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Antananarivo | 23h04
 

Tribune libre

Pour la défense des paysans et des terres malgaches

Le contrat d’agribusiness de VARUN doit être annulé

lundi 12 octobre 2009

Persévérant sans relâche dans la défense des terres malgaches, le Collectif TANY exprime sa vive préoccupation concernant les projets d’agribusiness du géant indien de l’acier VARUN qui ne cesse d’étendre ses activités à Madagascar. Le contrat agricole signé avec la région Sofia en janvier 2009 est fortement défavorable aux paysans malgaches. Suspendu depuis plusieurs mois par le pouvoir central [1], il doit d’urgence être annulé.

VARUN International, un colosse qui prend pied à Madagascar

Rappelons que lorsque la presse malgache rapporte le projet d’agribusiness de la firme VARUN en mars 2008, la compagnie prévoyait d’investir dans le pétrole, dans l’informatique et dans les chemins de fer [2].

En septembre 2008, VARUN a acquis deux permis d’exploration d’uranium de 320 carrés sur le site de Manjakamboahangy, dans la région d’Amoron’i Mania et sur le site d’Ankilizato, dans le Menabe [3].

En septembre 2009, la société VARUN Energy Corp. est créée, en partenariat avec les autorités malgaches, pour gérer les permis miniers dans l’uranium à Madagascar. L’acquisition du bloc de prospection pétrolière 3101 d’une superficie de plus de 5000 km2 au sud de Mahajanga et des permis de prospection d’uranium sur une superficie de plus de 6000 Km2 est confirmée [4] et [5] et la signature d’une autorisation de prospection de gaz au large de l’île Sainte-Marie sur une zone de 13 200 km2 est annoncée. [6]

La firme indienne multiplie les filiales spécialisées : Madagascar Energy Corp (pétrole), VARUN Petroleum Madagascar, VARUN Energy Corp (uranium), VARUN Agriculture (éthanol)

VARUN se lance dans l’agribusiness

Un article du journal Le Monde du 21 mars 2009 a révélé au grand public les ambitions de VARUN dans l’agribusiness. Les régions concernées incluent Atsinanana et Sofia, ainsi que Analanjorofo ou Menabe. Les cultures prévues sont le riz, les grains secs comme le haricot et le dall, une variété d’agrume d’origine indienne. Dès septembre 2008, VARUN aurait disposé d’une surface de 165 000 ha dans la Sofia et un accord préliminaire de partenariat aurait été signé avec le Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche [7].

En avril 2009 [8], la presse malgache donne quelques détails sur le contrat signé le 26 janvier 2009 entre VARUN, le Chef de région Sofia et 13 associations de paysans des districts de Port-Bergé, Mampikony, Analalava, Befandriana-Avaratra, Bealanana et Mandritsara. Il est rédigé en anglais. Selon un ancien député de Port-Bergé, les terres impliquées dans son district sont des baiboho - très fertiles - et les terres appartiennent à plusieurs centaines de familles paysannes qui ne possédaient pas de titres, donc susceptibles d’être prises définitivement par VARUN si la firme entreprend un titrage.

Un contrat décrypté par des experts

Des experts de Madagascar ont travaillé sur le contrat signé dans la région Sofia, enquêté sur le terrain et présenté leurs conclusions début septembre. Nous vous les rapportons.

Initialement, la surface visée de terres du projet était de 130 00 ha. Au final, la superficie repérée a été de 232 000 ha. VARUN reconnaît que les ¾ des terres convoitées sont occupées. Le projet est composé de contrats de production (« farming contract ») sur 171 000 ha déjà occupés et des baux emphytéotiques sur 61 000 ha de terrains domaniaux.

Les négociations foncières ont été confiées à un bureau d’études malgache SODHAI. Il s’est chargé de créer 13 groupements paysans, d’engager les procédures d’acquisition et d’organiser un « atelier de signature », le tout en 15 jours et en une seule mission sur le terrain. L’investissement pour l’installation et l’aménagement de 13 périmètres irrigués en deux ans devait s’élever à 1,17 milliard de $, avec un retour sur investissement dès la 3ème année.

Les objectifs de production sont de 2,8 millions de tonnes de paddy par an (soit plus de la moitié de la production nationale) à la 4ème année et 400 000 tonnes de maïs. Les techniques envisagées prônent le SRI (système de riziculture intensive) et la mécanisation pour un rendement espéré de 10 à 12 tonnes de paddy par ha/an, de 4 tonnes par ha/an pour le maïs. Les récoltes sont destinées à l’exportation pour 20% du riz, 50% du maïs et 100% du dall.

