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Editorial

Le baton et la carotte

vendredi 23 juillet 2010 | Patrick A. |  2004 visites  | 15 commentaires 

La sagesse commence par la peur du gendarme, dit-on. Et tant pis si le mot évoque surtout pour certains les films de Louis du Funès et pour d’autres les conférences de presse d’un Richard qui l’est plus par son prénom que par le partage du nom de famille avec quelqu’un d’autre qui l’est vraiment.

Au vu de l’état de l’État (j’espère que les correcteurs me pardonneront cette figure de style typographique), cette peur du gendarme est plus nécessaire que jamais. Et si pour l’automobiliste, il est logique de rouspéter face à l’agent qui le verbalise parce que la ligne jaune qu’il a franchie apparait depuis longtemps délavée par la pluie et le passage d’innombrables roues, l’agent qui confisque les papiers et signe le procès-verbal n’en a pas moins raison, jusqu’à preuve du contraire validée par les tribunaux. Et la survie à long terme de notre société passe immanquablement par le maintien de ce principe.

Les personnes que l’on accuse de naïveté parce qu’elles estiment nécessaire pour résoudre certains problèmes de remettre les textes réglementaires à plat, sont donc en droit de rétorquer à leurs détracteurs qu’eux mêmes se font complices d’un affreux laisser-aller. Sans moyen de pression clair de la part du gendarme, il est impossible d’avoir un semblant d’ordre. Sans lourdes sanctions prévues par les textes, chacun continuera à n’en faire qu’à sa tête. Se vouloir consensuel et inclusif a quand même quelques limites.

À Madagascar, on a longtemps fait mine de croire que la perspective de l’ampamoaka et la peur du ridicule suffiraient à décourager les mauvais comportements, et que l’on pouvait se contenter de textes flous et vagues. Les 40 dernières années auront démontré que lorsque les textes ne déterminent pas clairement à chaque étape les responsabilités de chacun et les lourdes sanctions encourues, les « ordres venus d’en haut » faisaient figure de bouclier sacré.

Le droit donc, rien que le droit, mais la nécessaire rénovation ne pourra venir que progressivement et du sein de Madagascar. Mercredi, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a fait mine de faire comme d’habitude à l’issue de sa réunion sur Madagascar. « Profonde préoccupation face à la persistance de l’impasse dans le processus de mise en oeuvre des Accords de Maputo », réaffirmation de « toutes ses précédentes décisions sur la situation à Madagascar, notamment les décisions prises [...] relatives à l’imposition de sanctions ciblées », j’en passe et des meilleures. Si le sujet n’était pas si grave, l’on serait en droit d’en sourire.

Le Tchadien Idriss Déby Itno accueille son ex-meilleur ennemi, le Soudanais Omar el-Béchir, en déclarant ouvertement avoir l’intention de ne pas exécuter des mandats d’arrêt internationaux pour crime de guerre, crime contre l’humanité et génocide. Il n’est donc plus nécessaire de démontrer longuement que le droit international reste lui aussi et à certains endroits, régi par la loi de la jungle. Ceux qui ont tout parié dessus il y a quelques mois n’auront réussi qu’à gaspiller le temps de la Nation et à écorner passablement leur propre crédit. Certains ont été vertement accusés de tiédeur pour avoir estimé que les sanctions ne marcheraient pas et que la sortie de crise ne pouvait passer que par des négociations sur des bases réalistes : ce n’était pas de la tiédeur, c’était du réalisme.

Le temps est plus que jamais à la négociation donc, et à la négociation sérieuse. En gardant à l’esprit que dans une négociation, il est judicieux d’utiliser à la fois la carotte et le baton, tout en gardant des cartouches en main. La communauté internationale avait perdu des moyens d’influence en décidant de suspendre un grand nombre de financements ; elle ne doit pas les perdre une nouvelle fois en les remettant en place sans discernement. Et l’on espère surtout de l’introduction de la société civile nationale dans ce nouveau round de négociations qu’elle empêchera les politiciens de s’entendre comme larrons [1] en foire.

