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jeudi 25 avril 2024
Antananarivo | 22h03
 

Politique

Herizo Razafimahaleo

« Le vote de Tanà est plus qu’un avertissement »

lundi 17 décembre 2007
Les partis politiques de l’opposition ont refusé de prendre part aux communales, sans une révision préalable du code électorale.

Les partis politiques de l’opposition ont refusé de prendre part aux communales. Cela n’empêche que des chefs de cette opposition ont apprécié le processus et surtout les résultats. Herizo Razafimahaleo s’est plié à notre interview.

Quelles sont vos impressions sur les dernières communales ?

Au niveau national, ce que l’Opposition a prédit s’est globalement confirmé, à savoir les manipulations des listes électorales en amont, les pressions, intimidations, l’utilisation à outrance des moyens de l’Etat, le non-respect des droits des candidats adversaires du TIM, bref tous ces éléments qui militent en faveur d’une révision du code électoral que nous avons, avec d’autres forces vives nationales et extérieures, réclamée et posé comme préalable à notre participation à ces dernières communales…

Mais des non-TIM ont pourtant gagné dans certaines communes…

Le constat que je viens de faire concerne le pays dans son ensemble Sur un pays de plus de 1.500 communes, les lois statistiques les plus élémentaires admettent bien sûr qu’il pourrait toujours y avoir 2%, 5%, voire peut-être 10% d’exceptions qui confirment la règle comme on dit. Mais globalement, à l’échelle du pays tout entier, les inepties et autres fraudes électorales commises par le régime actuel, et à des niveaux jamais atteints dans l’histoire de Madagascar, confirment le bien-fondé de notre décision de ne prendre part à ces élections qu’à la condition d’une révision concertée et préalable des règles de jeu électorales.

Pour prendre un exemple d’aberration, comment expliquez-vous que le TIM ait, soit-disant, gagné dans tous les cinq autres anciens chefs-lieux de faritany - Antsiranana, Toamasina, Mahajanga, Fianarantsoa, Tuléar - alors que, par rapport au monde rural, les électeurs y sont censés être plus au fait des réalités et moins sensibles aux pressions et intimidations, tout en étant bien conscients que, par rapport à Antananarivo, leurs villes ont souffert sous ce régime d’une certaine exclusion ou d’un certain « oubli » de la part du pouvoir central, tant au niveau des subventions et autres financements d’infrastructures que dans les nominations aux postes ministériels et aux hauts emplois de l’Etat ? Croyez-vous vraiment que la victoire du TIM dans l’ensemble de ces cinq chefs-lieux profondément meurtris par ce régime est conforme à la réalité ?

Pourquoi des chefs-lieux qui en ont bavé sous ce régime voteraient-ils TIM, alors qu à l’inverse, la ville d’origine du Président, son fief, son bastion qu’il a d’ailleurs délibérément chouchouté et favorisé en termes de financements et autres avantages au détriment des cinq autres chefs-lieux, pourquoi cet « enfant chéri parmi les plus chéris » a-t-il au contraire fait mordre la poussière au TIM et plébiscité un Andry TGV que toutes les sommités du régime, le Président en tête, se sont acharnées à présenter aux tananariviens comme étant soutenu par l’opposition, donc un ennemi affiché du régime Ravalomanana ? Paradoxe étonnant n’est-ce pas ?

Pourquoi effectivement ce paradoxe d’après vous ?

Eh bien, je pense qu’en réalité, le paradoxe n’en est pas un ! La vérité est que les malgaches dans leur écrasante majorité, quelle que soit leur ethnie, leur région de résidence, leur statut social, en ont marre de la manière d’être et de faire de ce régime. Ses échecs sont trop nombreux, trop flagrants et leurs conséquences néfastes sont ressenties au quotidien par la population.

On pourra toujours dire, et c’est là un des arguments-clés du régime et de certains bailleurs de fonds, qu’on ne peut pas tout faire en un jour, qu’il faut donc faire preuve de patience, que nous revenons de très loin du fait des régimes précédents, et tatati et tatata….

