Facebook Twitter Google+ Les dernières actualités
vendredi 29 mars 2024
Antananarivo | 15h59
 

Communiqué

SeFaFi

Après le hold-up législatif, un hold-up électoral ?

mercredi 11 avril 2018

Nombre d’élections tenues à travers le monde, ces derniers temps, n’offraient pas de véritable choix aux citoyens concernés, et leurs résultats étaient largement connus à l’avance. Ce fut le cas à Djibouti, en Chine, en Egypte et en Russie, pour ne citer que les plus médiatisés. Dans ces pays, ceux qui détiennent le pouvoir se font réélire par tous les moyens possibles : candidature unique, exclusion des adversaires potentiels, bouclage des médias publics, muselage de la société civile qualifiée de « dissidente », procès truqués contre les adversaires, manipulation de l’encadrement juridique et mainmise sur l’appareil électoral. Il ne reste plus alors, pour les intéressés comme pour l’opinion internationale, qu’à se prévaloir d’un taux de participation massif. Pour y parvenir, et légitimer la victoire du vainqueur, la palette des moyens destinés à convaincre les gens à se déplacer jusqu’au bureau de vote est sans limites. Citons, entre autres, les croissants et le café offerts dans les bureaux de vote russes, la contrainte du citoyen par l’administration locale égyptienne ou la distribution de billets de banque aux électeurs qui rapportent le bulletin de la partie adverse après le vote.

L‘attention accordée au taux de participation signale quand même l’importance, même dans les autocraties, de la légitimité électorale. Car il est toujours préférable, aux yeux du monde, de se faire élire – même avec un pourcentage plus que critiquable – plutôt que de prendre le pouvoir par d’autres moyens. Un semblant de démocratie, même chez les autocrates les plus confirmés, devient alors incontournable. À l’exception d’une poignée de pays tels que la Corée du Nord, l’Erythrée ou les monarchies du Golfe, la voie électorale, ou ses apparences, reste un passage obligé pour tous les dirigeants.

Dans ces conditions, la question qui se pose à nous, aujourd’hui, est de savoir quelle sera la légitimité électorale issue des élections de la fin de l’année. Seront-elles véritablement crédibles ? Les électeurs auront-ils un vrai choix, sur la base de vrais programmes, ou se détourneront-ils des urnes ? La légitimité viendra-t-elle du bourrage des urnes dans les régions éloignées, pour que soit atteint le seuil fatidique de 40% de participation – qui indiquera aussi que 6 citoyens sur 10 n’auront pas jugé utile d’aller voter ? Ou viendra-t-elle de la manipulation des résultats électoraux, perdus dans le labyrinthe administratif prévu par les lois électorales avant même leur proclamation ? À l’heure où nous écrivons, la question est devenue critique pour l’avenir de notre pays.

L’encadrement juridique des élections

Grâce aux technologies modernes, les citoyens commencent à voir comment les députés s’acquittent de leur double tâche professionnelle : voter les lois et surveiller l’action du gouvernement. La plupart du temps, ces représentants du peuple sont aux abonnés absents, tout en profitant des indemnités et des avantages en tous genres que leur procure leur statut. À l’occasion de la discussion des projets de lois électorales, le citoyen pouvait espérer que se tienne enfin un vrai débat démocratique. Mais là où il s’attendait la mise en place d’un encadrement juridique légitimant les futures élections, il n’a vu que les calculs égoïstes des uns et des autres. La faute en incombe pour l’essentiel au gouvernement qui n’a pas voulu entendre les recommandations et revendications émanant de partout, notamment de la société civile. Sous-estimant son vrai pouvoir, il pensait faire voter sans coup férir des lois qui favoriseraient le(s) candidat(s) du régime. En réalité, les conditions dans lesquelles ces lois électorales ont été votées rendront apparemment très difficiles un encadrement légal incontestable et accepté par tous, ce qui constitue pourtant le premier ingrédient pour des élections crédibles.

