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Editorial

Pétition

Lettre ouverte à Monja Roindefo : « Yes you can ! »

lundi 31 août 2009 | Ndimby A.

Note de la rédaction : exceptionnellement, ce jour, nous n’invitons pas nos lecteurs à commenter l’éditorial. Explications à la fin de l’article.

Monsieur,

Le jour où votre nomination comme Premier ministre de la Place du 13 Mai avait été annoncée, j’étais par hasard avec des gens que vous ne connaissiez que très vaguement, mais à qui vous aviez généreusement offert votre aide, il y a de cela quelques années. Ces personnes avaient donc eu l’occasion de « vous pratiquer » hors de tout contexte politique ou de jeu de pouvoir, et avaient gardé de vous le souvenir d’un « bon type », selon leurs termes. Un a priori favorable au sujet de vos qualités humaines n’est donc pas une utopie.

Aujourd’hui, le temps n’est plus à rechercher qui est le responsable de la situation que nous vivons actuellement, mais à étudier quelles peuvent être les clés de la sortie de crise en capitalisant sur les acquis de Maputo 1. Et si le retour à la sérénité pour le peuple et les entreprises passe par une acceptation du fait accompli, beaucoup de personnes même fondamentalement opposées au coup d’Etat actuel, sont prêtes à le faire (en espérant cependant que ce soit pour la dernière fois). Henri IV avait mis fin à la guerre des religions en acceptant de se convertir au catholicisme, et avait prononcé la formule devenue célèbre : « Paris vaut bien une messe ». La paix à Madagascar ne vaut-elle pas bien que chacun fasse taire ses convictions et ses ambitions ? C’est dans cet esprit que nous vous invitons à renoncer volontairement au poste de Premier ministre, avant le 4 septembre 2009.

Dilemme cornélien : le désir ou le devoir ?

Nous sommes conscients que notre proposition vous place devant un réel dilemme cornélien : faut-il suivre l’inclination naturelle de tout homme politique, qui est celle d’exercer le pouvoir ; ou faut-il prendre la décision de se retirer pour permettre la sortie de crise ? Car c’est vous qui êtes maintenant et personnellement le facteur de blocage aux Accords de Maputo. Si la mouvance Rajoelina acceptait de lâcher la Primature, les autres mouvances accepteraient bon gré mal gré de lui laisser la Présidence dans une sorte de package. Mais en exigeant les deux postes de l’Exécutif, votre camp devient un obstacle vers la paix, quels que soient les artifices de language populiste utilisés. Même avec la meilleure volonté du monde, il est normal que les autres mouvances refusent dans le contexte actuel de donner à la mouvance Rajoelina le beurre, l’argent du beurre, avec en prime la bénédiction de la crémière. Si ce n’est du laitier.

Or, du fait de la pression de son entourage, Andry Rajoelina n’aura ni la latitude et encore moins le courage nécessaire pour vous enlever de la Primature, car il se retrouverait accusé de trahison envers les compagnons de lutte. Il faut avouer que vos manœuvres politiques personnelles (en recherchant l’appui de certains chefs de l’armée ou de la Haute cour constitutionnelle) ont aussi compliqué la situation, même si c’était sans doute de bonne guerre. La responsabilité de la décision qui permettra de décrisper la situation repose donc maintenant sur vos épaules. Quant à ce prétexte de consulter l’avis de la base populaire d’ici le 4 septembre, l’expérience montre que la démocratie directe pour demander l’avis de la foule a toujours été un système pernicieux : la foule savamment manipulée et conditionnée ne peut être que l’écho de la volonté de son maître. Vous avez eu l’expérience de la marche sur Ambohitsirohitra le 7 février 2009, et je n’ose pas croire qu’en votre for intérieur, vous ne ressentez pas une part de responsabilité, même minime, dans ces images effroyables.

Vous êtes suffisamment instruit et au fait des tendances économiques mondiales pour savoir qu’en cas de blocage de la situation, le pire n’est pas derrière nous. Dans un contexte planétaire de crise financière et de récession, nous ne pouvons pas nous permettre de rajouter encore d’autres graves problèmes internes. Après les morts et les pillages, entre 30.000 et 50.000 emplois ont déjà été perdus. Des centaines d’entreprises ont fermé, ou se sont mises en chômage technique. Maintenant, le spectre de la perte des privilèges de l’AGOA nous pend au nez. 100.000 emplois directs, 300.000 emplois indirects, soit plus d’un million d’individus dont les revenus sont menacés. Nul gouvernement ne pourra gérer la crise sociale sans précédent que cela risque d’entraîner. Beaucoup de ces hommes risquent de devenir des délinquants, beaucoup de ces femmes des prostituées. Et ne parlons même pas de l’avenir de leurs enfants, ni des 246 millions USD de recettes d’exportation générées par ce marché.

