peut nous sortir de cette crise, un coup d’Etat ou la démission du président n’est pas favorable à notre pays.

  • 27 avril 2018 à 17:51 | Isambilo (#4541)

    Reste à définir la légitimité quand la légalité des élections ne relève que de l’apparence.

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