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Opinions

Y-a-t-il des journalistes dans la salle ?

jeudi 31 mai 2012

La foule adore toujours écouter les discours de la haine, mais quand c’est tous les jours que Dieu fait, c’est tout de même lassant et les auditeurs les plus fervents de la station zappent. La radio Free FM finit par interpeller sur les véritables fonctions du journalisme, voire sa raison d’être. Quand elle appelle la foule à un rassemblement illégal à risques sur la place du Treize mai, est-ce toujours du journalisme ? Quand les discours radiophoniques visent à semer les graines de la désobéissance civile, est-ce toujours du journalisme ? Quand l’essentiel de la production se réduit à discréditer les autorités, est-ce toujours du journalisme ? Quand la marge est infime entre outrages et outrances, entre grossièreté et vulgarité, entre incorrection et inconvenance, est-ce toujours du journalisme ? Quand on veut à tout prix accrocher les auditeurs pour les mener ensuite à l’abattoir, est-ce toujours du journalisme ? Il y a journalisme et journalisme, mais il faudrait ne pas confondre avec cynisme, attrape-nigaud et pourvoyeur d’espèces sonnantes et trébuchantes à l’abri du fisc. Je n’entends pas l’américain, mais aux Etats-Unis, le sieur Limbaugh, journaliste radiophonique éminent dans la spécialité des vacheries politiques, a signé il y a un ou deux ans, un contrat de 400 millions de dollars avec la société Fox news. Pourquoi ? Limbaugh est un véritable tueur radiophonique et des millions d’Américains l’écoutent. C’est une somme bien au-delà de rêves de nos petits écrivassiers qui courent après les enveloppes des conférences de presse et hantent les antichambres ministérielles. Un écho rend compte qu’il s’est aussi payé une pipe en or massif. Quand on gagne des milliards avec sa gueule, il faut bien la gratifier en termes d’image de marque. Comme dit l’adage, la parole est d’or et le silence ne nourrit pas son homme (ou sa femme). Dont acte. Quand on entend les insanités qui déferlent tous les jours depuis certaines stations, on ne peut croire qu’elles n’aient pas été dûment « subventionnées » pour les besoins d’une ou de la cause.

La liberté d’expression ou d’opinion ne justifient absolument pas les libertés prises contre la correction ou la bienséance des commentaires. C’est une règle professionnelle que respectent dans les limites de leur culture, de leurs compétences et surtout, de leur éducation, les journalistes de la presse écrite. Etant donné que les écrits restent, alors que les paroles s’envolent, ils s’exposent plus à la rigueur des tribunaux que leurs confrères de la radio. Des jours et des mois après la parution, des victimes peuvent en effet porter plainte pour diffamation ou diffusion de fausses nouvelles. Elles peuvent tomber par hasard ou par la grâce d’amis bien intentionnés, sur des informations cochées noir sur blanc qui peuvent salir leur réputation. Pour la radio, c’est un peu plus compliqué, mais on n’entendra jamais RFI sortir de la décence du langage ou des critiques. Les agences ou la grande presse internationale ne se départent pas des exigences de la politesse. La vérification des informations, leur recoupement et l’équilibre des interventions sont des obligations professionnelles. Les journalistes de ces maisons pèsent leurs mots pour éviter la faute suprême, l’agression. Cela fait mauvais genre et la permissivité publique en ce qui concerne les faits d’armes des tabloïds en matière de violations de la vie privée, étonneront toujours. De ce point de vue, la presse a souvent été accusée de prostitution qui se livre au racolage sur la voie publique. Dire tout, n’importe quoi et selon les règles du lavage de cerveau et du docteur Coué, résume les objectifs de toutes les radios des Mille collines du monde. Il s’agit de se forger une clientèle totalement soumise comme un chien à la voix de son maître. Hitler et Goebbels ont saisi l’intérêt de la communication et de l’information biaisée pour des intérêts partisans ou les intérêts de l’Etat nazi. De quel Etat les radios comme Free Fm ou des journaux de la même tendance, pour ne pas dire de la même mouvance, défendent-ils les intérêts ?

