Facebook Twitter Google+ Les dernières actualités
samedi 20 avril 2024
Antananarivo | 17h05
 

Communiqué

« MADAGASCAR, Grenier de l’Océan Indien » : Que les paysans ne deviennent ni les oubliés ni les victimes

samedi 21 septembre 2013

Les 25 et 26 Mars 2013, la Commission de l’Océan Indien (COI) s’est réunie à Mahajanga autour du projet LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE DANS L’INDIANOCÉANIE, INVESTIR DANS LA PRODUCTION AGRICOLE , qui vise à faire de Madagascar le Grenier de l’Océan Indien. Cette réunion a permis aux divers acteurs publics et privés présents d’adopter le projet de la COI sur la sécurité alimentaire régionale et « d’affiner le projet en tenant compte des réalités et des exigences du secteur privé ». [1]

Quel sort sera réservé aux paysans des terrains concernés ?

Toutefois, la présence, parmi les 175 participants, de la plateforme malgache Femmes, développement durable et sécurité alimentaire (FDDSA), « lancée le 27 mars dans le sillage de la réunion des investisseurs sur la sécurité alimentaire à Mahajanga », ne saurait occulter l’absence criante des organisations paysannes des régions désignées comme pilotes pour ce projet - Menabe, Sofia et Vakinankaratra - dans la liste des participants à cette réunion [2]. La prise en compte des exigences du secteur privé a fait l’objet des réflexions au cours de la réunion, mais les paysans ont été les grands oubliés.

Un projet de cette envergure impliquera forcément de vastes étendues de terrains et impactera l’accès à la terre et à l’eau des familles d’agriculteurs et éleveurs malgaches. L’existence de nombreux projets présentés comme étant « de développement » qui ont donné lieu à des expropriations et expulsions de milliers de paysans malgaches de leurs terres ancestrales ces dernières années à Madagascar n’est pas du tout rassurante quant au sort réservé aux occupants actuels des terrains visés par ce projet. Les passages suivants des Conclusions et recommandations de la réunion de Mahajanga citant parmi les actions nécessaires :
- « L’utilisation des terres à Madagascar doit se faire en conformité avec le droit foncier et coutumier malgache. L’administration reste le seul juge de l’opportunité ou non de l’octroi d’un terrain domanial »
ainsi que
- « L’amélioration de la loi sur les investissements et l’égalité de traitement des investisseurs étrangers et malgaches. Pour les sociétés de droit malgache l’accès au foncier d’entreprise ne comporte plus de seuil d’investissement et de superficie maximale » font craindre le pire.

Quels engagements ont pris les autorités malgaches sur les terres ?

La loi actuelle sur les investissements 2007-036 accorde en effet déjà de nombreux avantages inacceptables aux sociétés étrangères, et l’Economic Development Board of Madagascar – EDBM – réputée être en veilleuse depuis la crise de 2009 pour absence de financement, affiche une activité florissante et un dynamisme inégalé dans la facilitation des démarches des investisseurs. [3] Toute modification de cette loi allant dans le sens des investisseurs étrangers creuserait encore davantage l’écart entre les investisseurs et la majorité des familles malgaches qui manquent de moyens financiers et accélèrerait l’intensité et la vitesse des accaparements des terres qui constituent souvent les seuls biens et moyens de production de ces familles. À terme, le risque serait la transformation de 80% des Malgaches en paysans sans terre qui vivront dans des « réserves » comme cela s’est déjà passé dans d’autres pays, alors que les habitants de Madagascar atteignent « 99% de la population de la COI » [4]

La réunion du mois de mars à Mahajanga a vu la présence de plusieurs hauts responsables malgaches parmi lesquels des Chefs de Région et plusieurs ministres dont certains sont actuellement candidats aux élections présidentielles. Quels engagements concrets ont déjà pris ces nombreuses autorités concernant les terres et l’avenir des paysans ? Leur silence et exceptionnelle discrétion sur ce projet de la COI inquiètent. Des clarifications sur ces sujets pour tous les citoyens s’avèrent nécessaires et urgentes.

