Voici un truc que beaucoup ici n’admettront jamais tant qu’ils ou elles vivent : Madagascar, pays d’émigrés, terre d’émigration. Pour de nombreux Malgaches, Madagascar leur appartient. Ce qui n’est pas tout à fait faux parce que leurs aïeux seraient les premiers arrivés sur l’île, voilà plusieurs siècles. L’ancien chef d’Etat Didier Ratsiraka, lui, avance une autre hypothèse selon laquelle la race humaine a vu le jour notamment sur la Grande île. Les historiens pour leur part restent unanimes sur le fait que la population malgache d’aujourd’hui est le fruit de vagues d’émigrations successives venant de divers horizons : Afrique, Arabie et Asie. Les plus récents émigrants viennent d’Europe, notamment de France aux XVIIIème, XIXème et XXème siècles. La composition de la population locale illustre combien elle est le résultat de multiples fusions de races, de cultures et d’origines diverses. Elle est également l’incarnation de l’Alliance entre des peuples venus d’Asie, d’Arabie, d’Afrique et d’Europe : pacifique, laborieux, persévérant, agréable et tenace. Les Malgaches ont reçu de leurs ancêtres toutes les qualités requises pour en faire un joyau de l’humanité. Malheureusement, la médaille a aussi son revers.
Flux tendu
L’histoire de l’évolution socio-politique et économique de l’île a fait qu’au plan de l’organisation sociale, les nouveaux arrivants prennent l’ascendant sur les premiers arrivés. C’est pourquoi, la domination économique française reste déterminante aujourd’hui. De même, au plan politique et culturel, le pays a du mal à s’affranchir du modèle français. Conscient de cette situation, l’actuel chef de l’Etat a souhaité renverser la tendance en affichant publiquement son américanophilie et sa germanophilie. En 2007, il a fait réviser la Constitution en introduisant l’anglais parmi les langues officielles du Malgache. Mais visiblement, le résultat n’est pas à la hauteur de ses attentes. Par ailleurs, le pays assiste à un autre phénomène qui est celui de l’émigration asiatique, et principalement chinoise. A flux tendu, l’arrivée des Chinois suscite la curiosité, l’espoir et, naturellement, la peur. De même, la présence sur le sol national d’un nombre de plus en plus croissant d’Africains noirs et blancs provoque des réactions en sourdine chez la population. La majorité pense tout bas qu’il y a péril en la demeure. Elle a pourtant tort de craindre pour son avenir puisque l’avenir appartient à l’émigré.