Le journalisme aux ordres a toujours existé. On ne peut imaginer qu’un propriétaire, même s’il s’agit d’un magnat de la presse privée comme Murdoch, laisserait l’avenir de ses milliards d’investissements entre les mains de journalistes. Il a l’obligation de moduler l’utilisation de sa propriété pour ne pas qu’elle soit la cause de sa ruine ou de sa faillite. Charité bien ordonnée commence par soi-même avant les intérêts publics et un patron de presse digne de ce nom, veille à équilibrer patriotisme et ses propres intérêts. Tous reconnaissent ou devraient reconnaître que la profession n’a pas vocation à détruire la nation, même avec les plus belles raisons du monde. Les Anglais défendent toujours leur pays, parce que c’est leur pays. Et que cela justifie tout. « Right or wrong, my country is my country ». Qu’il ait tort ou raison, mon pays est mon pays, en traduction libre. Alors, de quel Etat Free FM défend-t-il les intérêts ? Il n’existe pas encore, mais l‘acharnement contre les institutions ou le chef de l’Etat témoigne que des pressions s’accentuent depuis quelque part, pour justifier les frais engagés ou les investissements consentis. La chute de la Transition et le départ d’Andry Rajoelina sont devenus des objectifs majeurs. A bien observer la conjoncture, il faudrait les faires passer aux profits et pertes. L’outrance est une faute contre la crédibilité, c’est même un signe de faiblesse. D’aucuns pensaient au début que la foule chauffée à blanc à longueur de journées, répondrait en masse aux appels. Il n’en fut rien. La énième décision de se rassembler sur la Place du Treize mai, laisse augurer le pire. Les échecs à répétition « forceraient » à inventer une stratégie du désespoir, comme un remake de la tragédie des Tours jumelles de New York frappées par Ben Laden. Incendier de nouveau l’Hôtel de ville est impensable, mais des professionnels de la politique politicienne pourraient bien sortir de leur imagination féconde, un détonateur pour faire sauter la baraque. C’est de cette culture de la haine et du rentre-dedans qu’il faut protéger les citoyens et le rôle fondamental des institutions et de l’Etat. Il ne faut pas se méprendre. Il ne s’agit pas de protéger un régime ou un chef d’Etat, mais de servir de garde-fous contre les dévoyés du pouvoir d’informer. Qu’on le veuille ou non, les journalistes détiennent un pouvoir et il ne faudrait pas qu’il se transforme en pouvoir de nuisance. Contre l’irresponsabilité, un bon code pénal pourra attaquer là où çà fait mal, la caisse et la trésorerie. Les amendes et réparations pourraient être plus efficaces que tous les ordres de journalistes du monde.

RAKOTONDRAVELO T.

12 commentaires

Vos commentaires

  • 31 mai 2012 à 09:34 | Liberty (#3679)

    L’Histoire nous a appris que le métier d’informer et le devoir de sensibiliser l’opinion sur les dangers qui guettent cette liberté d’informer ne sont pas incompatibles. L’exemple de Zola, écrivain, intellectuel et journaliste, qui a utilisé le journal L’Aurore pour interpeller l’opinion et la mobiliser sur le cas d’injustice politique et militaire pesant sur le capitaine Dreyfus, illustre parfaitement ce rôle imminent de l’intellectuel et du journaliste pour mobiliser l’opinion et le peuple en général pour défendre ses droits les plus fondamentaux lorsque ceux-ci se trouvent piétinés par une autorité quelle qu’elle soit.

  • 31 mai 2012 à 09:46 | Liberty (#3679)

    Les dernières phrases de cet article me font tout simplement rire sinon m’énervent au plus haut point : « Contre l’irresponsabilité, un bon code pénal pourra attaquer là où çà fait mal, la caisse et la trésorerie. Les amendes et réparations pourraient être plus efficaces que tous les ordres de journalistes du monde. »

    Et voilà, il y encore chez nous des adultes qui croient encore au Père Noël !!! Y-a-t-il donc un Bon Code pénal chez nous ? Vous rêvez ?

    Je ne comprends pas qu’on puisse écrire de telles attaques aussi gratuites contre une profession qui ne fait que son devoir (du moins pour ceux qui ne sont pas encore achetés par le pouvoir en place). Car la dernière phrase est tout simplement INSULTANTE pour moi à l’égard de tous les journalistes : « Les amendes et réparations pourraient être plus efficaces que TOUS les ordres de journalistes DU MONDE ». Eh ben ???

  • 31 mai 2012 à 10:11 | intrus (#6296)

    Mais y a t-il vraiment une grande différence entre solliciter ou susciter l’opinion et forcer les gens à se faire une opinion ?

    Peut être que oui pour les gens qui ont reçu de l’éducation mais non pour les non instruits. Maintenant, si on regarde le taux de scolarisation (euh CEPE au moins, ne comptons pas les lesabotsy des garabola voulez vous), oui, le journalisme à Madagascar à pour devoir de forcer les gens à se faire une opinion de ce qui leur arrive.

    "Le monde est dangereux à vivre !

    Non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire". Le journaliste a non seulement comme devoir d’informer mais aussi de faire en sorte que ça bouge autour de lui.

    Remarquez que Lalatiana, vous et moi ne l’aimions peut être pas mais à elle seule, elle a réussi à changer le cours de l’histoire malgache. Et entre elle et des journalistes d’éthique du genre Patrick A, ben inutile de vous dire qui s’est le plus nul des deux.