Vous connaissez ces chiffres. Je fais exprès de ne pas épiloguer longuement sur la question de la suspension des aides internationales sans lesquelles aucun Gouvernement à Madagascar ne peut survivre longtemps, du fait d’une dépendance qui est sans aucun doute affligeante, mais qui est une réalité. Et contrairement à ce qu’affirment les pseudos-nationalistes, une république autarcique n’est pas une solution viable, et encore moins de nos jours. Vous êtes un homme d’affaires, vous avez obtenu vos diplômes à l’extérieur, vous êtes polyglotte : ne laissez pas les apprentis-sorciers de la politique vous apprendre ce qu’est une planète mondialisée.

Vous voyez enfin qu’une partie de l’armée commence à être un souci, car une fois qu’on a ouvert certaines boîtes de Pandore, on ne sait jamais ce qu’il peut en ressortir. Et si, parait-il, la discipline est la force principale des armées, la succession de certains événements depuis le début de l’année est plus que préoccupant.

L’héritage de Monja Jaona

À vous de juger si vous apporterez plus au pays en quittant Mahazoarivo cette semaine, ou en y restant. Vous trouverez toujours des gens qui vont vous pousser à faire le forcing, et à vous encourager à vous agripper envers et contre tout à votre fauteuil de Mahazoarivo. Je vous rappelle la fameuse prière de Voltaire : « Mon Dieu, gardez moi de mes amis ; quant à mes ennemis, je m’en charge ! ». Il est tout à fait compréhensible que pour le chef d’un parti comme le vôtre, la situation était une occasion inouïe d’accéder au pouvoir sans trop d’efforts financiers, et y renoncer demande des qualités morales surhumaines. Mais qui vous dit que vous ne les avez pas ? Il y a quelques mois, vous aviez averti dans une interview que « vous étiez un guerrier ». Vous savez cependant que dans toute guerre, surtout quand elle est civile, il peut y avoir un vainqueur sur le terrain pendant un certain temps plus ou moins long, mais le pays et son peuple sont systématiquement les perdants. Vous n’avez peut-être pas le pouvoir de nous emmener au Paradis, mais vous avez assurément une chance de nous éviter l’Enfer. Soyez donc un guerrier, mais contre les effets pervers de la nature humaine, et pour la refondation de notre pays.

J’en appelle donc à l’héritage moral que vous a légué votre père, le grand nationaliste Monja Jaona. S’il fallait faire un choix entre la satisfaction humainement légitime de votre ego, d’une part ; et une réelle contribution personnelle au retour de la paix de votre pays, d’autre part ; que vous aurait-il conseillé ? J’en appelle à la prospective du regard de cet enfant que vous venez d’avoir au début de l’année 2009 : pensez-vous qu’il lui soit préférable d’apprendre plus tard que la magnanimité de son père a permis la réconciliation nécessaire, ou bien que son intransigeance a favorisé les extrémismes coupables ?

Il ne s’agit pas seulement ici de parler de grandeur d’âme ou de patriotisme. Il s’agit aussi de stratégie, afin de reculer pour mieux sauter. Vous avez encore tout un avenir politique devant vous, et renoncer à la Primature pendant la Transition n’est pas la fin du monde, surtout que d’autres postes pourraient vous être proposés, tout en vous plaçant suivant la formule consacrée « en réserve de la République ». Votre retrait volontaire ne pourrait être que bien accueilli par ceux qui recherchent la paix, et au lieu d’avoir sur la conscience une crise socio-politique d’une ampleur extraordinaire, vous pourrez avoir la satisfaction d’avoir personnellement démontré que vos valeurs patriotiques se placent au dessus de vos ambitions personnelles.

Vous savez mieux que personne qu’après les exemples pitoyables offerts par la majorité de notre classe politique depuis 1960, les Malgaches sont actuellement à la recherche de bonnes références en matière d’éthique politique, de patriotisme et de citoyenneté. Imaginez le capital que constituera pour votre futur, tant sur le plan national qu’international, une annonce de votre renonciation volontaire à la Primature, au nom de ce fameux « intérêt supérieur de la nation » que toutes les mouvances clament mais que personne ne voit. Eventuellement, tentez de négocier avec la mouvance Rajoelina d’être son candidat aux prochaines élections, et offrez votre retrait actuel contre le désistement futur des autres. Mais n’en faites pas une condition sine qua non, car seule votre sagesse peut dépendre de vous.