En contrepartie, VARUN a fait des promesses non quantifiées et vagues sur des villes nouvelles, des centres de santé, des écoles ou des villages électrifiés, un réseau d’eau potable. Ce sont surtout les installations utiles pour le "projet" qui sont détaillées : bureaux, logements du personnel, ateliers, garages etc.

La méthode Varun

L’originalité du « contract farming » sur les terres occupées est que VARUN a mis en place lui-même ses propres interlocuteurs :

L’accord est conclu entre VARUN et les « propriétés de plein droit » (« lawful land holders ») de 13 plaines regroupées en associations par le bureau d’études SODHAI.

Les présidents des associations sont habilités à « donner de la terre à VARUN pour des cultures » sur 171 000 ha. Ils s’expriment en leur nom, celui de leurs membres et de leurs descendants.

La durée du contrat de fermage est de 50 ans, VARUN réalise tous les travaux agricoles et verse des produits aux paysans. Une clause de "confidentialité" impose aux associations de ne communiquer aucune information sur le projet et de ne pas interférer avec les techniciens VARUN. La formalisation de l’accord s’est effectuée au cours d’un « atelier de signature ».

Le schéma de répartition de la production est le suivant : sur un terrain sous contrat de fermage (par exemple de 1 ha, avec un rendement espéré de 10 tonnes de paddy/ha), VARUNrecevait 70% des récoltes (7 t.), le paysan propriétaire devait recevoir 30 % des récoltes (3 t.).

Mais au sein des 30% remis au paysan, 30% sont destinés à son auto-consommation (0.9 t. dans l’exemple cité), et il doit vendre obligatoirement 70% à VARUN (2,1 t.), à un prix fixé par VARUN selon le cours local des zones de production.

En somme, sur les 10 tonnes de paddy/ha, plus de 9 aboutissent chez VARUN, dont 2 tonnes achetées.

Augmentation de revenus ou de la pauvreté ?

Même avec un rendement illusoire de 10 t/ha de paddy, une famille malgache moyenne de 5 personnes, disposant de 1ha ne va plus toucher qu’une rente annuelle correspondant à 3 tonnes de paddy dont 900 kg en nature, soit 585 kg riz. Or une famille paysanne malgache consomme en moyenne 140 kg de riz/personne, soit 700 kg/famille/an.

L’avenir de ces familles paysannes malgaches s’annonce donc sans terres et sans activités. Elles n’auront plus besoin de travailler leurs terres mais quelles activités auront-elles à la place ?

Une autre activité agricole ? Sur quelles terres ? Migration forcée ?

Il y a beaucoup d’effets d’annonce. En fait, le recrutement de 1 500 personnes équivaut à 1 nouvel emploi pour 155 ha. Il n’est plus question de villes nouvelles mais de « low cost housing » (logement social). Et dans les accords avec les associations paysannes, il n’est plus fait état d’infrastructures d’aménagement et de barrages.

La « hausse des revenus des paysans » annoncée par VARUN est contestable. Ce contrat de fermage risque plutôt de provoquer la pauvreté.

Le Collectif pour la Défense des Terres Malgaches TANY a décidé de diffuser les résultats de cette étude car la firme VARUN a manifesté récemment sa volonté de relancer les négociations sur le projet agricole. Varun affiche son optimisme à l’arrivée de son président à Antananarivo pour les prochains jours [9]

Face aux positions renforcées de VARUN dans de nombreux secteurs à Madagascar et aux besoins de financement des autorités malgaches, le Collectif TANY :

- réitère son soutien aux populations de la région Sofia et de toute l’île pour la défense de leurs terres et de leurs terroirs,
- demande aux autorités d’annuler ce projet dont l’absence d’intérêt pour les populations est avérée,
maintient toutes ses revendications précédentes notamment celle pour « l’organisation d’un débat national pour la mise en place de nouvelles lois et mesures concrètes facilitant l’acquisition de terrains pour les familles et paysans malgaches ».

