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Afrique

Libérer l’économie pour consolider la démocratie en Afrique

mardi 4 octobre 2016

Après la grande vague de libération du joug des colonisateurs européens, est venu le temps de la libération des despotes africains. Certains appellent cela la deuxième vague de libération de l’Afrique. Depuis la fin de la guerre froide, la démocratie multipartite s’est largement diffusée sur le continent. Et pourtant, la démocratie africaine est au mieux au point mort, sinon en recul.

Trop souvent, il s’agit d’une sorte de pseudo-démocratie non-libérale dans laquelle le pouvoir sortant diabolise l’opposition, exploite les moyens de l’Etat pour fausser la compétition électorale en sa faveur et écarter toute susceptible contrainte sur son pouvoir. C’est inquiétant sur un continent où les institutions sont encore fragiles, en proie à la corruption, dont les économies sont en plus affaiblies par la chute des cours des matières premières. Pour que l’Afrique exploite son véritable potentiel, le jeune et dynamique continent va devoir rectifier son zèle pour la démocratie.

La Zambie a été l’un des premiers pays africains à passer par une transition démocratique, lorsque Kenneth Kaunda a quitté le pouvoir après avoir perdu l’élection de 1991. Edgar Lungu a alors pris la présidence avec une majorité mince après avoir mené une campagne marquée par le harcèlement de l’opposition, la fermeture du principal journal indépendant du pays, des accusations de fraude électorale et des manifestations de rue. Quant à l’Afrique centrale, les dirigeants en place sont en train de changer ou de contourner la limitation du nombre de mandats présidentiels pour rester au pouvoir, provoquant souvent des troubles. Au Kenya, où la tension politique monte, il existe un vrai risque de violences post-électorales lors des prochaines élections générales de 2017.

Freedom House, un think-tank américain, estime qu’en 1973, seulement 30% des pays d’Afrique subsaharienne étaient « libres » ou « partiellement libres ». Dans son dernier rapport, la part est de 59%. C’est certes une grande amélioration, qu’il convient cependant de pondérer puisque cette part était de 71% en 2008. Il y a donc une régression. Le nombre de pays « non libres » reste donc important et de nombreux Etats sont jugés défaillants ou fragiles.

Les Africains méritent mieux. Pour que la démocratie devienne effective, les gagnants devraient cesser d’être cupides, les perdants devraient accepter la défaite et les deux ont besoin d’institutions qui assureront l’arbitrage pour une meilleure stabilité. Pourtant, il est rare que ces éléments soient réunis. La meilleure façon pour la démocratie de prospérer serait d’élargir et de renforcer la nouvelle classe moyenne de l’Afrique. De plus en plus connectés au monde, les Africains connaissent mieux que quiconque les lacunes de leurs dirigeants. Prenez l’Afrique du Sud, en dépit de sa constitution modèle, de sa presse dynamique et de son économie diversifiée, son image a été ternie par son président, Jacob Zuma. Il a « déformé » des institutions, parmi lesquelles des organismes chargés de la lutte contre la corruption. En réponse, l’Afrique du Sud a montré le pouvoir des électeurs. Ainsi, lors des récentes élections municipales, le puissant Congrès national africain (ANC) a perdu le contrôle des grandes villes. Pour la première fois, une alternative plausible est rendue possible grâce au parti libéral (Alliance Démocratique).

Les différents index de la liberté économique montrent clairement que les sociétés libres et les économies libres se renforcent mutuellement. La liberté étant le bien commun par excellence, les pays africains doivent donc s’atteler à diversifier leurs économies pour s’affranchir du piège l’exportation de produits bruts. Ceci implique la libéralisation des marchés et le renforcement des institutions indépendantes. Le reste du monde peut aider en élargissant l’accès des produits africains aux marchés des pays riches, en particulier dans l’agriculture.

En plus de promouvoir une classe moyenne, la diversification de l’économie atténue la malédiction de la politique inégalitaire du « gagnant emporte tout ». Lorsque la richesse d’un pays provient essentiellement de l’exploitation des ressources naturelles, le contexte est favorable à la mauvaise gouvernance. Le problème est aggravé par la forme complexe, multi-ethnique de nombreux pays africains, dont les frontières ont été tracées à l’équerre par les colons. Les votes suivent souvent des affinités tribales ou claniques plutôt que des idéologies, ce qui a tendance à fausser le jeu politique. Ainsi, perdre une élection peut signifier être exclu de façon permanente de la manne des ressources naturelles. Réformer ces régimes nécessite de mettre en œuvre des politiques de décentralisation (comme au Kenya), voire de fédéralisme (comme au Nigeria).