Certes, la décision finale ne sera pas facile à prendre, et vous devrez la prendre seul avec Madame votre épouse. Car l’avis des politiciens que vous consulterez ne se fera qu’à la lumière de leur propre intérêt à ce que vous restiez en place. Or, comme disait Albert Camus, « la grandeur de l’homme est dans sa décision d’être plus fort que sa condition ». Contrairement à ce qui est nécessaire pour servir vos intérêts personnels et ceux de votre groupe politique (mouvance Rajoelina ou Monima), vous n’avez pas besoin d’être au pouvoir pour servir les intérêts de Madagascar. L’anglophone que vous êtes connaît certainement le fameux texte de Douglas Mallock rendu célèbre par Martin Luther King, et dont la traduction dit :

« Si tu ne peux être pin au sommet du coteau,
Sois broussaille dans la vallée.
Mais sois la meilleure petite broussaille
Au bord du ruisseau.
Sois buisson, si tu ne peux être arbre.
Si tu ne peux être route, sois sentier ;
Si tu ne peux être soleil, sois étoile ;
Ce n’est point par la taille que tu vaincras ;
Sois le meilleur, quoi que tu sois ».

Vous avez l’opportunité d’inscrire votre nom en lettres d’or dans l’Histoire, comme ces (trop rares) personnalités qui ont fait le choix de renoncer au pouvoir pour ne pas engager leur pays dans une crise politique. Que les Al Gore, Antonio Mascarenhas ou Abdou Diouf soient vos références, plutôt que les Robert Gueï, Viktor Ianoukovytch ou autres Mahmoud Ahmadinejad.

Nous vous engageons alors à faire le choix d’être l’élément principal de la solution, et non à être le cœur du problème. L’être humain ou l’homme politique que vous êtes pourrait souffrir un temps du choix à faire, mais l’homme d’Etat que vous aspirez être n’en sortira que grandi. A vous de juger si vous apporterez plus au présent et à l’avenir de notre patrie en quittant volontairement Mahazoarivo pour donner une chance aux Accords de Maputo, ou en y restant.

Le jour de votre nomination, dans la mouvance d’une Obama-mania compréhensible, vous aviez fait scander à la foule du 13 mai « Yes we can ». Aujourd’hui, à notre tour, nous vous disons : « Yes you can ».

Au nom de la Rédaction de Tribune.com et de tous ceux qui vont signer la pétition pour appuyer cette proposition de solution,

J’ai dit.

P.-S.

Note de la rédaction : L’on pourrait encore discuter de longs mois sur les meilleures solutions pour sortir Madagascar de la crise de 2009, mais après les négociations de Maputo, Madagascar est à l’heure des choix.

Il n’est pas de solutions parfaites, mais celle mise en avant dans cet éditorial, avec Andry Rajoelina à la Présidence de la Transition et une personne issue d’une autre mouvance comme Premier Ministre, apparaît à la rédaction comme un compromis réaliste pour la Transition.

Nous invitons donc ceux de nos lecteurs qui acceptent ce compromis à se manifester en signant de leur nom et de leur adresse mail la pétition qui figure ci-après. Pour éviter les abus, une demande de confirmation sera automatiquement envoyée à chaque signataire par courrier électronique.

Identifiants personnels
Lien hypertexte :

Signatures

163 Signatures
Date Nom
2 septembre 2009 RENAUD Nicolas
2 septembre 2009 Andrianisa Rolland Albert
2 septembre 2009 jeannot RAKOTONDRAVOHITRA
2 septembre 2009 volaravo josie
2 septembre 2009 Rakotonandrasana Hariniaina
2 septembre 2009 Zix Rolland
2 septembre 2009 rakoto dabo
2 septembre 2009 JOSE CHRISTIAN
2 septembre 2009 Ramaroson F.
2 septembre 2009 trimoson hito
2 septembre 2009 RANDRIANANTENAINA Jean-Claude
2 septembre 2009 rabogossy
2 septembre 2009 RAZAFITRIMO Veroniaina
2 septembre 2009 rakoto
2 septembre 2009 Ravelomanantsoa Tsiorinirina
2 septembre 2009 RABARIMANJATO SYLVIE
2 septembre 2009 Armandine Simon
2 septembre 2009 Juste RANDRIANIRINA
2 septembre 2009 rakotomalala gerard
2 septembre 2009 Jean

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