Paris, le 10 octobre 2009

Pour le Collectif pour la Défense des Terres Malgaches
Le Bureau
Ralava Beboarimisa, Samuel Jocelyn, Philippe Randrianarimanana, Mamy Rakotondrainibe

Notes

[1Le contrat déjà signé entre les autorités régionales et les groupements paysans le 26 janvier 2009 aurait été « suspendu » par les autorités nationales actuelles pour vice de procédure :« [..] pour la société Varun, un contrat de mise à disposition à son profit a été signé par le Chef de Région de Sofia pour un terrain d’une superficie supérieure à 130.000 ha. La signature des contrats concernant des terrains de l’Etat d’une superficie supérieure à 50ha relève de la compétence du Ministre en charge des Domaines (…) ledit contrat n’a aucune valeur et est nul et de nul effet », avait écrit le Ministre de l’Aménagement du Territoire dans sa lettre datée du 5 juillet au Collectif TANY datée 5 juillet 2009.(cf. Newsletter 6 du Collectif pour la Défense des Terres Malgaches TANY)

[3L’Express de Madagascar, 16 septembre 2008. http://www.lexpressmada.com/index.php?p=display&id=20663&search=varun

[4La Lettre de l’Océan indien, 5 et 9 septembre 2009

[7L’Express de Madagascar, 17septembre 2008 http://www.lexpressmada.com/index.php?p=display&id=20698&search=varun

[9The Times of India, 26 septembre 2009 http://timesofindia.indiatimes.com/news/business/india-business/The-New-Landlords/articleshow/5060584.cms
Un paragraphe de cet article dit : « Le nouveau gouvernement Rajoelina a non seulement annulé le contrat hautement impopulaire [Daewoo], mais quelques jours après avoir pris le pouvoir, il dût se saisir d’une autre affaire : une société de Mumbai, Varun International, avait négocié pour 170 914 ha dans la région Sofia à Madagascar pour y cultiver du riz, du blé et du maïs. Un porte-parole de Varun dit qu’ils étaient encore optimistes. « Des discussions sont en cours et notre président, Kiran Mehta, doit effectuer un voyage à Madagascar dans les 15 jours »."

14 commentaires

Vos commentaires

  • 12 octobre 2009 à 07:28 | zandrygasy US (#1941)

    1- urban migration is not necessarily bad, urban population are likely to have better chance to educate their kids

    2- anyway, not all farmers will leave, some of them can also work for Varun and possibly get better income, ...

    3- this kinda of project is perfect way to transfer technology to local farmers ... before doing it by their own

    4- given the trend of our agriculture evolution, even after that 50years we (our gov) wont be able to build such infrastructure, which VARUN can not bring back to India, when they will leave

    Brief, assuming that VARUN keeps the close of the contract, which NEEDED to be adjusted, ... this project is not that bad

    • 12 octobre 2009 à 09:00 | georges Rabehevitra (#3099) répond à zandrygasy US

      Dear Sir,
      May it’s not a so bad project. My only question is : India is a huge country with a countless inoccupied countryside.

      So why an indian compagny would like just invest in our country but not in its one ? may be it’s not so easy to evict thousand of small farmers in India ? In opposite, in our country, you just need to pays few moneys to local authorities and it will be done, with the help of the Army if necessary.

      Please, just try to have a look behind all the projects of big firms, trying to grab lands in poor countries. It’s just not only a question of development or economics, it’s about human being as well.

    • 13 octobre 2009 à 01:32 | rabri (#2507) répond à georges Rabehevitra

      1) Mille fois BRAVO au Collectif TANY !! Y a-t-il un site où l’on peut s’inscrire pour être MEMBRE ???

      2) Il faut continuer la lutte et réclamer prochainement UNE ASSISE NATIONALE SUR L’AGRICULTURE qui va logiquement ANNULER et INTERDIRE tous ces contrats "bidon" de cession de terre aux étrangers et qui devrait favoriser la généralisation des exploitations familiales paysannes dans tout Madagascar dont la 1° étape devrait être la facilitation d’acquisition de terres aux paysans malgaches.

      3) Avec tous ces projets VARUN, DAEWOO (dont les conséquences sur l’environnement sont désastreuses – voir mon point 4), on a l’impression que sur le plan AGRICULTURE, il ne se passe rien de BON à Madagascar et que le seul salut pour nous est d’ouvrir la vanne d’exploitation ( = à la fois MITRANDRAKA et MITSETSITRA ) aux sociétés capitalistes étrangères dont le seul objectif est LE PROFIT A TOUT PRIX.

      Pour ceux qui doutent ou qui ont la GRANDE PARESSE de connaître les réalités agricoles malgaches, voici une LECTURE INTERESSANTE http://www.phbm.mg/index.htm : ( = projet de mise en valeur du haut bassin du Mandrare (PHBM), qui couvre 800 000 ha et concerne 120 000 personnes constituées de ménages ruraux ) . Passant d’une difficulté alimentaire avant 1996 (date de début du projet), la zone est désormais dans une situation excédentaire en produits vivriers, ouverte vers les marchés et disposant des organisations rurales dynamiques.

