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International

Vérité et réconciliation

Île Maurice : Sur les pas de l’Afrique du sud pour faire face à son passé

lundi 13 septembre 2010 |  1247 visites 

L’Afrique du sud a inventé l’idée d’une Commission nationale de justice, réhabilitation des victimes et réconciliation nationale pour panser les plaies que la politique de l’apartheid, appliquée de 1948 à 1991, avait ouvertes.

Kodjo Epou a expliqué sur le site d’afrik.com, le 21 juillet dernier dans un article sur le Togo, les justifications et les buts d’une Commissions Vérité- Justice et Réconciliation :

« La recherche d’une co-existence pacifique d’anciens ennemis a conduit, dans une trentaine de pays à travers le monde, à mettre sur pied des structures éminemment politiques appelées : Commission Vérité-Justice et Réconciliation (CVJR). La plus connue sur le continent africain, est celle d’Afrique du Sud. Des pays comme le Rwanda, le Ghana, le Maroc, le Nigéria, la Sierra Léone, la Centrafrique l’ont choisie pour paver la voie vers la réconciliation. Le Kenya a crée sa propre commission après les violences électorales de décembre 2007. »

En Afrique du sud, grâce à la bonne volonté de dirigeants comme Nelson Mandela, Willie de F.W. de Klerk et Msgr Desmond Tutu, tous les trois lauréats du Prix Nobel pour la paix, les résultats ont été globalement positifs. Le pays a fait une transition en douceur d’une politique raciste envers la majorité à un gouvernement de la majorité sans velléité de vengeance. Comme le rappellait en 2005 Claude Wauthier sur la version online de monde-diplomatique.fr :

Le principe en était simple : bénéficieraient d’une amnistie tous ceux qui viendraient devant la commission « confesser » en quelque sorte leurs exactions – il s’agissait surtout de membres de la police qui avaient torturé, et parfois tué, des militants des mouvements de libération noirs, principalement le Congrès national africain (ANC) de Nelson Mandela. L’amnistie des requérants était soumise à deux conditions : d’abord de ne rien omettre de leurs crimes et délits dans leur déposition, ensuite d’avoir agi sur ordre de leur hiérarchie tout en croyant servir un « objectif politique » (une prétendue défense de la race blanche, par exemple). Contrairement à ce qu’avait publiquement craint l’ancien président Frederik De Klerk, la révélation des sévices souvent atroces infligés par les bourreaux n’a pas entravé la réconciliation entre les communautés noire et blanche. La Commission a ainsi réussi la catharsis qu’elle s’était fixée comme objectif.

En 2008, l’Ile Maurice a décidé de suivre l’exemple de l’Afrique du sud en 2008 pour réfléchir sur des injustices qui ont des origines encore plus anciennes. Un projet de loi a été adopté pour la création d’une Commission Justice et Véritéa été adoptée par le Parlement en 2008. Elle a commencé ses travaux en avril 2009. Le site grioo.com expliquait, alors, ainsi les plaies qu’il fallait cicatriser :

L’Ile Maurice a connu dans un premier temps l’esclavage, avec plus de 66 000 esclaves venant non seulement d’Afrique mais aussi d’Inde et de Malaisie. Après l’abolition de l’esclavage, en 1835, le système de l’engagisme y a été mis en place, en même temps qu’à l’île de la Réunion ou qu’aux Comores. Travailleurs africains, antillais, indiens et malais étaient exploités et même s’ils avaient retrouvé la liberté première et brisés leurs chaînes. C’est ainsi que l’Ile Maurice s’est construite, développée et enrichie.

