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Economie

Chronologie de l’affaire Daewoo

lundi 2 février 2009 | Patrick A.

Rarement un dossier foncier aura autant enflammé les passions. Aussi tentons-nous de résumer les faits disponibles.

[Dossier initialement publié le 2 février 2009 et mis à jour le 15 février 2009]

Qui est Daewoo ?

Le conglomérat Daewoo est fondé en 1967 par Kim Woo-choong. Il opère dans de nombreux domaines, dont la construction navale, les armes, l’électroménager, les appareils électroniques, et l’automobile.

Malgré un endettement excessif, le groupe se maintient grâce aux appuis politiques dans plusieurs pays et à la position de son dirigeant à la tête de la Fédération coréenne des industries. Sa position devient cependant de plus en plus fragile.

Daewoo est finalement démantelé en 1999 par le gouvernement sud-coréen à la suite d’une faillite frauduleuse.

L’ancien patron Kim Woo-choong a été condamné par la justice sud-coréenne en mai 2006, à dix ans de prison pour fraude et détournement de fonds en liaison avec cette faillite retentissante. Il a été amnistié début 2008.

Daewoo Logistics Corporation est né du démantèlement du groupe Daewoo en 1999. Elle s’est d’abord consacré aux activités de logistique et de transport pour les sociétés d’import/export : transport maritime, logistique de ports ou d’aéroport.

Depuis 2006, Daewoo Logistics a aussi développé de grands projets de développement de ressources naturelles en Indonésie : plantation de maïs, huile de palme, caoutchouc, et mines de charbon.

Est-il vrai que Daewoo est dirigée par un escroc international ?

Il apparaît à travers ces faits que l’affirmation d’Andry Rajoelina selon laquelle le patron de Daewoo est un escroc international recherché par Interpol est erronée, car elle se base sur un amalgame entre l’ancien groupe Daewoo et les sociétés issues de son démantèlement qui n’ont plus aucun lien avec Kim Woo-choong, et qui elle-mêmes n’ont plus pour la plupart aucun lien entre elles.

Que fait Daewoo Logistics à Madagascar ?

Depuis début 2008, Daewoo Logistics s’occupe d’une partie de la logistique et du transport nécessaire au projet Ambatovy Nickel, qui est lui-même une coentreprise entre le canadien Sheritt, Korea Resources Corporation (Kores) et le japonais Sumitomo.

Il n’y a pas de société appelée Daewoo Madagascar. Daewoo Logistics a un bureau local qui s’occupe exclusivement de transport. Par contre, c’est une filiale de Daewoo Logistics, appelée Madagascar Future Entreprise, et qui a son siège à Antananarivo (Ivandry) qui s’occupe d’agribusiness.

Quelles sont les origines de « l’affaire Daewoo » à Madagascar ?

Fin Octobre, une délégation de Daewoo Logistics, de Kores, et d’une autre grande société coréenne, Posco (sidérurgie/métallurgie) rend visite au président Ravalomanana.

Madagascar Future Entreprise a bien effectué des études sur des terres, les a remises au gouvernement et a déposé auprès de l’EDBM une demande d’autorisation pour pouvoir acquérir des terrains. En soi, ces démarches sont conformes à la législation.

Nous n’avons pas pu recouper la surface de terrains pour lesquels une demande a été effectivement déposée.

L’affaire éclate véritablement lorsque le 17 novembre, Daewoo Logistics annonce à la presse coréenne avoir marqué son accord pour louer 1,3 millions d’hectares pour une durée de 99 ans.

L’information est reprise par le correspondant local de la BBC, et les principales agences de presse en matière financière : Bloomberg, Reuters, AFP, Associated Press qui interviewent notamment le directeur financier de Daewoo Logistics, Shin Dong-hyun.

La médiatisation de l’affaire augmente encore lorsque le Financial Times affirme que la location de terres pourrait se faire gratuitement.

Le gouvernement malgache nie que les accords aient été déjà donnés, ou que la cession soit gratuite. Dans un premier temps, Daewoo dénonce la présentation des faits par le Financial Times, mais ne critique pas celle faite par les autres médias.

Erreur d’interprétation de la part de Daewoo Logistics, erreur de communication entre les représentants locaux de Daewoo et leur siège social ou projet réel déjà très avancé ? Il nous est difficile de répondre.

Que va-t-il se passer ?

Le directeur financier de Daewoo Logistics reconnaît courant janvier que le projet est désormais bien compromis : « Nous avons de graves difficultés à Madagascar. Le projet se déroulait correctement, mais il a été brutalement stoppé à cause des compte-rendus des médias. Ces compte-rendus ont mis en colère les malgaches car il les rend honteux de faire partie de ce qu’ils appelent un système néo-colonial ».

Le 10 février, plusieurs dépêches des grandes agences financières (AFP, Reuters) rapportent de nouveaux propos de Shin Dong-Hyun, le directeur financier de Daewoo Logistics : le projet sera vraisemblablement retardé en raison de la situation politique à Madagascar, la chute du prix du maïs dans le monde et la difficulté actuelle à lever des financements sur les marchés internationaux.

La situation politique est toutefois présentée comme le principal obstacle : « Nous sommes toujours désireux d’investir là-bas. (...) Nous avons fait tout ce qui était prévu dans les textes, mais le gouvernement de Madagascar n’a pas pu procéder aux actes nécessaires pour nous permettre de continuer. (...) Nous attendons une réponse pour passer à l’étape suivante. »

Selon ces dépêches d’agence, les projets de Daewoo Logistics restent proches de ceux présentés en Novembre à la presse coréenne : planter 2.000 hectares de maïs au cours de l’année 2009, avant de s’étendre jusqu’à 1 million d’hectares de maïs dans la partie ouest de Madagascar, et 300.000 hectares dans l’est pour des plantations de palmier à huile.

Shin Dong-Hyun réaffirme que le projet est intéressant pour Madagascar. Il pourrait créer 71.000 emplois, et entraîner 6 milliards de dollars d’investissement en infrastructure (routes, chemins de fer, port, aménagements et écoles).

« Madagascar est un pays pauvre qui a besoin d’investissements étrangers pour son développement économique » dit-il. « Daewoo investit dans une région sous-développée à une époque où les grands investisseurs internationaux envisagent de réduire leur investissement ou de se retirer du pays. (...) Nous espérons que Madagascar retrouvera la stabilité politique aussitôt que possible. Nous attendrons. »

P.-S.

Liens complémentaires :

- Dossier sur grain.org : les projets de mise en valeur de terres agricoles par de grands pays importateurs
- Pétition de la fédération Peuples Solidaires
- Pétition d’un « Collectif pour la défense des terres malgaches ».

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