      Face à de tels résultats, pourquoi ne cherchons-nous pas à démultiplier dans toute l’île un tel projet ??? Avons-nous enseveli le message-héritage de nos ancêtres « NY SOA FIANATRA » ou pour CERTAINS, la chansonnette quotidienne n’est plus que « NOS ANCETRES, LES GAUL…. LES ETRANGERS » !!!!!!

      4) j’ai déjà developpé dans un précédent forum les impacts catastrophiques sur le plan ENVIRONNEMENTAL de tous ces projets de grande envergure dont le seul objectif est LE PROFIT A TOUT PRIX. Ces impacts sont liés à la pratique de MONOCULTURE INTENSIVE (ici riz ou maïs ou haricots ) : il y aura déforestation suivie de sècheresse, pompage à mort des points d’eau et des nappes phréatiques pour l’irrigation, utilisation excessive d’engrais chimique et de pesticides avec des conséquences désastreuses sur les nappes phréatiques et sur la santé directe des Hommes

  • 12 octobre 2009 à 09:07 | georges Rabehevitra (#3099)

    Il faut vérifier juridiquement la validité d’un tel accord. Si oui, il faut l’annuler de suite et san utre forme de procès.

    Tout contrat de ce type ne doit être signé par l’Etat malgache qu’après débats, ou moins au niveau de l’Assemblée, sans parler carrément de l’avis du peuple via un référendum.

    J’ai toujours proposé que les autorités de la transition ne doivent pas signer de contrat engageant la Nation, au-delà de la période de cette transition. Pour cela, il faut que ces autorités disent maintenant et tout de suite, quelle sera la durée incompréssible de cette transition. Sinon, la transition d’être sans fin alors que la Nation a besoin d’intitution sereine et démocratique

    • 12 octobre 2009 à 09:37 | lalatiana (#1016) répond à georges Rabehevitra

      Well done, Georges ...

      Rien à redire ... Le sujet est tellement délicat et les enjeux sont tellement obscurs (positif ? négatif ?) , que seul un débat législatif ou un débat national peuvent permettre la transparence nécessaire à une décision saine.

  • 12 octobre 2009 à 09:49 | bema (#828)

    Il y a URGENCE A REVOIR UN TEL ACCORD. Au lieu de se CHAMAILLER unissons nos efforts à protéger les paysans. Tous les services concernés doivent bouger et ne pas trainer pour ce genre de pillage déguisé. AttENTION : IL Y A TOUJOURS DES PROFITEURS et qui profitent de cette période d’égarement.

  • 12 octobre 2009 à 11:13 | Joseph (#2102)

    Pourquoi occultez vous cette info, importante dans le climat actuel diffusée dans l’article de Sébastien Hervieu du Monde du 20 Mars 2009 envoyé spécial à Antsohihy ?

    "Le 29 janvier 2008, le Président de Varun Industries, Kiran Mahta, avait rencontré Marc Ravalomanana alors chef de l’Etat.
    M. Ravalomanana a donné son accord moyennant des contreparties. Selon une source proche du dossier, "Varun devait faire des dons auprès de sa fondation personnelle, vendre à prix réduit 15 000 de ses articles d’ustensiles en inox au groupe agroalimentaire Tiko du président, et envoyer des semences de riz indiennes dans les rizicultures du chef de l’Etat". Mais les terres dont l’Etat malgache est propriétaire sont minoritaires dans le projet.

    .../...
    Dans l’une des rares habitations du village d’Ambalavy où la tôle a remplacé le chaume, Jean-Rémi Rivondrazana, adjoint au maire, est séduit. "Gagner de l’argent sans travailler, que demander de plus ? estime ce cultivateur de deux hectares. Le seul problème, c’est la durée de contrat de 50 ans. J’aurai préféré 15 ou 20 ans. J’ai peur d’une nouvelle colonisation"

    .../...
    Le chef de région, André Randriamanesy se réjouit de l’opportunité : "C’est un projet gagnant-gagnant. Ils se sont engagés à électrifier les campagnes, acheminer l’eau potable, et construire des écoles et des centres de santé." .../...