Comment le monde peut-il aider les pays africains si ce n’est pas le biais des échanges ? La Chine est certes devenue le plus grand partenaire commercial de l’Afrique, en fournissant une aide et de l’investissement sans se soucier de l’état de droit et des droits de l’homme. Cependant, avec le ralentissement de l’économie chinoise, d’évidence, l’aide à des autocrates africains va devenir le cadet des soucis des dirigeants chinois. D’un autre côté, malgré la baisse de l’influence occidentale en Afrique, pour des raisons historiques, l’aide et les investissements vont continuer. Cependant, dans un contexte où la baisse du coût de pétrole dessert l’étaux autour des occidentaux, il est fort à parier que de nouvelles exigences se dégagent et que les nouveaux prêts et investissements soient conditionnés par le renforcement des institutions de manière à réduire les risques liés aux investissements . La liberté économique arrive donc au centre des préoccupations et les autocrates africains vont devoir rompre le cercle de leur pouvoir absolu pour s’ouvrir à plus de transparence. La liberté est le terreau de la démocratie.

Le danger est qu’avec la montée du terrorisme, les Occidentaux favorisent le combat contre les djihadistes en marginalisant les préoccupations démocratiques, essentiellement dans les régions autour de la Corne de l’Afrique et du Sahel. C’est un objectif de court terme ! Des décennies de lutte contre le terrorisme nous apprennent que les meilleurs remparts contre l’extrémisme sont des Etats plus prospères et justes. Cela ne sera possible que si les institutions sont au service de la volonté du peuple.

Article publié en collaboration avec le projet www.libreafrique.org
Parue initialement dans « The Economist ».

8 commentaires

Vos commentaires

  • 4 octobre 2016 à 20:58 | Paulo Il leone (#6618)

    Sur le jeune continent africain (MDR !! jeune depuis quand ?) et à Madgascar, c’est bien connu le Père Noël arrive en avance par rapport aux autres « vieux » pays... il va amener la démocratie juré craché !

    Vive la méthode coué !

    Encore un tissu de lieux communs lénifiants pour nos indigènes béats devant tant de sagacité !

  • 5 octobre 2016 à 09:17 | tanguy37 (#7699)

    ET ça vous étonne encore !!!!!
    Voyez tous ces potantats(rois négres !!)^roulants Mercedes,4x4 (avec barre "parre -buffle) dans paris ou sur la côte d’azur,et personne ne dit rien !!!
    Mais qu’attendez vous pour saisir tous ces biens,et faire des ecoles,des maternites,des hopitaux,des routes.

    • 5 octobre 2016 à 10:32 | vatomena (#7547) répond à tanguy37

      Jeune Afrique ? Mais non . Afrique plutôt berceau de l’humanité .. mais entrée tardivement dans l’Histoire (parole de Sarkozy !)
      à la remorque d’un monde moderne hyper scientifique ,productif ,organisé,inventif

    • 5 octobre 2016 à 11:21 | kartell (#8302) répond à tanguy37

      @ vatomena

      Cette interprétation des choses est partisane et consanguine, elle ne peut que renforcer le sentiment que sortir de l’ornière africaine demanderait déjà que les analystes fassent preuve de plus de lucidité et d’impartialité….
      Nous assistons à un déballage de « portes ouvertes » et de « y a qu’à, faut qu’on » qui laisse pantois en laissant les choses du quotidien, tourner en boucle perpétuelle…
      Cet article est d’une platitude effroyable mais il est de son époque, celle où l’on blatère sur les forums et autres conférences internationales où des économistes de l’ombre voient enfin la lumière et la notoriété éphémère leur tendre les bras !….
      A continuer, ainsi, à refaire le monde sur les claviers d’ordinateurs, ils songent à devenir les nouveaux gourous d’un politiquement correct, en donnant libre-cours à ceux qui occupent les places chaudes du pouvoir tout en sachant que cracher son venin ou caresser sa boule de cristal ne mettra nullement en danger leur pré-carré et leurs privilèges…
      Faisons l’économie de ce genre de prophétie, elle n’apportera rien à un quotidien, bien moins facile à éradiquer que ces quelques lignes en forme de passe-passe prétentieux sans issue et qui n’apporte rien de nouveau à l’horizon menaçant !….