Un choix véritable

Tout en laissant ouvert pour les citoyens le choix de leurs futurs dirigeants, les lois électorales ont toujours posé des conditions d’éligibilité, car certains crimes ou délits peuvent aboutir à priver des citoyens du droit de vote et donc de celui d’être élu. Ainsi, des personnes condamnées pour atteinte à la vie d’autrui ou pour détournement de fonds publics peuvent légitimement être empêchées d’être candidates à une élection présidentielle.

Parmi les candidats potentiels aux élections présidentielles à venir, bon nombre tombent sous le coup de ces chefs d’accusation. Mais certains n’ont jamais été condamnés, d’autres se sont fait discrètement amnistier. Un seul a été condamné par contumace, il y a près de dix ans, sans que le verdict ne lui ait été officiellement notifié – ce qui empêche l’intéressé d’user de son droit de recours pour aboutir à une décision définitive. Il est regrettable que les textes électoraux confirment cette impasse et ne permettent pas de trouver une issue équitable.

Sans pour autant cautionner l’impunité et les manipulations politiques visant à écarter les candidatures indésirables, donnons à chacun la possibilité de défendre son bilan et de présenter ses propositions, et laissons le choix final aux électeurs. En toute hypothèse, il aurait fallu mettre des garde-fous réalistes aux candidatures, faute de quoi nous aurons plus de 50 candidats à la présidentielle !

Quant à vouloir reporter les élections pour instaurer une nouvelle transition, sous prétexte de réconciliation nationale, cela permettrait aux politiciens de s’accaparer le pouvoir et, une fois encore, d’écarter la voix du peuple.

Les élections ne font pas la démocratie, mais elles en constituent un élément essentiel même s’il reste du chemin à faire pour qu’elles deviennent vraiment crédibles. La vraie démocratie ne peut se construire qu’avec un meilleur partage des pouvoirs, une décentralisation effective et un respect inconditionnel des droits humains - exigences qui figurent pourtant dans la Constitution et dans nos lois ! Mais au lieu de discuter des moyens d’y parvenir et des choix offerts par les options électorales, l’opinion publique est détournée vers un véritable cirque organisé soit au sein de l’Assemblée nationale, soit par des mesures discriminatoires à l’encontre des opposants. Si nous passons les mois qui restent avant le scrutin à débattre de questions de forme (comme le droit d’exprimer son opinion ou le droit de se réunir) au lieu de nous concentrer sur les questions de fond, l’élu, quel qu’il soit, n’aura pas de véritable légitimité électorale.

Antananarivo, 7 avril 2018


SeFaFi

SEHATRA FANARAHA-MASO NY FIAINAM-PIRENENA
Observatoire de la Vie Publique

Lot III M 33 K Andrefan’Ambohijanahary, Antananarivo 101

Tél. 032 59 761 62 Email : sefafi@gmail.com Site Web : www.sefafi.mg

7 commentaires

Vos commentaires

  • 11 avril 2018 à 09:50 | Isambilo (#4541)

    Ravalomanana a été condamné par un tribunal auquel aucune institution internationale n’ a accordé ni légitimité ni légalité. D’ailleurs il se promène partout, y compris à l’étranger. Preuve, s’il en est, que cette condamnation n’a aucune valeur légale. Il peut donc se présenter aux élections sans que cela signifie qu’il soit innocent de tout.

  • 11 avril 2018 à 11:09 | Mihaino (#1437)

    Bonjour ETHAN,
    Ce communiqué de l’Observatoire de la Vie Publique (SeFaFi) décrit parfaitement le déroulement des élections récentes dans plusieurs pays et je crains fort que nous allions assister à la même chose cette année , si élection il y aura... D’où mon pronostic au 2é tour Hery vs un(e) candidat(e).

    - A votre première question , je répondrai qu’il y a encore de la place pour les jeunes qui ont des projets bien étudiés et bien ficelés pour redresser notre Pays .« Le soleil brille pour tout le monde »dit-on .Seulement , je vous conseille de bien choisir vos partenaires pour les réaliser .N’ayez surtout pas le complexe d’être métis et la non maîtrise de notre langue .Souvenez-vous que le PM Kolo Roger nommé par le président Hery , bafouait dans tous ses discours à l’AN ou ailleurs !Peu importe car notre langue pratique le « vary aminanana » , très fréquent et utilisé par la plupart de nos concitoyens(politiciens, tecnhiciens , journalistes....) Les termes techniques et modernes n’ont pas encore été traduits officiellement en malgache .Vous avez un grand avantage de parler et d’écrire l’anglais.