    Merci d’aller aussi vers des sites de portée générale sur les enjeux de ces colonisation des terres des pays du Sud :

    http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2595&var_recherche=madagascar

    http://www.grain.org/articles/?id=47

    http://www.grain.org/videos/?id=196

    Ainsi les lecteurs auront une idée plus complète du sujet.

  • 12 octobre 2009 à 11:16 | Joseph (#2102)

    L’article complet intéressera sans doute quelques personnes :

    LE MONDE | 20.03.09 | 14h30

    ANTSOHIHY (RÉGION DE SOFIA) ENVOYÉ SPÉCIAL

    "Varun ? C’est un arbre, non ?" Réfugié sous un abri alors que des trombes d’eau s’abattent sur la place du village d’Ambalavy, dans le nord-ouest de Madagascar, André Rabenampiana connaît bien le bois "varona", mais n’a jamais entendu parler de la société indienne Varun International. L’orage passé, ce père de sept enfants retourne cultiver son quart d’hectare de riz.
    Il ne se doute pas que sa parcelle et celles de ses voisins pourraient bientôt être exploitées par des étrangers. Il n’est pas le seul. Varun International compte louer 465 000 hectares de terres pendant cinquante ans, principalement dans les régions de Sofia (170 000 hectares), Menabe (165 000) et Atsinanana (100 000). Sur des terres majoritairement déjà exploitées, l’entreprise veut cultiver du riz à 80 %, mais aussi du maïs et du dal (lentilles).

    Les cessions de terres à des entreprises étrangères ont nourri la révolte qui vient d’aboutir à la chute du président Marc Ravalomanana. Mercredi 18 mars, son successeur Andry Rajoelina, a annoncé l’annulation de la cession contestée de 1,3 million d’hectares de terres à la société sud-coréenne Daewoo. Conscient du contexte politique sensible, Varun cherche à se démarquer : "Daewoo voulait chasser les paysans de leurs terres, avec nous, il y aura des contrats", rassure un responsable.

    Depuis plus d’un an, cette filiale du groupe Varun Industries (ustensiles de cuisine, pétrole...) avance pas à pas pour concrétiser son projet d’agrobusiness d’un montant de 1,5 milliard d’euros sur dix ans. Il a fallu tout d’abord obtenir l’accord des autorités malgaches. Le 29 janvier 2008, le président de Varun Industries, Kiran Mahta, avait rencontré Marc Ravalomanana alors chef de l’Etat.

    TERRES DÉJÀ EXPLOITÉES

    M. Ravalomanana a donné son accord moyennant des contreparties. Selon une source proche du dossier, "Varun devait faire des dons auprès de sa fondation personnelle, vendre à prix réduit 15 000 de ses articles d’ustensiles en inox au groupe agroalimentaire Tiko du président, et envoyer des semences de riz indiennes dans les rizicultures du chef de l’Etat". Mais les terres dont l’Etat malgache est propriétaire sont minoritaires dans le projet. Près de 85 % des surfaces ciblées sont déjà exploitées et leur cession suppose l’approbation des paysans propriétaires. Varun International leur propose un marché : accepte de louer leur terre pendant 50 ans contre le versement de 30 % de la récolte.

    Les paysans ne devraient pas y perdre grâce à une hausse considérable de la productivité. Des tracteurs devraient remplacer les zébus et davantage d’engrais serait utilisé. La production devrait passer de 3 à 12 tonnes de riz à l’hectare. En restant les bras croisés, le paysan recevrait donc une quantité de riz équivalente, voire plus importante qu’auparavant.

    "PARTAGER LA PRODUCTION"

    Dans l’une des rares habitations du village d’Ambalavy où la tôle a remplacé le chaume, Jean-Rémi Rivondrazana, adjoint au maire, est séduit. "Gagner de l’argent sans travailler, que demander de plus ? estime ce cultivateur de deux hectares. Le seul problème, c’est la durée de contrat de 50 ans. J’aurai préféré 15 ou 20 ans. J’ai peur d’une nouvelle colonisation".

    A Antsohihy, capitale régionale, un ingénieur agronome soulève d’autres questions : "Que va-t-on faire de tous ces paysans qui n’auront plus d’emploi ? Varun nous a dit qu’ils allaient travailler avec des gens d’ici, mais la plupart vivent en brousse et sont illettrés". La compagnie promet d’embaucher 10 000 personnes, soit 1 % des paysans concernés dans un pays miné par le chômage. Le chef de région, André Randriamanesy se réjouit de l’opportunité : "C’est un projet gagnant-gagnant. Ils se sont engagés à électrifier les campagnes, acheminer l’eau potable, et construire des écoles et des centres de santé."