  • 5 octobre 2016 à 11:53 | Vohitra (#7654)

    Mais qui détient actuellement (je parle de pays) les USD 60 milliards de fonds souverain libyen géré autrefois par le clan Kadhafi dans le temps ?

    Mais pourquoi les pays occidentaux ne disent rien quand les banques des capitales européennes et américaine accueillent chaleureusement les fonds provenant de détournement et accaparement de biens publics pratiqués par ces dictateurs autoritaires et dirigeants corrompus du continent africain ?

    Je n’accuse pas les occidentaux comme étant à l’origine des maux vécus par le continent africain, loin de là, mais je voudrai seulement insister sur le fait qu’il ne pourra jamais y avoir ni de liberté économique ni de pratique démocratique acceptable en Afrique en l’absence de « véritable transparence et Etat de droit ».

    Autrement, le continent africain restera un éternel source de problème pour la sécurité du reste du monde (points de départ de réfugiés, terreau favorable aux différents extrémismes, demandes incessantes et infernales d’aides publiques au développement, des inégalités sociales croissantes sources de conflits…)

  • 5 octobre 2016 à 12:24 | atavisme premium (#9437)

    Si l’europe animée par des idées de conquetes initiées par le vatican et relayées par les militaires issues de ses aristocraties respectives n’avait pas commis l’idiotie de colonisé le continent Africain,il n’en serait pas ainsi !
    En effet l’Angleterre et la France sont aujourd’hui encore sont justement stigmatisées par les pays ayant subis cette humiliation alors que ces faits ont été perpétrés par des minorités certes dirigeantes ,mais dont les peuples en question en général ne connaisaient et ne profitaient de rien de ces fameuses colonies .
    Ces minorités agissantes le clergé catholique et les hautes sphéres de l’armée et notamment de la marine, pour ne pas les cités, étaient les véritables chevilles ouvrieres et les profiteurs de ces conquetes coloniales .
    Ont suivis la haute fonction publique notamment pour les divers postes de hauts rangs que ce système créaient et enfin les marchands et les quelques colons attirés par ces terres vierges .
    Pour la France, il a fallut la pression des pays colonisées, aidés souvent par l’union soviétique et la chine et quelques fois les américains (Suez 56) ,et le destin d’un homme d’état exceptionnel pour casser ce systéme dont il était issu !
    Je le dit et c’est une réalité intangible les peuples européens ne profitaient pas de la colonisation .
    Pour Madagascar je ne peux que faire le paraléle avec les évenements actuels ou selon les memes méthodes une minorité agissantes profite a plein par le biais d’un systéme proche du celui du colonialisme d’antan de ce pays .
    Et ce qui est tres fort de la part de la classe dirigeante issue de ce pays c’est de profiter de la critique permanente qu’ils font des anciens colons alors qu’ils appiquent pratiquement les memes méthodes anti démocratiques !

    • 5 octobre 2016 à 13:15 | Isandra (#7070) répond à atavisme premium

      C’est simple, si les Français voulaient que ces charges de la colonisation, lesquelles les pèsent, s’enlèvent, il faudrait qu’ils se rachète, en versant de dédommagement aux pays ses anciennes colonies,...

    • 5 octobre 2016 à 14:14 | atavisme premium (#9437) répond à atavisme premium

      1) Etes vous pretes ,vous et votre monde de foza ,à dédommager le peuple Malagasy que vous accabler de misère depuis 50 ans ?
      De plus les descendants d’esclavagistes sont-ils pret également à payer pour tous les descandants d’esclaves ?
      2) Les initiateurs de cette tragédie qu’a été la colonisation ont été les curés du vatican afin de conquérir de nouvelles ames .Je vous prie donc de vous adressez a ce pays , lls sont très riche et peut etre voudront -ils payés !
      3)Les gens qui controlaient l’armée et notamment la marine Française appartenaient en grande partie a l’aristocratie (encore aujourd’hui elle est surnomée la « royale » et ce n’est pas pour rien !)
      Ces gens avec les curés ont été la cheville ouvriere de la colonisation ,je vous prie donc, comme ce sont vos frères de rang, de vous adressez directement à eux pour ces questions pécuniaires .
      Une partie du peuple Français se joindra a vous pour tout leur service rendus et notamment la défaite de 1940 a laquelle ils ont contribués grandement .
      Je pense également que les collabos malagaches et donc leurs descendants directs qui dirigent actuellement ce pays , avaient liés avec ces gens là des liens tres fort ,force à vous de vous servir ces relations privilégiées !

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