    Quant à votre deuxième question relative à l’alliance de Ra8 et de Hery , je n’y crois pas trop car ils ont chacun leur caractère et une forte personnalité .Certes , il est clair qu’ils ont leur parti et leur électorat mais durant leur règne quand ils étaient aux affaires , RIEN n’a bougé malgré les mesurettes prises pour freiner la corruption , l’insécurité, les assassinats , les vols .... Les routes construites par Ra8 et les hôpitaux « manara-penitra »ou stades , infrastructures aux normes internationaux construits par Andry commencent à se dégrader et deviennent non opérationnels par manque d’entretien et de budget , semble-t-il ?Leurs programmes énoncés ici et là : IEM, MAP revisé ont été étudiés et conçus par les mêmes conseillers de concert avec certains experts étrangers ! Ra8 a réfléchi à ses erreurs passées et à ses projets en Afrique du sud pendant son exil et Andry a concocté son IEM en France pendant son long silence avec des experts connus et méconnus par les populations malgaches .Leur alliance contre nature n’a qu’un seul objectif à mon avis : Battre Hery pour reconquérir le pouvoir pour continuer leurs business ! Mea culpa , si je me trompe !Vous êtes jeune , instruit ETHAN et il est tout à fait normal qu’on vous contacte pour solliciter votre collaboration ! Réfléchissez bien avant de vous engager et je vous souhaite bon courage et bonne continuation .
    Enfin , j’ai ma petite idée pour l’adversaire potentiel de Hery à cette course à la magistrature suprême de 2018 .
    Cordialement ,

  • 11 avril 2018 à 14:16 | LOVAXEL (#10217)

    Bonjour

    qui pense un seul instant que le Ministre des affaires étranges ne se déclarera pas candidat un fois
    son principal esclave éliminé

    il connaît tout des alcoves de la Présidence
    est en prise directe avec les dames de la Dame ...

    vu le calibre de cet escroc de haut vol, mieux vaut une dictature

  • 11 avril 2018 à 19:15 | GADSDEN_FLAGIVANDRY (#8661)

    Pesons le pour et le contre .Concrètement , en termes de répercussions positives que ce soit sociétales ou économiques ça nous à rapporté quoi de vouloir nous rapprocher du modèle de démocratie à l’occidentale.Madagascar est devenu un pays plus stable ? plus respecté ? plus industrialisé ? mieux géré ? ... Chacun répondra ce qu’il voudra.En ce qui me concerne la grosse escroquerie c’est ce conditionnement post colonial insufflé en grande partie par l’occident qui nous pousse à croire que la voie du développement passe obligatoirement par une démocratie à l’occidentale avec les accessoires usuels (liberté d’expression ,de culte,antiracisme,liberté d’orientation sexuelle ...) .La réalité c’est que même les démocraties occidentales surtout européennes perdent leur essence en adoptant ce mode de pensée.Ce que je pense c’est que quand on est sur des bases fragiles il convient à un moment de se poser des questions sur ce que l’on est vraiment et essayer d’avancer en évitant de brusquer sa propre nature.Nous sommes un peuple massivement conservateur sur beaucoup de questions que ce soit du point de vue spirituel,sociétal ou même économique .
    A quoi bon vouloir refouler ce conservatisme ? au non de la marche dès le progrès ? Un pays comme le japon garde ses mêmes us et coutumes et habitudes culinaires d’avant le moyen-âge jusqu’à maintenant avez vous l’impression que le japon est un pays d’arriérés ? L’indonésie a pratiquement la shariah en guise de constitution ,vous avez vraiment l’inpression que l’Indonésie est un pays de ploucs néanderthaliens ?.La morale c’est que cette course au sacrosaint modèle démocratique posé en condition sinéquanone par l’occident est une escroquerie que l’on poursuit alors qu’au fond de nous ,nous ne sommes pas faits pour ça .Il est donc grand temps qu’on se réveille et que l’on pense à un modèle sérieux et surtout qui nous est propre !!!!