Gérard Cateauxrendait compte ainsisur le blog Le mauricien de la création de cette CVJR et de l’intervention du Premier Ministre au Parlement :

Dans son intervention au Parlement, mardi dernier, en présentant le projet de loi sur l’institution de cette Commission Justice et Vérité, le Premier ministre, le Dr Navin Ramgoolam, n’en a pas été plus clair : il ne s’agira pas de règlements de comptes à rebours de l’histoire, mais d’aller à la recherche de la ‘réconciliation, de la justice sociale et de l’unité nationale à travers le processus de rétablissement de la vérité historique… ’

Ces mots ont leur importance : ‘Réconciliation’, ‘Justice sociale’ et ‘Unité nationale’. Nous en ajouterons quelques-uns : ‘Rassembler ce qui est épars… ’ Cette Commission aura la lourde tâche de se réunir pour établir et prévoir - si tant est que la démarche soit possible - de mettre en lumière ce que sera le citoyen mauricien du siècle présent et la qualité dominante préludant à son bonheur.

Cet article avait suscité la réaction suivante de Louis-René Dalai qui souligne les différences entre les cas de l’apartheid de l’esclavagisme et de l’engagisme :

Je trouve l’idée de créer une “Commission Justice et Vérité” à Maurice, une excellente initiative, à condition que le but final soit d’aider à construire une “Vraie Nation Mauricienne”, et non pas de diviser notre population en “descendants d’esclaves”, en descendants “d’Engagés”, et en descendants de “Méchants Colons”…..

D’essayer de copier la “Commission Justice et Vérité”, mise en place en Afrique du Sud, avec un résultat très bénéfique, puisque ceux qui sont venus témoigner, étaient responsables “eux-mêmes”, des “deux côtés”, des crimes commis contre “leurs frères Sud Africains” !!!….Mais dans le cas de l’île Maurice, les responsables de l’Esclavage, ainsi que leurs victimes, ne sont plus là, aujourd’hui, pour apporter leur témoignage !!!…..

Etant, moi-même, descendant d’ancêtres “esclavagistes”….avec le décalage des générations depuis la période 1835/1840…..Je ne me considère nullement responsable des “crimes” commis, éventuellement, par mes ancêtres !!!…tandis qu’en Afrique du Sud, la situation est totalement différente !!!…

Le 25 aout, lexpress.mu online signalait que :

Des 350 dossiers enregistrés à ce jour à la Commission Justice et Vérité, la majorité concerne des revendications de terrains. Sur les six cas entendus ce mercredi 25 août, devant le président Alex Boraine, cinq font état de réclamation de terrains, allant de 100 toises à 78 arpents. Pour Jacques David, l’un des assesseurs de la Commission, chaque cas a son importance et il fait bien ressortir qu’un titre de propriété est seulement le début d’une longue série de recherches.

Abdoulaye Bah
Texte sous licence Créative Commons – Paternité 3.0

4 commentaires

Vos commentaires

  • 13 septembre 2010 à 09:15 | liliana mosca (#4691)

    dans un correspondance avec des amis au mois de juillet j’avais ècris :

    "Et si Madagascar accueille un Commission Vérité - Justice et Réconciliation (CVJR) ?

    A peu prés une trentaine de pays dans le monde ont mis sur pied des structures éminemment politiques appelées : Commission Vérité-Justice et Réconciliation (CVJR) à partir de celle d’Afrique du Sud.

    Les Commissions ont générés au même temps du consensus et des critiques mais si à leurs origines il y a des règles obligatoires et de changement majeur porté par des figures nouvelles dans le paysage politique, économique et social personne doutera de leur
    autorité . C’est à partir de ce moment que la Commission pourra œuvrer et construire un état de droit et des normes démocratiques viables pour Madagascar. Amicalement"

    L’exemple de Maurice pourra aider Madagascar à retrouver la paix ?

  • 13 septembre 2010 à 11:09 | bema (#828)

    A chaque pays sa réconciliation ! à mon humble avis, on ne peut pas parler de « Réconciliation » car le cas de Madagascar n’a rien avoir avec ce qui s’est passé ailleurs. Pour moi, « réconciliation » rime avec « Moralisation » de la vie politique et un grand changement de mentalité. En 50 ans d’indépendance et avec tout notre potentiel tous nos dirigeants successifs n’ont fait que protéger leurs arrières et affaiblir ou neutraliser leurs opposants.La démocratie de façade est le maître mot alors tout ce qui se passe actuellement était prévisible et si nous continuons dans la même voie, la crise est cyclique et on retourne à la case départ. L’exploitation de la sagesse et de la docilité des Malgaches est très flagrante et cette culte de personnalité qui a atteint son paroxysme sous l’ère « Didier Ratsiraka » a détruit beaucoup d’âme malgache.Misaotra Tompoko.