Notes

[1Larron : au sens original, voleur de grand chemin, brigand, pillard

15 commentaires

Vos commentaires

  • 23 juillet 2010 à 09:29 | da fily (#2745)

    Soit Patrick, mais qu’est-ce qu’il serait souhaitable que nous revenions à de vraies négociations, et non ces éternels marchandages et autres chantages plombés.

    Et puis je trouve qu’il est dégardant de voir ces attitudes où il faille chaque foie qu’on ait peur du gendarme ! Bigre, on est plus des jeunes délinquants ! Il s’agit de l’avenir du pays dont il s’agit, on serait en droit d’attendre un peu plus de responsabilités et de clairvoyance de la part de personnes se targuant de vouloir conduire le pays, où sont nos élites b.....l ?

  • 23 juillet 2010 à 10:07 | mpitily (#1212)

    Merci et bravo Patrick pour votre « réalisme » !

    Malheureusement, nous avons perdu beaucoup de temps pour rien, et pendant ce temps seul le peuple trinque.

  • 23 juillet 2010 à 10:20 | mpitily (#1212)

    Tout le monde connait la sortie de crise = une élection mais pas un gouvernement inclusif et consensuel. Les négociations doivent donc surtout porter sur la rédaction d’une ou de deux propositions de constitution et sur l’organisation de l’élection par une entité neutre et reconnue par tous (donc pas la HAT ni un gvt inclusif et consensuel, ...).

    Laissons le gouvernement HAT et Ravalomanana là où ils sont pour quelques mois encore, c’est de l’eau renversée difficile à rattraper, « tsy azo raofina intsony » comme on dit, nous l’avons bien enduré (gvt HAT) pendant plus d’un an maintenant, donc qq mois en plus ce n’est pas la mer à boire. L’objectif est de raccourcir ce laps de temps.

    Go go gooooooooooo !

  • 23 juillet 2010 à 11:18 | racynt (#1557)

    « Les personnes que l’on accuse de naïveté parce qu’elles estiment nécessaire pour résoudre certains problèmes de remettre les textes réglementaires à plat, sont donc en droit de rétorquer à leurs détracteurs qu’eux mêmes se font complices d’un affreux laisser-aller. »

    Bien dit Patrick , mais par ailleurs, à ce stade de la crise , j’ai bien peur que ceux qui sont déjà bien placés aujourd’hui dans le gouvernement ne voudront jamais cédé leur place à d’autre pour un concensus, ayant déjà pris goût au délice du pouvoir qui leur est confié.

    Je crois que le plus important c’est de garantir l’intégrité des prochaines élections en changeant profondément le CENI pour qu’il soit plus inclusif et consensuel.

  • 23 juillet 2010 à 11:24 | kakilay (#2022)

    Le bâton : nous le subissons chaque jour par les conséquences des inconséquences de certains. Par « nous », j’entends les non-HAT. La HAT bouffe la carotte, chaque jour qui passe.

    Peur du gendarme ? Mais il se batte chaque seconde pour que le regard des autres ne viennent pas s’insinuer dans leurs méfaits. Tout le monde a déjà connu ce regard inquisiteur qui vous regarde alors que vous êtes en train de vous empiffrer. Même Lyli song la non-ingérence : le dernier intellectuel promu diplomate à côté de Hypopopo... Qui va taper sur le « gendarme » ?

    Disqualifier la CI, et le gendarme devient celui qui a les kalachs sans la conscience, ni les scrupules... Et quand il y a « ingérence », cela dérange et empêche de taper sur les « dérangeurs » et de manger les carottes en paix...

    Qui ou Quoi dans ce pays est capable de faire reculer la HAT, la christine, la baomba dans leur croisade contre LA JUSTICE ?

    La FFKM ?

    Malgacho-malgache signifie stricto-sensu la loi de la HAT avec leurs sentiments et ressentiments de bas étages...

    Répétons-le :

    Le bâton, c’est eux qui l’utilisent sur les « autres » pour profiter « des carottes » !

    Les carottes ? Mais qu’est-ce qui fait courir et les uns et les autres au CENI, au rayamandreny miroro... ?

    Sortie de crise ?

