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Editorial

Travail de coulisses sur l’amnistie

lundi 14 janvier 2013 | Sahondra Rabenarivo

Il faut être vraiment accro [1] pour suivre la mise en oeuvre des différentes dimensions du processus amnistie, auquel s’ajoute normalement le processus de réconciliation. Mais en marge du cinéma autour de la candidature ou non-candidature des deux protagonistes, le calendrier avance et un travail de coulisses a lieu sans transparence et dans une opacité suspecte. Telle la rédaction sournoise de la loi d’amnistie, qui donne d’une main autorité au conseil du Fampihavanana malagasy le droit d’accorder l’amnistie (art 5), et le retire d’une autre main, en créant une commission spéciale au sein de la Cour Suprême [2] « pour juger et prononcer les décisions d’amnistie au vu des listes proposées par les entités habilitées à cet effet » (art 14). Cette manière de rédiger laisse à interprétation sur qui accorde l’amnistie, in fine, car les « entités habilitées à cet effet » incluraient-elles le conseil du Fampihavanana malagasy ?

On avait dit alors que l’amnistie relevait d’une analyse et d’une décision politique, réservée à un groupement neutre comme le conseil du Fampihavanana malagasy, en vue d’apaiser la situation et permettre les élections. En fin de compte, on nous a trompé en accordant à des juges de la Cour Suprême, dont l’indépendance reste à prouver, le devoir de « juger et prononcer » l’amnistie.

Ensuite, selon quelques articles de journaux très imprécis, il semblerait que la première liste des bénéficiaires de l’amnisties « large et de plein droit » sera publiée incessamment. Evidemment, une telle liste est incontournable, car comment savoir si l’on doit déposer son dossier au conseil du Fampihavanana malagasy ? À maintes fois, il a été exigé que la liste indique clairement (surtout en cas d’existence de condamnation) que la « faute » amnistiée soit connue du grand public, sinon comment savoir si elle est vraiment « liée aux événements politiques qui se sont produits entre 2002 et 2009 » ? Le manque de transparence dans le processus d’octroi d’amnistie est flagrant. Le calendrier avance et l’inscription des candidats potentiels, condamnés mais en attente d’amnistie, sur la liste électorale est compromise.

Nous savons tous par ailleurs le délai de mise en place du conseil du Fampihavanana malagasy, résultant justement de ce bras de fer entre qui a le dernier mot : le conseil qui prendrait une décision politique en vue de l’apaisement et la cour spéciale qui se cacherait derrière le droit pour ne pas accorder l’amnistie. Or, selon le titre de la loi 2012-007, l’amnistie est accordée dans le cadre de, et pour, la réconciliation nationale.

Le Président de la Transition a lui-même dit que le peuple étant souverain, c’est au peuple de décider qui dirigera le pays à l’avenir. Il a aussi dit qu’il n’y avait pas lieu qu’un groupe restreint décide de qui peut ou ne peut pas se porter candidat. Justement, ce n’est pas à une clique acquise au pouvoir actuel de décider de l’amnistie, mais d’un groupe neutre, sage et capable de pondérer les dangers et les bienfaits, d’accorder une amnistie dans le contexte de déchirure actuelle. Le juge ultime sera l’électeur. C’est pourquoi le « ni... ni... » était préconisé, [3] comme marque de sagesse et de patriotisme, afin d’éviter l’embrasement du pays dans la confrontation. Comme un observateur l’a dit, les événements à Iavoloha le 9 janvier 2013 donnaient un avant-goût inquiétant de la période électorale.

Mais en attendant la décision des uns et des autres, gare au travail qui se fait silencieusement, sachant que la course contre la montre (et le calendrier électoral qu’ils semblent tenir à coeur pour cette raison) joue en leur faveur. Ce qu’il faut c’est la transparence, la vérité et le respect de l’esprit comme de la lettre de la loi ; faisons les choses correctement, ne laissons pas la manipulation des textes en faveur de ceux au pouvoir, comme par le passé. Tournons la page, faisons autrement, exigeons la transparence totale.

Sahondra Rabenarivo
13 janvier 2013

Notes

[1Je ne lui suis pas vraiment, mais comme souvent à Madagascar, au vu d’un vide, on fait les choses par défaut.

[2Voir ordonnance du 09 octobre 2012, sur sa composition. Une ordonnance n’est pas démocratique, étant « votée » par le seul Président.

[3Comme par exemple par le SeFaFi dont je suis membre mais que je ne représente pas quand je m’exprime sous mon nom.

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