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La portée du « Pacte de responsabilité » prévu dans la Décision N° 24-HCC/D3 du 12 juin 2015 de la Haute Cour Constitutionnelle (HCC) relative à la résolution de mise en accusation du Président de la République Hery RAJAONARIMAMPIANINA

samedi 1er août 2015

Par Anaclet IMBIKI

Le sens concret du « Pacte de responsabilité » prévu dans la Décision N° 24-HCC/D3 du 12 juin 2015 de la Haute Cour Constitutionnelle continue d’alimenter les débats juridico-politiques, soit pour s’interroger de la suite de la première rencontre entre le Président de la République et les représentants de l’Assemblée Nationale, soit pour regretter que son éventuelle violation ne soit pas assortie expressément de sanction, soit surtout pour réclamer que son contenu et sa portée soient mieux explicités.

Comme la négociation entre l’Exécutif et le Législatif sur ce sujet devrait reprendre à l’issue des élections communales du 31 juillet 2015, compte tenu du caractère exécutoire et impératif du dispositif de la HCC, à défaut d’explicitation du sens exact de cette expression par son auteur, il convient de conseiller les acteurs concernés et d’éclairer l’opinion publique en essayant de préciser la portée concrète du « pacte de responsabilité ».

Il importe tout d’abord de souligner que ce concept ne peut pas logiquement être défini ou explicité isolément, en dehors des autres dispositifs de fond de la Décision qui le contient. Il ne peut être compris qu’interprété en combinaison avec les autres dispositifs suivants ;
- « Les institutions de la République exercent pleinement leurs fonctions conformément à la Constitution »

- « l’exécutif et le législatif respectent les principes de séparation et de collaboration des pouvoirs, fondement du régime semi-présidentiel de la 4ème République.Les Institutions de la République œuvrent en faveur d’un pacte de responsabilité, garant du bon fonctionnement de l’Etat, dans le cadre de la Constitution en vigueur ».

Il faut ensuite mettre en exergue que la conclusion de ce pacte de responsabilité ne devrait en aucun cas avoir pour conséquence d’instaurer un régime extra-constitutionnel, mais au contraire, comme l’affirme à plusieurs reprises la Décision de la HCC, les attributions des Institutions doivent être exercées conformément à la Constitution en vigueur.

Ce qui veut dire que, contrairement à l’opinion généralement exprimée, chaque Institution conserve ses prérogatives constitutionnelles propres, notamment ;

- dissolution de l’Assemblée Nationale par le Président de la République (art. 60) ;

- proclamation de la situation d’exception par le Président de la République (art. 61) ;

- question de confiance du Premier Ministre pour engager la responsabilité de son Gouvernement (art. 100) ;

- empêchement (art. 51 de la Constitution) et mise en accusation du Président de la République par le Parlement (art. 131-132) ;

- motion de censure de l’Assemblée Nationale contre le Gouvernement (art. 103) ;

- mise en place de commission d’enquête parlementaire (art. 102) ;

- délégation de pouvoir de légiférer de l’ l’Assemblée Nationale au Président de la République (art. 104).

Peuvent donc être pris en compte pour la détermination de la portée du pacte de responsabilité, dans le respect des « principes de séparation et de collaboration des pouvoirs, fondement du régime semi-présidentiel de la 4ème République », tous les actes susceptibles de concourir à la responsabilisation des « Institutions de la République » pour garantir le « bon fonctionnement de l’Etat, dans le cadre de la Constitution en vigueur ».