    Directeur du développement régional, Léon Mananjara dénonce un manque de transparence. "Comment peut-on pousser à des décisions sur un projet d’une si grande ampleur alors que tous les paysans ne sont pas au courant et que l’on n’a pas accès au détail des engagements ?"

    L’enjeu n’est pas seulement local. Varun apparaît comme le bras opérationnel d’un Etat indien en quête de terres pour nourrir 1,1 milliard d’habitants. Représentant de la société, Tapas Kumar Bodak, ne dément pas cet objectif, mais insiste sur sa volonté "de partager la production avec les Malgaches pour que ceux-ci deviennent à terme autosuffisants". De 20 % de la production de riz exportée vers l’Inde dans les premières années, Varun compte passer à 60 % d’ici à dix ans.
    Sébastien Hervieu

  • 12 octobre 2009 à 11:20 | Joseph (#2102)

    pour ceux qui l’ont manqué voici la carte des chasses aux terres :

    http://www.bastamag.net/IMG/jpg/LANDGRABcarte-2.jpg

  • 12 octobre 2009 à 16:02 | Rabila (#1379)

    C’est symptomatique sur investissements étrangers à M/car, et dans tous les domaines (miniers, industriels, commerciaux, agricoles). Ils seraient tous en défaveur des malgaches. On soupconne qu’ils sont conclus par une minorité qui ne se soucie guère de l’interêt général.

    Apparemment, les malgaches sont dans une incapacité de valider un projet de grande envergure et complexe.

    Le projet agrobusiness de Varun est complexe impliquant une multitude de dimensions qu’on ne saura pas toutes les mesurer et empêchant une certitude absolue et définive sur son bien-fondé.

    Opposants et promoteurs du projet Varun auraient tous raison.

    Varun ne vient pas pour la bienfaisance. Et il est en position de force, il apporte des milliards. Ces milliards placés à la banque lui rapportera des dizaines de millions. C’est aux malgaches de faire l’effort de préciser les conditions, les termes qui peut rendre le projet avantageux, au moins non déficitaire pour toutes parties malgaches, les paysans locaux, la région et l’état.

    Les projets de la taille de Varun ou de Daewoo ne seront pas des milliers. Il est dans l’interêt de M/car de sauter sur ces occasions et par dela prouver que les malgaches ont aussi la bosse des affaires.

    Mais pour l’instant, je suis pessimiste. Comme en politique, les malgaches n’ont pas démontré beaucoup de génie dans les grandes décisions.

    • 12 octobre 2009 à 19:38 | zandrygasy US (#1941) répond à Rabila

      Rabila,

      I think your opinion sounds more optimistic than it is ...

      Anyway, my point is that, despite the fact that the project is risky, .... saying no to all opportunities will no bring our country any better.

      Always under the pretext of ’protecting our land’ ... there are countries who do not have land but still prosper, think about Japan, how poor, how rough are its land.

      Mr Rabehevitra, with all due respect, we got to think outside the box, and take some risk to get out of this poverty trap.

    • 14 octobre 2009 à 06:05 | georges Rabehevitra (#3099) répond à zandrygasy US

      Dear Sir,
      For sure, we need to mind outside the box of economics. I’m just wondering if it is possible for someone whose model is the american way of mind in economics

      Do you know the the last Nobel prizewinners in economics ? really interesting to learn. As it seems that you live in US, I think it would be easy for you to buy some of books written by these 2 professors.

      By the way, it was just to try to know who is really inside or outside the ’’box’’

      Regards

  • 12 octobre 2009 à 22:32 | Ranavavy (#104)

    Voici comment les anciens gouvernants de Madagascar tel Ravalomanana ont donné, voir sacrifié des terres malgaches dans les mains de PROFITEURS INDIENS dont les bénéfices pécuniers, santé et autres ne serviront du tout le peuple Malgache ;c’est pour se mettre le pognon dans les poches et vendre le sol des ancêtres à des gens qui détiennent déjà des sommes colossales dans le monde de la sidérurgie mondiale et dont les retombées sont pour un nombre restreint de profiteurs. Défendez-vous Malgaches, vous êtes chez vous !

  • 18 octobre 2009 à 01:56 | Fafa (#2946)

    Merci à vous pour l’interpellation. Il convient maintenant de saisir les autorités compétentes (Bianco, Justice, ...) afin d’ouvrir un dossier sur cette affaire.
    A+

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