  • 12 avril 2018 à 15:35 | LovaBova (#10239)

    Une chose que je sais à coup sûr. Nous voyons franchement des retombées positives, on n’a plus qu’à continuer. Héry, continue ton travail !

  • 15 avril 2018 à 17:36 | Lekivy 2 (#10161)

    Quand on voit certains hommes politiques ou citoyens participant à des débats télévisés interpellant le Président à déposer sa démission, on ne se peut s’empêcher de sourire. Avec tout le mal que le pouvoir se donne pour éliminer ou gêner ses adversaires déclarés ou potentiels, il est invraisemblable d’envisager une seule seconde une telle option. C’est tout simplement utopique.
    Les agissements actuels des tenants du pouvoir peuvent être assimilés à de la provocation pure et simple à l’endroit de ses adversaires. Dès le lendemain des embrassades et poignées de main hypocrites devant les chefs religieux à l’occasion d’un Zaikabe ou d’une béatification, c’est le full contact ou le combat de rue sans règles.
    Le forcing sur l’adoption des lois électorales et toutes les exactions envers les opposants tendent vers trois options :
    - soit la guerre de nerfs réussit et les candidats les moins résistants se laissent entrainer dans une tentative de coup d’état, ce qui constitue un suicide politique pour lui car comme l’article de la SEFAFI le démontre, la communauté internationale en est fermement contre,
    - soit l’opposition fait appel à la médiation du CFM/SADC, ce qui n’aura pas d’effet car les tenants du pouvoir vont argumenter qu’ils ont suivi toutes les démarches requises par la constitution,
    - soit les opposants essaient de mobiliser leurs bases pour des manifestations de rues, qui ont peu de chances d’aboutir également, les pouvoirs de transition ayant démontré l’efficacité de la répression de telles manifestations, la population étant également réticente à revivre de telles aventures, les issues étant toujours à son désavantage.
    Au final, nous allons assister à un second mandat forcé du HVM qui va faire un grand nettoyage en passant en éliminant tous les transfuges et se targuer d’une majorité absolue (90%) à la chambre basse et la chambre haute.

    • 15 avril 2018 à 19:07 | Isandra (#7070) répond à Lekivy 2

      Lekivy,

       « Au final, nous allons assister à un second mandat forcé du HVM qui va faire un grand nettoyage en passant en éliminant tous les transfuges et se targuer d’une majorité absolue (90%) à la chambre basse et la chambre haute. »

      Je ne suis pas aussi sceptique :

      En effet, nous sommes en train de revivre le même scénario qu’en 2001, où Ratsiraka avait fait tout pour entraver la progression de son adversaire potentiel, mais nous savons tous la suite de l’evene ment, il a été en quelque sorte battu, celui-ci est arrivé en premier au premier tour, toutes les pressions et les timidations n’ont pas pu empêcher d’arriver ce qui devait arriver,...pourtant, la situation de notre pays y était deux fois meilleure qu’aujourd’hui.

      Par ailleurs, depuis 1993, le président en exercice est battu non réélus, s’il a en face de lui un candidat de poids. Ravalo a exceptionnellement été réélu, parce que il n’avait comme adaversaires que des poids plumes, il avait déjà fait tout pour que les poids lourds soient forfaits,...

      C’est pourquoi, les adversaires de Hery ne devraient pas baisser Le Bras, il faudrait qu’ils aillent jusqu’au bout quelques soient les agissements de ce régime, les Malagasy commencent à être politiquement mûri, ils donnent souvent leur voix à celui qui se montre courageux,...

Publicité




Newsletter

[ Flux RSS ]

Suivez-nous

Madagascar-Tribune sur FACEBOOK  Madagascar-Tribune sur TWITTER  Madagascar-Tribune sur GOOGLE +  Madagascar-Tribune RSS