Concrètement, pour atteindre cet objectif majeur de l’accomplissement de leurs missions constitutionnelles par les Institutions de la République, en mettant l’accent sur la lettre et l’esprit de l’ensemble des dispositifs de la Décision de la HCC, la convention devant être conclue entre l’exécutif et le législatif pour matérialiser ce pacte de responsabilité ordonné par la HCC, devrait au minimum comprendre les dix (10) mesures fondamentales suivantes. Engagement de bonne foi des deux Institutions :

  1. de respecter rigoureusement les dispositions impératives de la Constitutions ;
  2. de ne pas exercer abusivement les prérogatives sus-énumérées qui leur sont reconnues par la Constitution, c’est-à-dire, ne pas les exercer intempestivement, et en dehors de l’intérêt général, uniquement pour des intérêts purement personnels ou particuliers (partis politiques, groupes de pressions et d’intérêt…) ;
  3. d’assurer la stabilité des groupes parlementaires, dans le but d’avoir une majorité constructive stable, et empêcher une ‘’majorité à géométrie variable’’. Ce qui devrait se traduire par une application rigoureuse de l’article 72 de la Constitution relative à la déchéance de tout député qui change de « groupe politique pour adhérer à un autre groupe, autre que celui au nom duquel il s’est fait élire » ou « s’il dévie de la ligne de conduite de son groupe parlementaire » ;
  4. de déterminer l’interprétation commune de l’article 54 de la Constitution sur la nomination du Premier Ministre « présenté par le parti ou le groupe de partis majoritaire à l’Assemblée Nationale » et l’article 72 ci-dessus sur les causes de déchéance des députés, dispositions constitutionnelles objet de vives controverses ;
  5. de respecter des dispositions de l’article 86 de la Constitution relatives à l’ordre du jour des Assemblées, pour éviter qu’un projet de loi important pour la vie de la nation, tel un projet de Loi des Finances (art.92) ou de Loi des Finances Rectificative, ne soit pas discuté et voté dans le délai prescrit au profit d’une autre préoccupation, obligeant la convocation d’une session extraordinaire ;
  6. de respecter l’éthique politique, notamment, par l’interdiction des pratiques de corruption au sein de toutes les Institutions étatiques (Exécutif, Législatif et Juridictionnel, HCC comprise, sous peine de déclenchement de processus constitutionnel de mise en cause de responsabilité de l’Institution fautive (dissolution de l’Assemblée Nationale, mise en accusation pour déchéance, ouverture de commission parlementaire d’enquête, poursuite judiciaire) ;
  7. à fixer un délai raisonnable impératif de mise en œuvre, de suivi et de contrôle de respect du Pacte de responsabilité ;
  8. à mettre en œuvre sans délai la sanction du non respect des prescriptions du Pacte de responsabilité, par le déclenchement de processus constitutionnel prévu au point 6 ;
  9. à conscientiser et responsabiliser les partis politiques d’appartenance des membres de l’Exécutif et du Législatif à se soumettre de bonne foi au respect du Pacte de responsabilité ;
  10. de publier immédiatement par les voies et moyens les plus appropriés le Pacte de responsabilité.

