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Dossier

Codification

lundi 13 novembre 2017 | Sahondra Rabenarivo

Il existe une confusion dans l’opinion publique malgache sur cette question de code électoral. La confusion trouve sa source dans l’appellation, incorrecte, donnée à la loi organique 2012-005 du 22 mars 2012. Celle-ci s’appelle « loi organique n°2012-005 portant code électoral » [1]. Or, cette loi n’est pas vraiment un code. Un code est un instrument de référence unique, qui rassemble et rationalise dans un même volume, les différents textes (lois et règlements) pouvant toucher à un sujet donné, ici les élections. Le travail de codification consisterait en rassembler et organiser dans un seul document toutes les lois et tous les décrets malgaches qui touchent aux élections. En d’autres termes, il s’agirait de réunir en un seul document les textes suivants :

  • Les articles applicables de la Constitution ;
  • La loi organique relative aux élections (en remplacement de la loi 2012-005, qui concerne les règles générales relatives à l’exercice du droit de vote (qualité d’électeur, liste électorale, opérations électorales, campagne électorale et propagande, déroulement du scrutin, dépouillement, observation, le contentieux)) ;
  • Les lois spéciales et organiques relatives à chaque type d’élection (en remplacement de la loi 2012-015 sur l’élection du premier Président de la 4ème République ; la loi 2012-016 relative aux premières élections législatives de la 4ème République, la loi 2014-020 et 2015-002 sur les Collectivités territoriales Décentralisées et les modalités d’élections) ;
  • La loi 2015-020 sur la Commission Électorale Nationale Indépendante (existante ou amendée) ;
  • La loi 2012-006 portant Code d’éthique et bonne conduite politique des acteurs politiques pendant la transition (existante ou amendée) ;
  • La loi 2016-037 relative à la réconciliation nationale (existante ou amendée) ;
  • La loi 2011-012 relative aux partis politiques (existante ou amendée) ;
  • La loi 2011-013 portant statut de l’opposition et des partis d’opposition (existante ou amendée) ;
  • Le code pénal (existant ou amendé) (concernant l’éligibilité des électeurs, des candidats ainsi que des sanctions pénales diverses) ;
  • La loi anti-corruption (existante ou amendée) (concernant la corruption électorale) ;
  • La loi sur le blanchiment d’argent (existante ou amendée) (concernant les sources de financements électoraux) ;
  • Le code de communication (existant ou amendé) (concernant la communication électorale) ;
  • Le code de nationalité (existant ou amendé) (concernant l’éligibilité des personnes naturalisées) ;
  • Toute nouvelle loi, si séparée, sur le financement des partis et des campagnes électorales ;
  • Et tous les décrets et arrêtés relatifs aux élections.

Ce ne serait pas une chose aisée de rédiger aujourd’hui un « code électoral », ni de codifier les textes existants. La priorité, aujourd’hui, est de présenter les nouvelles lois ou les modifications aux lois existantes, pour tenir des élections crédibles et acceptées par tous [2] en 2018.

En lisant les recommandations issues de la société civile et des partis politiques, regroupées dans le rapport [3] de la commission consultative, un certain nombre d’entre elles touche à différentes lois et pas à la seule loi n°2012-005. Pour ne citer que quelques exemples :

  • Les règles de financement des campagnes électorales n’existent pas encore et devraient intégrer la loi électorale générale, tandis que certaines règles concernant le financement des partis politiques existent déjà dans la loi relative aux partis politiques et pourraient être améliorées ;
  • Les règles concernant l’éligibilité des électeurs (et par extension des candidats) sont dans la loi électorale générale ;
  • Les règles concernant l’indépendance de la CENI sont dans la loi relative à la CENI ;
  • Les règles concernant l’éligibilité des candidats à la Présidence sont dans la loi spéciale relative à l’élection du Président, même chose pour les députés (qui doivent aussi être élus en 2018) ;
  • Les règles concernant le type de scrutin (de liste, uninominal, à un tour ou deux) sont dans les lois spéciales (assemblée nationale, CTD)

En bref, les recommandations issues de la société civile et des partis politiques, pour être traduites en textes légaux, doivent venir amender ou remplacer une demi-douzaine de lois existantes, qui pourraient ou pas être regroupées dans une seule loi, ou, par la suite, codifiées. Les recommandations appelaient aussi à limiter les situations où le gouvernement peut réglementer par décret (comme dans le cas des fameuses autorités politiques pouvant faire de la propagande).

Il mérite aussi d’être rappelé que la Constitution liste parmi les questions qui relèvent d’une loi organique [4] les règles relatives à l’élection du Président de la République, des députés, des sénateurs et des collectivités territoriales décentralisées (j’ajoute, en passant, la loi de finances). Qu’est-ce qui distingue une loi organique d’une loi ordinaire [5] ?

  1. Le projet (ou la proposition) de loi ne peut être voté qu’à l’expiration d’un délai de 15 jours après son dépôt.
  2. La loi ne peut être votée que par la majorité absolue des deux chambres, c’est-à-dire 76 députés et 32 sénateurs [6], et
  3. Faute d’accord entre les deux assemblées après deux lectures, l’assemblée nationale seule peut la voter à une majorité des deux-tiers. Si l’assemblée n’a pas adopté le projet avant la clôture de la session, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par ordonnance.

Bref, les avant-projets de lois (dans la mesure où elles doivent être organiques) doivent être soumises au parlement bien avant le 23 novembre pour permettre le délai de 15 jours sus-mentionné ainsi que le va-et-vient entre l’Assemblée Nationale et le Sénat. En effet, l’article 75 de la Constitution dispose que la deuxième session parlementaire ne dure que 60 jours à partir du 3ème mardi du mois d’octobre (17 octobre officiellement (25 octobre officieusement, pour cause du décès du Président Zafy), pour se terminer alors, officiellement, le 15 décembre, ou officieusement le 22 décembre). Pour rappel, pour les élections de sortie de crise de 2013, les lois applicables ont toutes été promulguées le 1er août 2012, soit plus d’un an avant la date du scrutin initialement prévue en août 2013.

12 novembre 2017

Notes

[1Il mérite de noter que cette appellation dure depuis plusieurs versions de la loi, et que cette tendance à appeler des lois des codes est assez prononcée en droit malgache (code de l’électricité, code minier, code pétrolier….).

[2Nous parlerons un autre jour des élections « inclusives » et « transparentes ».

[3Disponible sur le site web de la CENI.

[4Article 88 de la Constitution.

[5Article 89 de la Constitution.

[6En réalité, qui vérifie ? La HCC, j’espère.

2 commentaires

Vos commentaires

  • 13 novembre 2017 à 11:11 | Vohitra (#7654)

    Bonjour à tous,

    L’exécutif ainsi que les législateurs ont tout fait pour rendre difficile l’avènement d’une élection présidentielle crédible dans le pays, et le risque majeur est de tomber dans le piège et l’abysse d’un juridisme et d’éloigner beaucoup plus les électeurs dans leur soucis légitime de se préoccuper de la chose publique importante notamment en ce qui concerne les élections.
    Quelques parts, l’Amiral rouge avait raison de dire qu’à Madagascar, il serait difficile de battre une administration qui se lance dans une manipulation électorale, et en Afrique en général, on n’organise pas une élection pour la perdre après.

  • 14 novembre 2017 à 09:47 | Babah (#9347)

    ■ Cette confusion = « habadoana » en malgache.

    ■ Et, stupidement, cette confusion n’empêche pas qu’on « continue » la discussion ... = politique-balawass.

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