    Mais crise pour qui d’ABORD ?

  • 23 juillet 2010 à 11:29 | Stomato (#3476)

    Situation et comportement(s) actuels me font de plus en plus penser à l’histoire de ce malgache cadre de haut rang qui va passer ses vacances en Europe.
    Il va à la campagne dans un gite à la ferme par un cultivateur.
    Au deuxième jour de séjour il commence à ’ennuyer et propose son aide au paysan. Le paysan lui dit que le seul travail qui est a faire consiste à répandre un tas de fumier sur un champ. Le cadre se met au travail, et le paysan ravi se dit qu’il aura au moins besoin de trois ou quatre jours pour terminer la tâche.
    Sur le coup de midi le paysan se rend au champ pour apporter le casse-croute au cadre. Surprise, le tas de fumier a disparu et est uniformément réparti sur la totalité du champ.

    Le lendemain matin, le cadre recommence à s’ennuyer. Le paysan lui propose alors de trier des pommes de terre en trois catégories, petite, moyennes et grosses. Le paysan se frotte les mains en se disant que vu la vitesse d’épandage du fumier, le tri devrait être aussi rapide.

    Las, vers midi le paysan constate qu’il y a cinq ou six petite pommes de terre, 4 moyennes et deux grosses dans les emplacements respectifs.
    Devant l’étonnement du paysan, le cadre de haut rang s’explique : Vous savez, dans mon métier semer la merde est une grande habitude, mais prendre une décision nous est totalement inconnu.

    NB : cette historiette est parfaitement applicable partout, mais est cruellement représentative de ce qui se passe en ce moment.

    • 23 juillet 2010 à 12:23 | racynt (#1557) répond à Stomato

      merci de nous traiter de fauteur de merde , s’il y a bien un qui a foutu la merde dans cette crise c’est la diplomatie française qui a accompagné Rajoelina et chez qui il s’est réfugié après avoir foutu la merde.

    • 23 juillet 2010 à 14:29 | Tsisdinika (#3548) répond à Stomato

      C’est ce genre de commentaire qui feront que tu passera du Stomato au Traumato un de ces quatre.

      Mais t’as bien vu pour une fois. C’est le paysan « europeen » (c-a-d francais pour ne pas le nommer) qui fournit la m.erde, encore et toujours. Ce haut cadre malgache ne s’appelle-t-il pas Rajoelina par hasard ?

    • 23 juillet 2010 à 14:38 | Tsisdinika (#3548) répond à Stomato

      Ah j’oubliais...ce commentaire de Stomato demontre bien combien lui et la plupart de ces compatriotres souffrent d’un vilain blocage au stade anal.

    • 23 juillet 2010 à 14:38 | Tsisdinika (#3548) répond à Stomato

      Ah j’oubliais...ce commentaire de Stomato demontre bien combien lui et la plupart de ses compatriotres souffrent d’un vilain blocage au stade anal.

    • 23 juillet 2010 à 14:53 | Stomato (#3476) répond à Tsisdinika

      @ racynt
      «  »merci de nous traiter de fauteur de merde ,«  »

      Peut-être n’avez vous pas lu, j’ai parlé d’UN cadre... et vous utilisez le pluriel...
      OH pardon ! Vous utilisez le pluriel de majesté pour parler de VOUS même... J’avais pas fait attention.
      Je ne pensais pas que vous étiez un cadre répondant à l’histoire...
      Et pour votre gouverne, il n’y a pas que les français qui soient européens.
      L’histoire ne parle pas d’un français, mais d’un européen...

      « s’il y a bien un qui a foutu la merde dans cette crise c’est la diplomatie française qui a accompagné Rajoelina et chez qui il s’est réfugié après avoir foutu la merde. »

      J’aime quand vous étalez vos certitudes. C’est tellement sécurisant d’affirmer sa virginité et son irresponsabilité.

      @ Tsisdinika : Quand on se sent morveux on se mouche. Si vous vous sentez visé par cette historiette, c’est de votre faute.