    • 13 septembre 2010 à 14:40 | da fily (#2745) répond à bema

      Bema, vrai en partie ce que vous dîtes, votre avis ma foi, n’est pas que humble, mais j’édulcorerai.

      En effet, certains aspects méritent plus q’une pseudo réconcilitation, nous partageons avec l’île Maurice les mêmes maux découlant de la colonnisation.

      Si nous regardons sans complaisance les divers aspects de notre histoire, il va sans dire que les colons de l’époque, ont mis des moyens importants à la disposition des tenaces rancoeurs et autres guéguerre qui sévissaient en ce temps-là. Il va sans dire, que le royaume merina (en particulier, même s’il n’est le seul), destinait les vaincus à la servilité et l’esclavage, c’était le résultat des campagnes de guerre. Nous savons que sous d’autres latitudes, il en était de même. Les colons, disais-je, se sont servis de cet état de fait pour mieux pénétrer le territoire et y asseoir leur domination. Les populations côtières se sont « vues » comme des alliées potentielles pour les aider à s’implanter. On a su plus tard que la France, pour continuer et affirmer encore plus sa domination a su diviser encore plus les malagasys et pondre une espèce de rassemblement « d’élites » qu’elle savait malléable à souhait que nous nommerons le Padesm, entité regroupant des familles originaires des côtes destiné à casser (la supposée ?) l’hégémonie des populations des Haut-plateaux. Tout celà à des fins de colonnisation, d’assise contrôleé pour perenniser la production à destination de la métropole. Chacuns peut en vérifier aujourd’hui encore, le résultat. Et c’est en cela, qu’il serait important de réellement tout mettre en oeuvre pour que cette commision ne soit pas détourner de sa mission originelle, et qu’elle serve de catalyseur de nouvelles synergies libérées de la gangue passéiste et révolue héritée d’un temps que l’on voudrait jadis. Et les circonvolutions cycliques sur le bien-fondé d’un fédéralisme à vocation balkanique montrent bien que les mentalités à vue courte ont encore cours et qu’elles comptent encore beaucoup d’adeptes ! « ILS » ont su nous diviser pour reigner, et « IL » y en a qui voudraient que cela dure...pleure ô mon beau pays, pleure tes enfants qui sont en train de perdre la boule !

      Les détournements, pillages en règle, ne sont que le résultat de la politique engendrée par ces « révolutions » cycliques, qui ne mettent en exergue, que la domination de chefs de clan sur d’autres, ou de cliques de malandrins utilisant à leur seul profit la bêtise populaire constamment assoiffée de sensationnel bon à jeter aux ordures ! Si nous ne comprenons pas, à l’heure du 3ème millénaire, qu’il nous faille avoir un réel sursaut NATIONAL pour sortir des ténèbres et envisager un avenir commun, nous pourrons encore durablement faire perdurer la phrase assassine du GNL De Gaulle, laissant tomber un : « Madagascar est une terre d’avenir, et elle le restera...! » Rendons-nous donc compte que nous sommes restés encore en 1960, que nous n’avions nullement pensé à la véritable refonte de notre société, et qu’en dehors du sport, où il nous arrive d’être grand, nous n’avons pas la réelle sensation de fierté nationale.

      C’est dire qu’il en connaissait déja un rayon sur la psychologie locale ce De Gaulle, déjà à l’époque...

    • 13 septembre 2010 à 16:24 | Basile RAMAHEFARISOA (#417) répond à da fily

      da fily

      maurice,décolonisée ,est toujours dans le co...welth.

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