    Je ne l’admire mais mais j’applaudis ce qu’elle fait... Revolution is her name http://www.youtube.com/watch?v=yPVviCA1v8E

  • 31 mai 2012 à 10:42 | niry (#210)

    RFI n’est pas non plus un exemple à prendre en matière de bonne déontologie. Croyez moi, il vaut mieux écouter une radio qui crie sa rage plutôt qu’une radio qui désinforme sciemment et à dessein par ses non-dits, ou la disproportion des info relayées. RFI fait partie de ses radios partisanes intelligentes qui manipule beaucoup + par ses silences que par ses aboiements..

    • 31 mai 2012 à 10:52 | Mahavanona (#5129) répond à niry

      Fa iza anefa no nanmpianatra azy ireo hanao an’izany e ?? tsy ny Président HAT @ izao sy ny VIVA izay notantanany ???
      1)Kianjan’ny démokrasia
      2)Hainaomnajery miteniteny fona sy mitarika ny olona hanongampanjakana.

      Sa rehefa eo @ fitondrana de interdit daholo izany rehetra izany nefa izany ihany fika natao mba nanonganana an’i Ravalomanana.
      Fanjakana tsy mbola aradalana io ka tokony tsy modely mihintsy .
      ALEFASO NY FIFIDIANANA de vita ny resaka.

    • 31 mai 2012 à 10:53 | Bemakely (#2060) répond à niry

      Vous avez tout-à-fait raison. Si Viva dans le temps (2009) et Free FM actuellement ont des influences néfastes sur le comportement des gens du bas-quartier et certains émotifs et naïfs, RFI induit en erreur un nombre important de gens chez les intellectuels moyens et supérieurs. Que voulez vous ? RFI est la voix de la France et si c’est dans l’intérêt de la France de vous tromper, RFI vous trompe.

  • 31 mai 2012 à 10:55 | Tsambararana (#4785)

    Dans tous les cas, tout est dérèglementé à Madagascar. Et il y a beaucoup de logique aussi dans la situation actuelle. Ce qui a la gueule de bulldog l’emporte facilement dans la bataille comme celle là. Si les trois meneurs de grêves d’étudiants de Québec peuvent inciter le monde entier avec le concert de casseroles, jusque là, le pouvoir en place ne peut rien faire.

    C’est la désobéissance civile. Bravo !

  • 31 mai 2012 à 12:07 | kakilay (#2022)

    « La foule adore toujours écouter les discours de la haine, mais quand c’est tous les jours que Dieu fait, c’est tout de même lassant et les auditeurs les plus fervents de la station zappent ».

    Alors !
    de quoi,
    vous plaignez-vous ?

    Vous faites sûrement partie des auditeurs fervents :
    mais cela ne tient qu’à vous.
    Vous avez la liberté de ne pas écouter.

    Maintenant,
    quand vous voulez priver les autres de les entendre :
    ça, c’est une autre question.

    Que vous vouliez qu’ils ne parlent plus :
    c’est une autre question.

    Qu’un journaliste doit avoir une éthique :
    c’est encore un autre problème.

    Car on peut attaquer le problème d’une autre façon : un avocat (Gandhi ou Mandela) peut-il appeler à la désobéissance civile ? Et un médecin ?

    Ou

    Peut-on être citoyen et avocat à la fois ?
    Peut-on être à la fois Patron d’un média, avocat et écrire dans son journal et appeler à la désobéissance civile ?

    Maintenant, mauvais ou bon, reste à l’appréciation de tout un chacun. La question est de savoir maintenant : qui parle ? Le citoyen ? le Patron de presse ? l’avocat ? ou l’écrivain ? Il est vrai que vous arrêtez un des quatres, et vous avez le silence.

  • 31 mai 2012 à 12:08 | Rakotoasitera Fidy (#2760)

    Et Hitler et Goebbels n’ont pas été oubliés !!!

    Rakotondravelo T. dites vous ... rendez vous d’ici cinq ans

    • 31 mai 2012 à 19:36 | niry (#210) répond à Rakotoasitera Fidy

      Il aura juste fallu 20 lignes pour atteindre le point Godwin, cette fois-ci. N’est-ce pas Fidy ? un peu précoce, non ? Notre auteur s’enflamme très vite..

  • 31 mai 2012 à 14:12 | plus qu’hier et moins que demain (#6149)

    Les journalistes militants existent aussi. Quant l’argent rentre par la grande porte, les convictions s’effritent et les mouvements s’implosent. Tout est dit et clairement exposé.

  • 31 mai 2012 à 15:55 | poiuyt (#584)

    on reconnait facilement la satisfaction de l’écrivain par rapport à la situation actuelle ? ? ? est ce normal qu’il y ait tant de mouvements sociaux ? étaient ce les gens de Free qui depuis 2 ans et plus déjà avaient crié contre le joel et pour les conditions de leurs vies ? non ; depuis la situation s’est améliorée ? non au contraire ; alors ?

    quand il y a un péril persistant, tous les moyens sont bons, quite à faire des martyrs

    le peuple demande la liberté ; joel et consorts ont peur d’élections libres ; autant pour lui être le seul candidat, celui du système

    une balle , 2 balles , 3 balles , et basta

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