  • 23 juillet 2010 à 16:33 | Mihaino (#1437)

    Merci Patrick !
    La peur du gendarme existe bel et bien chez nous car je persiste sans insister que la plupart de nos compatriotes ont peur des vazaha partout ( au travail, dans une réunion, même dans un restaurant ??!! car j’ai vécu une expérience où les vazaha arrivés 1/4 d’heure après moi ont été servis avant moi avec des courbettes des serveuses ) !!! J’ai fait juste une remarque à mes compatriotes serveuses que l’argent n’a pas d’odeur et qu’il faut respecter tous les clients ( blancs,jaunes,noirs ou métis ) car c’est grâce à eux que le business se développe et qu’elles touchent leur modique salaire . Je leur ai même appris que « client déçu, client perdu !! »

    Je profite de l’occasion pour remercier le forumiste qui a ajouté que « Mati-kenamaso isika malagasy fa tsy matahotra vazaha akory ». Je suis d’accord car aujourd’hui nous avons tjrs cette drôle de mentalité de mati-kenamaso envers tous les étrangers ( chinois, américains, canadiens ,japonais, sud ou nords coréens,russes, thailandais,européens,africains, indiens ou pakistanais, arabes....) bref tout ce beau monde qui cherche un vrai partenariat et non un protectorat ...°avec Madagascar . Ils veulent tous investir mais avec des garanties sérieuses du R.O.I ( return on investments ou retour sur investissements ) . Certes, la Politique Françafrique veille au grain car 99% de nos banques sont des filiales des banques françaises et priorité absolue aux projets français ???!!Un investisseur malgache aura bcp de mal à obtenir un crédit même si son projet accompagné d’un dossier a été bien étudié et bien ficellé ??!!Je peux en témoigner avec mes étudiants ...

    Concernant les carottes, j’ai le mauvais pressentiment qu’elles seront cuites bientôt pour la HAT & Consorts s’ils continuent leur chemin d’unitéralisme et leurs abus de pouvoir .... D’où la non - reconnaissance de ce pouvoir par la Communauté Internationale !!

    Par ailleurs, si le Gvt de Camille Vital a un peu de tenue et surtout bcp de retenues, notre Pays sera déjà sorti de cette CRISE SANS NOM . Le Pdt Ravalomanana et le Pdt Ratsiraka restent INSUBMERSIBLES jusqu’à maintenant et selon des sources dignes de foi ils sont encore très estimés par la majorité des Malgaches. Un citoyen lambda a vite compris qu’effectivement on poursuit celui qui est devant et jamais celui qui est derrière ou retardé !!!

    Enfin, je souhaite que la paix revienne et que nos polémiques stériles et notre haine viscérale envers untel ou unetelle prennent fin pour LE BIEN et l’AVENIR DE NOS ENFANTS...!!

    Vive l’ALTERNANCE et Vivement les ELECTIONS !!!
    Wait and see...

    • 24 juillet 2010 à 01:28 | diego (#531) répond à Mihaino

      Mihaino,

      Et qu’on continue d’expliquer comme vous venez de faire Mihaino....

      A demain....si Dieu le veut.

    • 24 juillet 2010 à 10:02 | Mihaino (#1437) répond à Mihaino

      Lire SVP unilatéralisme et non unitéralisme ; Merci !

      Continuons ensemble d’expliquer nos idées et nos convictions cher ami Diego . Tôt ou tard « hody ventiny ny rano natsakaina » (dicton malgache).
      Toute persévérance , patience, un travail bien accompli seront récompensés !!

      Pour obtenir un beau tricot fait main, il faut tricoter MAILLE par MAILLE ! Il suffit d’observer notre grand- mère, notre mère ou notre tante et nos proches qui adorent TRICOTER avec plaisir , enthousiasme et patience...

  • 23 juillet 2010 à 17:26 | meloky (#637)

    Ni baton, ni carrote...........

    Il vient pour apprendre, que notre solution à la malagasy soit triomphante !

    La redoration de la « Made in Madagascar » qui est prête à exporter en Afrique ou même ailleurs : C-à-d, Resolution malgo-malgache necessite aucune ingérence, plutôt souhaite des aides mutuelles !

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