Pour une meilleure mobilisation des réflexions et moyens en faveur des paysans et de l’autosuffisance alimentaire à Madagascar.

Le Collectif TANY interpelle tous les responsables et décideurs et réitère sa demande d’annulation de la possibilité pour les sociétés étrangères d’acheter des terres à Madagascar.

Le Collectif TANY insiste sur l’urgence de renforcer de manière effective les droits des paysans malgaches sur leurs terres ancestrales qui constituent « 98% de la surface agricole utile hors sucre » [5] de la zone « Indianocéanie ».

Il est inconcevable, dans un pays qui survit grâce à l’aide alimentaire, d’envisager de produire du riz et autres denrées alimentaires pour l’exportation d’un côté, et d’augmenter la quantité de riz importé de l’autre. Les principaux bénéficiaires de ce système, tels les sociétés transnationales et les grandes entreprises commerciales s’enrichiront davantage, les perdants immédiats et à long terme - dindons de la farce - seront les paysans. Même les caisses de l’État n’y gagneront que des miettes en raison de toutes les exemptions fiscales accordées.

La situation d’insécurité alimentaire et de pauvreté actuelle à Madagascar ainsi que la révolte récente des paysans d’autres pays constituent autant d’arguments à prendre en compte dans le débat sur « la sécurité alimentaire dans l’Indianocéanie, investir dans la production agricole ». Prenons ensemble conscience de ne pas confondre augmentation de la production et sécurité alimentaire.

Les paysans et les franges les plus vulnérables de la population doivent être considérés comme les acteurs indispensables dans la définition, la mise en œuvre et les bénéficiaires des projets de développement et de sécurité alimentaire car ils constituent la majorité des habitants à Madagascar. Les gouvernants malgaches et tous les intervenants dans le projet de la COI ont intérêt à tenir compte de cette majorité s’ils ne veulent pas courir le risque de compromettre la réalisation de la sécurité alimentaire dans la région.

Paris, le 20 septembre 2013

Le Collectif pour la Défense des Terres Malgaches
patrimoine.malgache@gmail.com
www.terresmalgaches.info
http://www.facebook.com/TANYterresmalgache

7 commentaires

Vos commentaires

  • 21 septembre 2013 à 09:34 | rabri (#2507)

    « Un projet de cette envergure impliquera forcément de vastes étendues de terrains et impactera l’accès à la terre et à l’eau des familles d’agriculteurs et éleveurs malgaches. L’existence de nombreux projets présentés comme étant « de développement » qui ont donné lieu à des expropriations et expulsions de milliers de paysans malgaches de leurs terres ancestrales ces dernières années à Madagascar n’est pas du tout rassurante quant au sort réservé aux occupants actuels des terrains visés par ce projet »

    Pour une prise de conscience collective à ce sujet d’expropriation avec les conséquences qui s’en suivent, je recommande la vidéo suivante : « le marché de la faim » http://video.google.com/videoplay?d...

    En agriculture, le soi-disant « développement » via des projets d’agribusiness a toujours des revers irréparables aussi sur le plan ENVIRONNEMENTAL. On a failli les avoir avec les projets Daewoo et Varun avec les mêmes conséquences prévisibles. En voici l’explication technique :

    Un tel projet fait appel certainement à une agriculture intensive dont les composantes sont la pratique de MONOculture ( maïs,…..), l’épandage de doses massives d’engrais chimiques et de pesticides pour booster le rendement avec comme conséquences la pollution des nappes phréatiques

    Parallèlement , une MONOculture est très consommatrice d’eau (plusieurs milliers de m3), ce qui risque à la longue d’ assécher plusieurs cours d’eau. En plus de la pollution de la nappe phréatique citée ci-dessus, imaginez les conséquences catastrophiques sur les habitants dans les coins concernés (eau rare et en plus polluée !!!!!!!!!!!!!!!!!!)