Conclusion
Le contenu potentiel du Pacte de responsabilité préconisé ci-dessus résulte de l’interprétation exégétique des dispositifs de la Décision de la HCC dans un contexte statique. Mais c’est évidemment faire preuve de crédulité que d’envisager l’élaboration de ce Pacte dans cet esprit.
Si les discussions s’y rapportant ont été remises pour l’après les élections communales du 31 juillet 2015, c’est que les acteurs concernés, les Institutions bien sûr, mais aussi les entités politiques qui les cautionnent, entendent orienter le contenu du Pacte de responsabilité en fonction des rapports des forces qui s’en dégageraient.
D’où la nécessité impérative d’envisager les péripéties aléatoires d’élaboration et de mise en œuvre du Pacte de responsabilité dans une vision dynamique, en fonction de la légitimité des acteurs politiques concernés issue des futures élections communales.
Dans cette perspective, pour éviter tous faux espoirs placés dans ce Pacte de responsabilité potentiel, il importe de rappeler que les acteurs politiques malgaches sont légions dans l’art de ne pas respecter leurs engagements comme dans les cas des Accords de Dakar en 2002, les Accords de Maputo et d’Adis Abeba en 2009, et dans le cadre de l’application de la Feuille de route du 17 septembre 2011.
C’est d’ailleurs pour une telle raison que dans sa Déclaration du 30 juin 2015, l’association Malagasy Miara-Mandroso Aron’ny Demokrasia (MaMiMAD) a fait des suggestions dans un contexte socio-politique évolutive pour déterminer la portée du Pacte de responsabilité ordonné par la HCC.
Enfin, connaissant parfaitement la versatilité légendaire des députés et le phénomène de transhumance politique des acteurs politiques malgaches ces derniers temps, précisément depuis la crise politique de 2009, l’on est en droit de s’interroger légitimement, si, à l’issue des épreuves des élections communales, la physionomie politique ayant prévalu lors de la Décision de la HCC du 12 juin 2015, source du Pacte de responsabilité à l’occasion de la mise en accusation du Président de la République (sur 151 députés, 121 pour et 04 contre), restera inchangée ou évoluera pour constituer une autre majorité susceptible de rendre le Pacte de responsabilité sans objet ou dépassé ? Dans ce cas, quelle sera alors la position de la HCC et quelle sera sa crédibilité, compte tenu des critiques émises à son encontre pour ce Pacte de responsabilité ?
L’Exécutif aura-t-il la même prédisposition d’esprit de négociation après les communales ?
Les représentants de l’Assemblée Nationale engagés dans la première rencontre avec le Président de la République, en fonction des rapports des forces au sein de la Chambre seront-ils les mêmes et conserveront-ils la même opinion à l’occasion de la reprise des discussions ? Les évènements se produisant lors du vote de la motion de censure contre le Gouvernement début juillet 2015, c’est-à-dire, à peine un mois après la résolution de mise en accusation du Président de la République du 27 mai 2015 semble déjà annoncer une amorce de recomposition des rapports des forces au sein de l’Assemblée nationale comme dans le paysage politique du pays.

Le 24 juillet 2015

4 commentaires

Vos commentaires

  • 1er août 2015 à 11:44 | RAMAHEFARISOA Basile (#9107)

    - « Pacte de responsabilité= »CACHE MISERE DE LA H.C.C".Point barre !

    Basile RAMAHEFARISOA-1943
    b.ramahefarisoaàgmail./com

    • 1er août 2015 à 11:51 | RAMAHEFARISOA Basile (#9107) répond à RAMAHEFARISOA Basile

      L’élection municipale-communale terminée,
      SEM Hery Martial RAJAONARIMAMPIANINA RAKOTOARIMANANA
      - doit se consacrer à trouver des moyens et des solutions pour satisfaire les 70 % d’abstentions,de l’ensemble des « POPULATIONS » de Madagascar.

      TOUT POUR GAGNER 2018 !
      SEM Hery Martial RAJAONARIMAMPIANINA RAKOTOARIMANANA.
      C’est gagnable 2018 !

      FH/HR:même combat !

      Basile RAMAHEFARISOA-1943
      b.ramahefarisoa@gmail.com

  • 1er août 2015 à 12:38 | Parole (#2602)

    La HCC aurait pu se contenter de citer l’article 45 de la Constitution (président garant du bon fonctionnement des pouvoirs publics) et le tour était joué. Elle a voulu trop bien faire avec ce pacte bizarre.
    Moralité : le mieux est l’ennemi du bien.

  • 3 août 2015 à 13:52 | GADSDEN_FLAGIVANDRY (#8661)

    La portée du « Pacte de responsabilité » prévu dans la Décision N° 24-HCC/D3 du 12 juin 2015 de la Haute Cour Constitutionnelle (HCC) relative à la résolution de mise en accusation du Président de la République Hery RAJAONARIMAMPIANINA..... Les toilettes ? après les canalisations pour enfin atteindre la fosse sceptique ,en résumé la même destin réservé a toutes les résolutions qui sont foulées au pied par les mêmes législateurs qui les mettent en place et si ce n’est pas le cas ,la tête de l’Etat le fera à leur place.

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