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Antananarivo | 15h40
 

Editorial

Dé-fête des salariés

mercredi 2 mai 2012 | Patrick A.

Rarement une Fête du Travail aura été aussi morne et sera passée aussi inaperçue que celle d’hier. Cela faisait déjà plusieurs années que l’on ne voyait plus de grandes manifestations de travailleurs, mais au moins le symbole du jour chômé et payé restait fort et respecté, notamment dans le secteur formel. Il fut un temps où tout employeur étranger un peu avisé apprenait rapidement que la législation malgache en matière de travail était relativement souple et que nombre de salariés étaient demandeurs d’heures supplémentaires pouvant leur amener des compléments de revenus, mais qu’il y avait cependant deux journées où il valait mieux éviter de faire revenir ses salariés sous peine de passer pour un affreux esclavagiste : le 29 mars et le 1er mai.

Ce n’est visiblement plus le cas en 2012. Pour les nostalgiques du jour symbole de l’unité des travailleurs, ce 1er mai 2012 avait comme des airs d’entrée en saison d’hiver, tant le nombre de commerces ayant pignon sur rue et qui ont choisi d’ouvrir leurs portes était élevé.

Il est vrai que si le 1er mai est supposé être jour d’unité des travailleurs, les trois dernières années ont prouvé que la division payait bien mieux, en particulier pour celui qui est agent de la Fonction publique. Les revendications corporatistes et catégorielles se sont multipliées, et chaque groupe s’est efforcé et de rentabiliser au mieux les particularismes le distinguant de la « plèbe » des autres agents de l’État : à ce petit jeu là, pour pouvoir faire pression auprès des tenants des cordons de la bourse, il valait assurément mieux être situé à Antananarivo dans un ministère susceptible de provoquer des nuisances dangereuses ou spectaculaires (militaire, gendarme, policier, enseignant-chercheur, douanier, magistrat...) que simple agent de l’État au sein des régions profondes où de possibles retombées de grèves auprès des administrés émouvraient beaucoup moins les médias.

Si les syndicats et associations propres à un métier se sont multipliés au sein de la Fonction publique, les choses sont restées tout autres dans le secteur privé. Bien rares ont été les entreprises qui ont fait transparaitre des richesses non budgétisées sur lesquelles les salariés auraient pu réclamer une part de gateau. Dans ces conditions, il aurait été périlleux de scier la branche sur laquelle tout le monde était assis : les menaces de grève et les demandes de véritables réformes en profondeur furent rares.

Pour porter ces demandes, il eusse encore fallu qu’il y ait eu des organisations capables de les porter. Mais dans les entreprises en ayant, la représentativité des délégués des personnels est plus que jamais obérée par le fait que seules les organisations syndicales considérées comme « nationalement représentatives » peuvent proposer des candidats [1]. Et bien souvent, ces personnes élues sont plus des individus intéressés par le statut protecteur de délégué du personnel que des leaders naturels désireux de défendre les intérêts communs des salariés de l’entreprise.

Bon nombre d’employeurs se satisfont bien de cette faiblesse des syndicats et de l’absence de vecteurs de revendications. Certains d’entre eux n’hésitent d’ailleurs pas à en abuser : sachant le Malgache peu procédurier, ils n’hésitent pas à verser dans l’illégalité lorsque cela les arrange, par exemple en licenciant quasi-systématiquement toutes les femmes enceintes.

Cette vision à très court terme du profit est typique de notre époque. Elle n’en doit pas moins inquiéter, à commencer par les employeurs qui ont l’intention de rester longtemps à Madagascar ou qui ne peuvent faire autrement, et à qui l’expérience du pays prouve que la méthode du couvercle sur la marmite peut montrer brusquement ses limites au moment où l’on s’y attend le moins.

Notes

[1Ce n’est qu’en l’absence de candidats présentés par les syndicats nationaux ou de quorum à un premier tour de scrutin que les candidats libres sont admis à un deuxième tour de scrutin.

7 commentaires

Vos commentaires

  • 2 mai 2012 à 10:35 | plus qu’hier et moins que demain (#6149)

    En période de crise, les risques affectent tout le monde, aussi bien les employeurs que les employés. D’où les proverbes malgache :« ALEO MIHINANA KELY TOY IZAY MANDRY FOTSY » - « NY HENDRY MODY VOKY FA NY ADALA MANESIKA IHANY ».

  • 2 mai 2012 à 11:45 | RAMAHEFARISOA Basile (#6111)

    « Les travailleurs de chez Magro sont descendus jusqu’à la place du 13 Mai ».

    BRAVO l la fête des travailleurs est sauvée pour 2012.

    Votre note 1 est valable,mais les non-syndiqués peuvent faire voter blanc pour ne pas atteindre le quorum et provoquer un deuxième tour où tous les non-syndiqués peuvent se présenter à l’élection du représentant du « Personnel ».
    Expérience personnelle.
    basile RAMAHEFARISOA
    b.ramahefarisoa@gmail.com

  • 2 mai 2012 à 11:56 | kakilay (#2022)

    Voyez-vous :
    tout fout le camp !

    Du jamais vu,
    depuis que le pt est au pouvoir,
    avec ces « ponts » de dernière minute,
    de mémoire de DRH :
    ce sont des employés qui demandent,
    à la DRH dans certaines entreprises,
    à travailler lors de ces ponts :
    pour ne pas subir
    cette décision des putschistes.

    • 2 mai 2012 à 12:49 | intrus (#6296) répond à kakilay

      ssshhhh

      Fotoanan’ny tetezana aki zao ry kaki a !

      Et si certains employés jouent les chochottes auprès de la DRH c’est pour ne pas louper les salaires...

      Tout va à merveille chez nous :
      - les profs sont contents
      - les médecins pareils
      - Les avocats satisfaits
      - Les transporteurs s’en mettent pleins les poches vu que le carburant coûte trois fois rien.
      - L’université ??? y a que ça de vrai...
      - Le reboisement bât son plein avec des baobabs amoureux qui vont se reproduire comme des lapins malgré quelques pillage de bois de rose par ci par là...
      - La communication, c’est la liberté totale.

      Y a que les militaires et les gendarmes qui se sentent mal dans leur peaux... Ouais, ils ont du mal à arrondir leur fin de mois vu qu’ils se sont tous mis à construire leur Villa.

      C’est tout le temps la fête chez nous, c’est la marque de fabrique d’un DJ président...

      Alors kaki, il faut voir les choses positivement ;) le verre est à un dixième plein !

    • 2 mai 2012 à 13:10 | kakilay (#2022) répond à intrus

      Une chose est sûre :
      des gens profitent des jours chômés
      pour manifester leur désaccord :
      avec magro !

    • 2 mai 2012 à 16:08 | da fily (#2745) répond à intrus

      pourquoi en effet zapper un salaire ? Mais au fait ce premier mai là est bien payé non ?

      Z’aime le reboisement de baobab amoureux, celui-là au moins fera des petits, tandis que les andramena ont enterré les petits qu’ils ont à peine laissé.

      Chohottes, comme tu y vas amigo, la fête du travail, c’est encore sacré bowdel !

  • 2 mai 2012 à 12:54 | intrus (#6296)

    Ah oui, il faut combattre le feu par le feu.

    Donc pour en venir à bout de ce tetezamita, il nous faudrait un pont très long..... 2 à trois mois de grève général suffirait peut être ? Enfin, ça dépent du stock de lacry de Richard et de la capacité de tsiafahy !

    Ou ou, puisque lapinou aime la fête, offrons lui une balle.... entre ses deux yeux (plus à gauche donc dans son cas car il ne les a pas symetrique) !

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