    Comme un tel projet veut toujours plus, il pourrait y avoir aussi défrichement de plusieurs centaines voire milliers d’ha de forêt qui va entraîner une modification climatique importante (en plus du réchauffement qu’on constate actuellement) : rareté de la pluie donc augmentation inquiétante de la sécheresse (voir déjà ce qui se passe en Amazonie). Parallèlement, là où il y a ces parties « forêt » , la terre n’est pas agronomiquement bonne pour accueillir une MONOculture d’où obligation de « dopage » du sol avec des engrais.

    Ces explications techniques viennent des réalités techniques dans d’autres pays ( Australie, Indonésie, Malaisie, ....) qui ont subi des projets d’agribusiness.

    Merci encore au Collectif Tany pour son alerte régulière qui contribue à anéantir de tels projets dont la seule motivation est le diktat des capitalistes et les gros profits à partager entre des minorités

    • 22 septembre 2013 à 00:25 | Albatros (#234) répond à rabri

      Bonsoir Rabri !!!.
      Entièrement d’accord avec votre dernière phrase.

  • 21 septembre 2013 à 09:41 | el che (#344)

    Ce gouvernement usurpateur de pouvoir ne doit pas concéder la moindre parcelle du sol malgache.
    Tout contrat conclu pendant la période de transition devrait être annulé, et reconsidéré au cas par cas, sous contrôle parlementaire, après les élections. Le paysan ne peut concéder sa terre contre son plein gré. Toute réquisition de terre (prérogative exorbitante de droit public) n’est valable qu’au profit de l’état ou des collectivités publiques, pour le service publique. Et même dans ce cas, le paysan doit bénéficier d’une juste et préalable indemnité.

    Enfreindre ces règles constitue manifestement un vol .

  • 22 septembre 2013 à 00:17 | Albatros (#234)

    Cet article montre bien que depuis mars 2009 les choses n’ont pas changées à Madagascar.
    Pire elles vont en s’aggravant.
    La « révolution » mise en avant n’a été que le remplacement des « profiteurs » étrangers ET/OU malgaches par d’autres.
    La seule chance pour le paysan malgache c’est de parvenir à développer une mise en commun :
    - des ressources humaines (le travail),
    - de la terre (sans perdre la notion de propriété, le riz pouvant être cultivé en même temps et avec les mêmes moyens sur deux parcelles n’ayant pas le même propriétaire),
    - du contrôle des filières de vente (pour éviter les intermédiaires spéculateurs).
    En évitant le collectivisme centralisateur.

    P.S. Je note qu’en dehors de Rabri et El Che que je salue, les « Grandes G..les.. » de ce forum sont absents du débat sur un sujet pourtant primordiales pour la survie du Peuple Malgache.

    • 22 septembre 2013 à 13:43 | rabri (#2507) répond à Albatros

      Bonjour Albatros,

      Les Grandes G.les de ce forum sont les champions des YAKA et des FÔKE. Un tel article doit satisfaire un certain nombre : « du moment qu’il y a capitaux étrangers, c’est l’essentiel ; on débattra plus tard des conséquences »

    • 22 septembre 2013 à 17:54 | rabri (#2507) répond à rabri

      en plus des Grandes G.les, je n’oublie pas surtout les ADDICTS D’ AIDE ETRANGERE A TOUT PRIX

    • 23 septembre 2013 à 00:15 | Albatros (#234) répond à rabri

      Bonsoir Rabri.
      Réponse tardive de ma part, pour vous dire que « l’aide étrangère » n’est pas à négliger quand il s’agit d’une aide ciblée sur des petites structures. L’expérience de « l’étranger » et la « connaissance » du terrain peuvent se marier pour le bien du peuple malgache, notamment dans les nouvelles énergies.

Publicité




Newsletter

[ Flux RSS ]

Suivez-nous

Madagascar-Tribune sur FACEBOOK  Madagascar-Tribune sur TWITTER  Madagascar-Tribune sur GOOGLE +  Madagascar-Tribune RSS