Or, depuis le début, ce régime n’a cessé d’infantiliser sa population en entretenant l’idée que Zorro le Manager est arrivé, que les malgaches et le monde entier vont maintenant voir ce qu’ils vont voir, qu’il s’est mis les chancelleries et autres bailleurs de fonds dans la poche (là, il n’a pas eu tout à fait tort !), qu’il connaît bien les grands opérateurs multinationaux lesquels vont désormais se précipiter pour l’aider en investissant massivement à Madagascar, que s’il survient des échecs ou des contre-performances, ce sera à cause du régime précédent et des opposants actuels, qu’il bénéficiera toujours de la confiance et du soutien de toutes les églises du FFKM, que la démocratie et les élections à Madagascar feront pâlir d’envie nos voisins africains, qu’il procèdera à la révision du code électoral perverti par le régime Ratsiraka et qui fut à l’origine des évènements de 2002, qu’il procèdera à une amnistie, donc à une réconciliation nationale, qu’à défaut de « professionnalisme politique » la justice, l’équité et la sainteté (fahamarinana sy fahamasinana) règneront désormais dans le pays, et que le développement va se faire de manière rapide et durable…

Et alors ?

Voilà ce qu’on a dit et promis à la population à l’arrivée de Marc Ravalomanana au pouvoir. Que constate-t-on presque 6 ans plus tard ? Détérioration flagrante des conditions générales de vie de la population, insécurité urbaine et rurale aggravée, délestages jamais connus sous les régimes précédents, utilisation de l’argent des pauvres malgaches à des dépenses de prestige destinées à flatter l’ego des dirigeants mais souvent ridicules et inutiles, détournements, corruption surtout dans les hautes sphères (nouveaux riches, visiblement très riches et apparemment pas inquiétés par le Bianco !), mauvaise gouvernance, accaparement abusif et scandaleux, au vu et au su de tout le monde, de richesses nationales au profit personnel des dirigeants et de leurs entreprises, destruction délibérée du tissu industriel national, violations fréquentes des lois voire de la Constitution, dérive autocratique et dictatoriale de plus en plus marquée à travers une tendance à la neutralisation de toute velléité de dissidence, qu’elle vienne de l’intérieur ou de l’extérieur du régime (persécutions, intimidations, terrorisme, voire emprisonnement…), discrimination et népotisme à tout les niveaux, provocations et vexations publiques diverses dénotant un manque total de professionnalisme politique et une méconnaissance des règles les plus élémentaires du management moderne, du moins en termes de leadership et j’en passe…

Pouvez-vous préciser votre pensée ?

Je disais donc qu’en réalité il n’y a pas de paradoxe puisque la majorité de la population est fatiguée de ce régime. La différence est, qu’à quelques exceptions près, plus on s’éloigne de la capitale, moins les gens se sentent libres et protégés. Résultat : les électeurs ont de plus en plus peur et les manipulations, intimidations, menaces et autres fraudes électorales peuvent, selon le degré d’éloignement, plus ou moins gravement altérer la sincérité du scrutin. Toutes ces pratiques ont moins de chances de réussir à Antananarivo, où comme nous venons de le vivre, malgré les velléités réelles de fraudes du régime, la vigilance de la population, pondérée par le tapage des médias, surtout audiovisuels, qui ne couvrent malheureusement que la capitale et ses environs, ont refroidi ces velléités. Plus on s’éloigne d’Antananarivo, moins ce genre de parade existe.

Un mot sur la victoire de Andry TGV ?

Je le félicite chaleureusement pour son courage, sa détermination, et pour la qualité de sa campagne. Il est évident qu’à travers son vote, Antananarivo a clairement affirmé son rejet de Marc Ravalomanana. Et sur ce point, le Président n’a qu’à s’en prendre à lui-même puisque, au lieu de se tenir au-dessus de la mêlée comme l’exige son statut de Président de tous les malgaches, il s’est fourvoyé en première ligne en faveur du candidat Hery Rafalimanana. Il est donc tout à fait logique qu’il assume personnellement le vote sanction des tananariviens.

D’un autre côté, le MAP a été présenté comme l’unique programme ayant jamais existé à Madagascar. Pour le cas d’Antananarivo, sa réalisation a, pendant cette dernière campagne électorale, souvent été citée par les thuriféraires du régime comme étant lié à une victoire de Hery Rafalimanana. Le fait que les tananariviens lui aient préféré Andry TGV est un signal sans équivoque que les habitants de la capitale se moquent éperdument du MAP au point de rejeter l’équipe présentée comme étant la seule à même de réussir sa mise en œuvre. Marc Ravalomanana et ceux qui les soutiennent, ou qui font encore semblant de le soutenir, devraient sérieusement commencer à se poser des questions.

Recueilli par Raw

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